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Carnet de guerre de Roger MARCOUIRE

Soldat, sous-officier puis officier aux 72e, 176e et 175e r�giments d�infanterie.

1916 � 1919 : France � Gr�ce � Serbie - Albanie � Roumanie - Russie

 

Mise � jour : f�vrier 2021

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MARCOUIRE Roger est n� en ao�t 1896 � Vincennes. � ses 20 ans, �tudiant en m�decine, il est incorpor� le 1e septembre 1916 au 33e r�giment d�infanterie de Bellac (85) au sein duquel il fait sa formation. Il part aux arm�es en avril 1917 et int�gre le 72e RI en juillet 1917�et la suite vous le d�couvrirez en lisant ses �crits.

J�ai ajout� du texte en bleu pour la compr�hension de certains termes et pour aller � plus loin ï¿½ dans l�analyse du r�cit.

 

Merci � Dominique pour le carnet de son grand-p�re.

Merci � Isabelle, Martine, Marl�ne, Bernard pour la retranscription du carnet.

Merci aussi � Philippe pour la relecture et corrections d�erreurs diverses.

 

 

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1916

1e septembre

Incorporation : 1er septembre 1916. 33e d�infanterie � Bellac. Ville triste sans amusements.

Existence assez monotone.

15, 16 et 18 septembre

Petite f�te donn�e par le 33e.

Je m�exerce au talent d�acteur. Je fais le r�le d�huissier Dans � un client s�rieux ï¿½. Beaucoup de promesses, Entre autres, une permission de 48h que je n�ai pas eue. Je me suis bien amus� dans ces trois � repr�sentations ï¿½.

Artistes d�occasion, nous avons fait quelques gaffes. Beaucoup de mal pour reprendre le cours de la pi�ce.

15 octobre.

Voyage � Limoges.

Limoges est une ville charmante, mais malheureusement je laisse mes finances � Bellac. Tr�s ennuyeux d��tre sans le sous dans une grande ville ou pendant ces quelques jours j�aurais pu me distraire.

Je loge dans un ancien couvent de b�n�dictins tr�s peu confortable, mais combien de surprises amusantes. Il n�y a pas assez de couvertures. Ce sont de v�ritables ruses de peaux rouges pour trouver de quoi se couvrir. Beaucoup d�h�tes tr�s d�sagr�ables dans les paillasses.

Bref au bout du troisi�me jour je suis tr�s content de retourner � Bellac, le dimanche pass� dans ces conditions, � Limoges, ne me plaisant pas du tout. Quant � l�examen, il s�est assez bien pass�.

L�Angleterre est un peu vague mais enfin !�

28 octobre

Permission agricole de 15 jours.

Je passe 4 jours � Paris et 10 jours � Sergines (*). Je reprends un peu le m�tier de cultivateur. Je revois C.E.

Je joue un peu au billard, ma permission ne se passe pas mal.

Paris est tr�s anim�, l�on s�aper�oit peu de la guerre. Beaucoup de jolies femmes, de soldats et� de civils, avides de plaisir. Les grands boulevards tout noirs de monde. Les cin�mas les th��tres sont pleins.

Je trouve Bellac bien triste en rentrant. Je suis le peloton des E. C. (**)

 

La No�l est assez morne. Petite soir�e avec mes camarades.

 

(*) : Sergines est une commune de l�Yonne, travers� par l�Yonne

(**) : �l�ves-caporaux. Il a donc suivi le stage pour �tre caporal. Il y sera que le 2 juin 1918�

1917

Le 1er janvier

Permission de 48h.

Je passe deux jours � Paris. On s�aper�oit tr�s peu de la guerre dans cette ville.

Le 22 janvier

Je quitte les E. C. avec la mention � apte � faire un chef de section ï¿½ (*).

Dirig� sur le centre des mitrailleurs de la Courtine dans la Creuse.

Voyage tr�s jolie. Passe la nuit � Ussel.

Je fais connaissance d�une demoiselle Andr�e. Jeune fille assez gentille.

Le pays est tr�s froid. 50 cm de neige. La nourriture est d�abord tr�s bonne puis petit � petit devient mauvaise. Les journ�es du 20, 21 et 22 sont tr�s froides. 25� au dessous de z�ro. Il fait un froid terrible. Le pain est gel�. Il faut une hache pour le couper. (**) 

J�ai une grippe infectieuse, avec une fi�vre assez forte. Je me trouve mal � l�exercice et je suis conduit � l�infirmerie o� je reste trois jours.

Je fais un deuxi�me stage comme armurier.

 

(*) : Un chef de section a le grade de sