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Bull et le 20�me arrondissement.

Ce chapitre est issu d'une conf�rence prononc�e en f�vrier 2003 � la mairie du XX�me arrondissement sous l'�gide de l' AHAV (Association d' histoire et d'Arch�ologie du XX�me arrondissement) et fait l'objet du bulletin N� 32 de cette association.

Les origines

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F.R. Bull

Le vingti�me a �t� pendant plus de soixante ans le th��tre d’une des aventures industrielles les plus exaltantes et des plus mouvement�es du XX�me si�cle. De 1931 � 1993 en effet y a v�cu, sous des formes et des noms vari�s, Bull, � la Bull �comme disent les anciens qui vivent encore nombreux dans le quartier qui abria de longues ann�es leur carri�re professionnelle.

 L’implantation de Bull dans le vingti�me a �t� le r�sultat d’un concours de circonstances qui m�rite d’�tre cont�.

 Le nom de Bull est celui d’un jeune ing�nieur norv�gien, Fredrick Rosing Bull qui travaillait dans une soci�t� d’assurance incendie, la Storebrandt, install�e � Khristiania, appel�e aujourdh'ui Oslo.

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K.A.Knutsen

A l’�poque les traitements statistiques �taient bas�s sur la m�canographie, ensemble de machines �lectrom�caniques qui traitaient l’information m�moris�e sur des cartes perfor�es. Cette technique �tait n�e aux �tats-Unis � la fin du si�cle pr�c�dent et s’�tait particuli�rement illustr�e lors de recensement de 1890, r�alis� avec les machines d’Hermann Hollerith, dont la compagnie , CTR (Computing Tabulating Recording) s’appellera par la suite IBM.. Une autre soci�t�, la Powers Accounting Company s’�tait �galement implant�e aux �tats-Unis, mais il n’y avait aucune compagnie en Europe, ce qui fait que CTR et Powers y exer�aient un quasi monopole.
 Donc STOREBRANDT  a embauch� en 1913 Fredrick Rosing BULL qui, apr�s ses �tudes d'ing�nieur avait pass� 3 ans au comit� d'assurances de Christiania et avait fond� en 1910 un bureau de consultant technique. Ce jeune ing�nieur � l'esprit inventif, n� � Christiania le jour de No�l 1882, prend rapidement conscience de cette situation  et propose � son conseil d'administration de construire lui-m�me un �quipement (23 juin  1919). Celui-ci d�bloque 20000 couronnes et en janvier 1921 Bull lui pr�sente une machine enregistreuse trieuse additionneuse faite de ses mains.

Cet �quipement donne toute satisfaction � Storebrandt qui en fait r�aliser d’autres par le ma�tre outilleur ORMESTAD. Un article dans une revue d'assurance danoise fait conna�tre cette r�alisation qui int�resse en particulier Henrik Hartzner, chef des statistiques de  la compagnie danoise HAFNIA ; Hafnia renonce � son mat�riel Hollerith, et commande une machine � F.R.Bull qui sera livr�e en 1922. C'est son premier client qui deviendra aussi un partenaire.

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�mile  Marchand

Pressentant l'importance de ce march� F.R. Bull prot�ge ses inventions dans 15 pays et conclut en 1921 un accord financier avec la soci�t� de son camarade d'�cole Reidar Knutsen, A.S. OKA. , dont le fr�re Kurt Andr�as sera l'h�ritier spirituel et technique de F.R. Bull.  

L'article a �galement �t� lu par �mile MARCHAND, Directeur du service des statistiques  de la soci�t� RENTENANSTALT (soci�t� d'assurance sur la vie de Zurich) Celui ci viendra en octobre 1923 � Copenhague visiter l'atelier de la Hafnia et � Christiania voir F.R Bull. Il passera une importante commande fin 1924, �tant ainsi le sixi�me client de Bull. Cette soci�t� prendra par la suite le nom de Swiss life et sera toujours cliente de Bull.

 Fin 1924 F.R. Bull se sachant condamn� par un cancer demande � K.A. Knutsen d'assurer sa succession et de le remplacer � OKA . Il mourra le 7 juin 1925. KAK assure cette mission avec enthousiasme, concevant, fabriquant, r�digeant la documentation et assurant lui-m�me la mise en route des nouvelles machines. Devant le succ�s de ses mat�riels H.W. Egli propose � K.A.Knutsen  le poste d'ing�nieur en Chef � Zurich.Celui-ci sugg�re plut�t une implantation en France o� les conditions �conomiques sont beaucoup plus favorables. C'est ainsi qu'est cr�e le 9 mars 1931 une soci�t� de droit fran�ais � capitaux suisse et belges. Le capital -3600 actions de 1000 francs - est en effet r�parti entre H.W. Egli (2100 actions), Henri Vindevoghel qui apporte ATEMETA (1500 actions) et Bull A.G. (300 actions). Le si�ge social est au 92 bis avenue Gambetta, chez ATEMETA

MILLIOR2.jpg (8336 octets) Pour assurer le d�veloppement de son affaire, Reidar Knutsen cr�e avec quelques amis un consortium qui rach�te les brevets de Bull pour l'Europe et les US, OKA gardant la Scandinavie. 

Entre temps la RENTENANSTALT a re�u son mat�riel de OKA, et fort satisfait, Emile Marchand entrevoit la possibilit� d'implanter une industrie m�canographique en Suisse. Il contacte Oscar Bannwart, directeur de la soci�t� Suisse H.W. Egli, qui a construit la fameuse Millionnaire et �mile GENON, homme d'affaire belge, agent g�n�ral en Italie des machines � calculer ELLIOTT FISHER et SUNDSTRAND. Genon  dirige aussi � Turin un bureau d'organisation, la SISOC qui dispose de sp�cialistes de POWERS (entre autres GLAUZER). Il est �galement  vice-pr�sident de la soci�t� ATEIC qui repr�sente en France les m�mes machines que lui en Italie et disposera � Paris d'un atelier de r�paration, l'ATEMETA, situ� 92bis Avenue Gambetta, cr�e en 1929 � partir du petit atelier de m�canique de Lucien Henriquel.

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En octobre 1927 tout ce beau monde va faire la tourn�e Hafnia  OKA et Genon ach�te aussit�t les droits commerciaux et industriels pour l'Europe hors Scandinavie. Il revend les droits industriels � H.W.EGLI qui livre sa premi�re machine � Sandoz en 1929. Il cr�e �galement une soci�t� commerciale suisse, Bull A.G.

Devant le succ�s de ses mat�riels H.W. Egli propose � K.A.Knutsen  le poste d'ing�nieur en Chef � Zurich.Celui-ci sugg�re plut�t une implantation en France o� les conditions �conomiques sont beaucoup plus favorables.

C'est ainsi qu'est cr�e le 9 mars 1931 une soci�t� de droit fran�ais � capitaux suisse et belges. Le capital -3600 actions de 1000 francs - est en effet r�parti entre H.W. Egli (2100 actions), Henri Vindevoghel qui apporte ATEMETA (1500 actions) et Bull A.G. (300 actions). Le si�ge social est au 92 bis avenue Gambetta, chez ATEMETA. Cette soci�t� prend le nom d'Egli Bull.

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La nouvelle soci�t�, bien que peu nombreuse - 50 personnes- ne manque pas d’atouts : Elle dispose de 3 lieux de production (Paris, Oslo,Zurich) Elle a 13 clients, sa gamme est comp�titive, ses prix sont inf�rieurs � ceux du march� (� l'�poque environ 1500 �quipements en Europe, partag�s entre IBM et Samas Powers - rachet� par Remington Rand.en 1927).         Son catalogue comprend une poin�onneuse � main, une trieuse verticale, une trieuse horizontale, et une additionneuse T30 � 45 colonnes, non imprimante. Rapidement sera ajout� un dispositif d’impression original du � K.K. Knutsen qui tourne � 120 puis 150 lignes minutes et qui ne sera �gal� par la concurrence qu’en 1950. La T 30 sera class�e Monument Historique en 1998, 1er dispositif de traitement d'information admis � cette distinction.

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Mais elle manque de capitaux pour financer son expansion et surtout son  installation ne pouvait laisser indiff�rents les deux soci�t�s am�ricaines qui tenaient le march� : D�s avril Mr RAND �tablit des contacts avec H.W. EGLI, et en juillet de hauts dirigeants de Remington Rand  visitent l'atelier de l' avenue Gambetta .Fin novembre ils font � H.W. Egli une proposition de prise de participation dans  H.W. Egli Bull. Ils reprennent le bateau pour les USA afin de faire avaliser leur proposition par leur conseil d’administration.Dans le m�me temps, deux fran�ais, polytechniciens tous deux, Georges Vieillard et Elie Doury, s’�taient montr�s tr�s soucieux de cr�er en France une industrie de machines � cartes perfor�es. Georges Bolle, �galement polytechnicien, chef de la comptabilit� du PLM et pionnier de la m�canographie dans les chemins de fer, et ayant le m�me souci les met en contact avec Emile Genon . D�s juillet 1931 ils font tous trois le projet d’un � syndicat des utilisants �.

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�lie Doury

Georges Vieillard

 Apprenant la proposition des am�ricains, ils les prirent de vitesse durant la travers�e de retour de ceux-ci. Le 3 d�cembre, Georges Vieillard propose par t�l�phone � .H.W. EGLI de leur racheter la moiti� de leurs parts dans H.W.EGLI BULL et leur promet pour le soir m�me 50000 francs d’acompte.   A 9 heures, il est chez le notaire, � 11 heures le � syndicat des utilisants � et cr�� et tient � 11H30 sa premi�re assembl�e g�n�rale, et les 50000 francs  sont envoy�s. Le 11 d�cembre, Remington Rand c�ble son accord. Il est trop tard.

La nouvelle compagnie est bien re�ue par le march� et va cro�tre rapidement.On peut en juger par l’�volution des effectifs :

1931 50 1937 256
1932 129 1938 278
1933 154 1939 248
1934 168 1952 2200
1935 149 1964 15600
1936 213

Le chiffre d’affaire et les livraisons augmentent  dans les m�mes proportions. Au 1er octobre 1934, 66 tabulatrices et 48 trieuses ont �t� livr�es, dont 22 et 15 depuis le d�but 1934

  A quoi cette croissance est elle due ?

. A l’attente du march�, rassur� de voir un fournisseur local. 

 A une gamme de produits m�canographiques compl�te et de qualit�, dont les performances sont souvent sup�rieures � celle du march�. Le meilleur exemple est le fameux dispositif d’impression AN7 de Knutsen. Cette gamme  de produits sera enrichie en 1953 par le calculateur Gamma 3 qui sera la concr�tisation du virage de Bull � l’�lectronique et qui aura un grand succ�s (1200 exemplaires vendus,c'est-�-dire beaucoup plus que le 650 qu’IBM sortira en h�te pour le contrer). Le gamma 3 sera �quip� 3 ans plus tard d’un tambour comprenant programme et donn�es, faisant ainsi du Gamma ET le premier ordinateur de Bull.

 A des prix  tr�s comp�titifs.

 

Calliejn.jpg (9237 octets) Enfin � un excellent service apr�s vente anim� d’un esprit de service remarquable, souvent oppos� par les clients � � l’arrogance�   d’IBM.

 Il n’en reste pas moins qu’elle aura du mal � financer son expansion, et devra recourir � plusieurs augmentations de capital qui augmenteront progressivement la part des capitaux fran�ais. La premi�re en avril 1932 o� la part pr�pond�rante est celle du syndicat des utilisants voit appara�tre  la famille Callies qui aura un r�le d�terminant dans l’histoire de Bull. Le premier repr�sentant sera Jacques, envoy� par les papeteries Aussedat qui fourniront les cartes et les papiers et dont Bull sera un d�bouch� important. Premier patron charismatique de Bull il conduira son d�veloppement et sa croissance avec son Directeur g�n�ral Georges Vieillard. Il mourra malheureusement le 6 novembre 1948, � 53 ans. Son jeune fr�re Joseph lui succ�de.

                                   Jacques et Joseph Callies

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A l’issue de cette augmentation les capitaux fran�ais repr�sentent 35% du capital. Une nouvelle augmentation porte � 75% la part fran�aise et am�ne la compagnie � prendre le 31 mars 1933  le nom de :

 

 � Compagnie des machines Bull �

.

Entre la cr�ation et fin 1939 le capital passe de 3600 actions de 1000 francs � 100000 de 250 francs (il y a eu 2 r�ductions de capital, ramenant la valeur nominale � 500 puis 250 francs).                                         

  Il est bien �vident que cette expansion n�cessitera des locaux suppl�mentaires qui se trouveront d’une part dans une extension sur le site lui-m�me et dans ses environs imm�diats et d’autre part dans d’autres locaux de la r�gion parisienne ou de province. Parlons donc un peu de l’implantation dans le XX�me.

En mai 1939 le bail des locaux du 92 bis est renouvel� pour 9 ans et est assorti d’une promesse de vente pour un certain nombre de terrains alentour. En 1940, un �tage est ajout� sur une partie de l’usine et la d�cision est prise d’acheter les locaux. En 1943 sont achet�s des locaux en face, un terrain au 157 (590 m2 pour 472000 francs), et au 159 un terrain de 1000 m2 avec un pavillon � usage de bureaux et des ateliers. Dans ces locaux du cot� gauche de l’avenue se trouveront en particulier la cantine et des locaux de maintenance. La maintenance aura aussi des locaux rue Henri Poincar�. Tous ces locaux de la � rive gauche �seront abandonn�s lord de l’extension des locaux en face. En 1944, sont achet�s un terrain et diverses constructions aux 25 et 27 rue du Surmelin, pay�s par une rente viag�re � la propri�taire, madame Munie. En 1959 de nouveaux b�timents sont acquis rue Haxo (6000m2) et rue Ernest Lef�vre (12000m2) 

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A la suite de ces extensions Bull couvre une grande partie  du quadrilat�re form� par l’avenue Gambetta et les rues Ernest Lef�vre, du Surmelin et du Groupe Manouchian et forme un labyrinthe d’escaliers, de couloirs, d’ateliers, de bureaux construits sans plan d’ensemble au fur et � mesure des besoins, qu’une exp�rience de plusieurs ann�es �tait parfois insuffisante � ma�triser. Cette impression est bien r�sum�e dans le r�cit que fait un de nos anciens de son premier contact avec Bull, dans un essai autobiographique paru il y a quelques ann�es :� Ils s’engag�rent dans un premier couloir qui d�bouchait sur une cour int�rieure au milieu de laquelle se trouvait un b�timent tout � fait inattendu dans cet environnement; il s’agissait d’une petite maison que Jacques entendit plus tard d�signer comme “le pavillon Louis XIII”, sans qu’il s�t jamais la raison de cette appellation. Apr�s avoir emprunt� plusieurs autres couloirs et tourn� tant�t � droite, tant�t � gauche, ils d�bouch�rent soudain dans un grand hall recouvert d’une verri�re : ils �taient dans l’usine et Jacques �tait �merveill� � la vue des nombreuses machines, tours, fraiseuses, d�colleteuses et autres dont, jusqu’ici, il ignorait m�me l’existence. Ils travers�rent ce hall de part en part, poursuivis par cette odeur de br�l� si particuli�re, qu’exhale le m�tal travaill� par des machines� outils. Ils ressortirent de ce hall par une petite porte, juste assez large pour le passage d’un homme et l�, Jacques se cr�t arriv� dans les coursives d’un bateau. Un �troit escalier m�tallique s’�levait devant eux, dans lequel son guide s’engagea. Parvenus en haut, apr�s avoir franchi une nouvelle porte �troite, ils se trouv�rent dans un couloir, bord� sur l’un de ses c�t�s par une cloison dont la partie haute situ�e � environ un m�tre du sol �tait constitu�e de vitrages plus ou moins d�polis. Derri�re ce vitrage, des cloisons perpendiculaires au couloir d�coupaient l’espace en une s�rie de petits bureaux. � Planr2.jpg (21454 octets)
QUARGAMD.jpg (27607 octets) Gamb49.JPG (12874 octets) Gambetta.jpg (15130 octets)

Le quartier � la fin des ann�e 1950

Travaux en 1949

On a vu que Bull avait aussi acquis des b�timents  de l’autre cot� de l’avenue o� fut install�e entre antres la cantine. �coutons � nouveau notre m�morialiste :

  � Lorsqu’arriva midi, Jacques qui se dirigeait alors vers la cantine avec deux coll�gues, souriait int�rieurement. Il songeait � la fine plaisanterie faite par l’un d’eux pour conclure le cours: maintenant, lan�ons le cycle d’alimentation. La cantine �tait situ�e de l’autre c�t� de l’avenue Gambetta, abrit�e sous un grand hall qui avait d� auparavant �tre un b�timent d’usine. Il s’agissait de la cantine du personnel non cadre, car les cadres disposaient d’une cantine r�serv�e � leur propre usage. La cantine �tait occup�e en majorit� par les ouvriers de l’usine, et les employ�s, qui �taient minoritaires se regroupaient autour de quelques tables, toujours les m�mes.

Les tables �taient immenses, toutes en longueur, permettant d’accueillir chacune sur des bancs  en bois une bonne  vingtaine de personnes. Bien qu’il e�t pass� auparavant sept ann�es en internat,  Jacques se sentit toujours mal � l’aise en p�n�trant dans cette cantine. La premi�re raison en �tait que chacun devait apporter son couvert complet, assiette, verre, couteau et fourchette, et d�poser le tout dans une case, apr�s avoir fait sa propre vaisselle dans une salle contigu� o� se trouvaient d’immenses �viers collectifs. Il se trouve que les stagiaires techniques �taient habill�s de mani�re identique � celle de leurs a�n�s qui op�raient chez les clients, car l’usage le voulait ainsi.

Jacques se trouvait donc, pour la premi�re fois de sa vie d’ailleurs, habill� en “tenue de ville”, avec veste et cravate. Il faut reconna�tre que ce n’�tait pas la tenue id�ale pour faire la vaisselle dans un environnement o� les risques d’�tre �clabouss� par les voisins �taient consid�rables. L’autre raison provenait du fait que les ouvriers de l’usine ne changeaient pas de v�tement pour aller � la cantine, probablement parce qu’ils n’en avaient pas le temps. En cons�quence, ils s’installaient � table avec des bleus de travail parfois macul�s de taches de graisse ou de poussi�res m�talliques. Jacques rejoignait le plus souvent l’une des tables d’employ�s, mais parfois, soit qu’il n’y ait plus de place disponible � ces tables, soit parce que, par une sorte d’id�alisme, il ne voulait pas snober les tables d’ouvriers, il s’asseyait � l’une de leur tables. Bien qu’il y re�ut toujours un accueil chaleureux, probablement gr�ce � son jeune �ge, il �tait, pour la raison que l’on vient d’�voquer, mal � l’aise pendant tout le repas. �

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L'entr�e principale

L'avenue Gambetta en 1985

L'int�rieur

Rue Haxo

Juste avant les d�cisions de s’installer � Angers et � Belfort, Bull compte environ 8000 personnes dont 5250 � Paris, le reste tant r�parti entre St Ouen, Amsterdam, Lyon, St Quentin, Vend�me, Mouy, Les Andelys, sans compter bien s�r les locaux commerciaux en province et � l’�tranger.

 Sur ces 5250 personnes install�es � Paris, la tr�s grande majorit� bien sur travaille dans le 20�me, le quadrilat�re cit� pr�c�demment s’�tant agrandi par une implantation rue Haxo, tout pr�s de la place St Fargeau. Bull avait �galement un  �tablissement important install�  au d�but des ann�es 60, rue d’Avron o� fut regroup�e la direction commerciale France (environ 1000 personnes). Il y eut aussi des locaux Villa des Pyr�n�es, au bas de la rue du m�me nom.  

Qualifi� par le maire de l’�poque de � plus beau fleuron du 20�me  �, Bull est �videmment de loin le plus gros employeur de l’arrondissement.

 On imagine l’animation et l’apport �conomique d’une telle situation. Pour ne citer que quelques caf�s, �voquons ceux de l’avenue Gambetta, fr�quent�s par les commerciaux et les personnels de maintenance, le Moderne, l’Avenir, noms pr�destin�s pour une industrie de pointe, le Petit D�me et le St Fargeau. .N’oublions pas le Glou glou, de la rue du Surmelin, fief des d�veloppeurs Une autre caract�ristique de Bull est sa politique sociale qu’on peut qualifier en m�me temps de paternaliste et d’avanc�e. Par une politique de formation compl�te et efficace, Bull a �t� un ascenseur social pour des g�n�rations de travailleurs qui ont fait leur carri�re chez Bull o� � l’ext�rieur. Les anciens apprentis Bull en parlent encore avec �motion. De nombreuses activit�s culturelles et sportives �taient propos�es � l’ensemble du personnel . Le pr�sident Joseph Callies participait r�guli�rement au tournoi annuel de tennis. Il arriva souvent en finale, mais ne la gagna pas toujours.

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 De nombreux autres s’initi�rent � la musique o� profit�rent de la tr�s riche biblioth�que mis � la disposition du personnel.  

La famille Callies, traditionaliste, catholique, rigoureuse, totalement honn�te, avait une tr�s haute id�e de son r�le social, qu’elle mettait en œuvre avec les moyens n�cessaires.  N’oublions pas que 3 fr�res et sœur Callies  (sur 9) avaient �pous� des Michelin.

 Je cite � nouveau Philippe Hurtaut qui reprend un texte du Courier Bull de 1948 qui d�peint � merveille cet �tat d’esprit : " Cette conception moderne des Services Sociaux est donc bien �loign�e du paternalisme patronal aujourd’hui refus� par la classe ouvri�re, de l’acte philanthropique ou charitable, auquel l’ouvrier  ne pardonne pas d’�tre arbitraire et unilat�ral, et que Proudhon a si durement stigmatis� dans son Id�e G�n�rale de la R�volution". 

Et puis plus loin:“Les dispositifs l�gislatifs �tant forc�ment rigides  un objet essentiel des Services Sociaux de l’Entreprise est de pallier ce qui manque � la r�glementation officielle.”

 Et encore : “Ainsi se r�sume le r�le du patron social et de son �tat-major: "�ducation sociale, soutien moral, appui financier. La condition du succ�s du fonctionnement des Services Sociaux est de cr�er un climat moral favorable au d�veloppement du bonheur.”

Et pour terminer: “�tre social, c’est savoir cr�er une atmosph�re de confiance, de compr�hension, de sympathie, qui fait na�tre l’esprit d’�quipe, assure la collaboration de tous, et fait travailler avec entrain � l’œuvre”

Les p�rip�ties de Bull.

Nous entrons dans une p�riode de turbulences qui ne va pratiquement pas cesser et conduira � l'abandon par Bull de ses implantations dans le XX�me.

 A la fin des ann�es 50 Bull se porte bien, sa croissance est forte, mais il faut la financer et la concurrence est rude, surtout depuis que l’�lectronique est entr�e dans la danse. C’est alors que, sous l’impulsion de ses ing�nieurs et de ses grands clients, Bull lance l’ambitieux projet du Gamma 60, ordinateur g�ant pour l’�poque. La conception en est totalement originale, elle met en œuvre des concepts qui inspireront les architectes pendant de longues ann�es et utilise pour sa r�alisation toutes les technologies alors �mergentes, entre autres les transistors, les tores, les bandes magn�tiques). De plus son encombrement physique est impressionnant et demande des installations annexes (Installation �lectrique, climatisation) fort co�teuses.

 L’in�vitable se produit, co�ts - de d�veloppement et de production - et d�lais sont enfonc�s ; il faut terminer la mise au point chez les clients, et son d�veloppement a mobilis� toutes les ressources de Bull au d�triment de machines plus modestes qui auraient mieux correspondu aux besoins du march�, comme la 1401 qu’IBM sortit � cette �poque.   

 Sans entrer dans des d�tails d�j� fort connus rappelons que Bull conna�t une grave crise financi�re que l’attitude  des pouvoirs publics, appel�s � la rescousse et le r�le des grands groupes industriels (CGE et CSF) n’aideront pas � r�soudre.

Finalement GE prend le contr�le dans de mauvaises conditions, ce qui am�ne une grande effervescence chez Bull :

Manifestations dans l’avenue Gambetta, assembl�e g�n�rale houleuse, et de graves cons�quences telles que les premiers licenciements, l’abandon de produits Bull (40, 140), des d�parts massifs, en particulier vers la CII.

Notons cependant � cette occasion le r�le formateur de Bull qui a irrigu� toute l’informatique fran�aise.

 Bull se reconstruit avec , mais une concurrence st�rile s’�tablit avec la CII.

  Les deux compagnies fusionnent en 1975 apr�s l’�chec d’UNIDATA . Cette fusion est la cause d’une fuite vers l’ouest qui annonce le d�clin progressif des implantations de l’est parisien.La nationalisation marque le d�but d’un d�placement du centre de gravit� vers l’ouest : Le si�ge est transf�r� avenue  Malakoff, le commercial s’installe dans une majestueuse et co�teuse tour � la D�fense ; l’absorption de SEMS, et de  TRANSAC confirment ce mouvement.  

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Travaux en 1988

Le rectorat de Paris

Revenons en � l’�volution des locaux et de leur occupation. On assiste donc � un transfert progressif vers l’ouest  o� l’on dispose de locaux vastes et plus modernes. Les locaux de Gambetta vieillissent et sont de plus en plus inadapt�s aux d�veloppements techniques modernes.

 En 1987 il est d�cid� que les locaux qui comprennent encore 2000 personnes seront modernis�s  et adapt�s � des d�veloppements logiciels. L’ensemble est vendu aux AGF qui r�habilitent l’ensemble du site. Seule la partie du 94 Avenue Gambetta, enti�rement reconstruite sera lou�e � Bull qui y implantera ses �quipes de d�veloppement logiciel ( 650 personnes). Les b�timents sont ultramodernes, totalement s�curis�s, disposent de groupes leur permettant de fonctionner compl�tement en cas de coupure de courant, disposent de nombreux terminaux permettant de travailler en direct avec les USA etc…

Malheureusement les affaires sont difficiles, le taux de croissance diminue, la concurrence est de plus en plus dure et les constructeurs traditionnels souffrent. Il faut faire des �conomies. Malakoff est ferm�, la fi�re tour Bull de la d�fense �galement. Les locaux pr�caires mais �conomiques de Louveciennes sont remplis et l’in�vitable se produit, la d�cision de fermer Gambetta est prise fin 1993. Malgr� un baroud d’honneur des syndicats elle sera mise � ex�cution en 1994. Le rectorat de l’acad�mie de Paris s’installe avenue Gambetta, Avron est ferm� � a la m�me �poque. Bull n’est plus dans le vingti�me arrondissement de Paris

�pilogue

L’aventure de Bull avenue Gambetta est termin�e depuis plus de  10 ans. Bull privatis�e en 1997 et dans lequel l’Etat n’a plus aujourd’hui  aucune part dans le capital a travers� de tr�s grosses difficult�s mais repart du bon pied, sur des bases il est vrai plus modestes. La vente r�cente d’un super calculateur au CEA t�moigne de son renouveau.

  Il n’en reste pas moins que le 20 �me arrondissement de Paris a �t� le berceau d’une des plus �tonnantes aventures industrielles du 20 �me si�cle en France, berceau aussi de toute l’informatique fran�aise car plus ou moins directement tous les informaticiens fran�ais sont concern�s par Bull. C’est l� qu’ont �t� con�us de prestigieux mat�riels dont   l’un, la tabulatrice T 30, a �t� d�clar� monument historique en 1998, distinction unique pour ce genre de mat�riel.

C’est  l� qu’a �t� con�u et r�alis� le mythique Gamma 60, dont l’aventure est d�crite par Jos� Bourboulon dans un ouvrage � para�tre fin 2005, chez Hermes science publishing.

C’est l�  qu’est n�e en 1974 la ligne GCOS 7, une ligne de produits qui, fait unique dans l’industrie informatique, est encore vivante aujourd’hui, plus de 30 ans apr�s, gr�ce � l’audace de sa conception, et qui vient d’entrer dans le patrimoine national : quelques �l�ments significatifs de sa technologie ont �t� remis solennellement par Michel Guillemet, directeur des �tudes de Bull � Daniel Thoulouze, directeur du mus�e des Arts et M�tiers.

La F�d�ration des Equipes  Bull, qui s'est donn� pour mission de conserver et de mettre en valeur le patrimoine culturel de Bull, a pour projet de mat�rialiser, avec le concours des organismes concern�s, le souvenir de l'odyss�e de Bull avenue Gambetta par une plaque comm�morative appos�e au seuil de son berceau.

C'est bien le moins que l'on puisse faire.

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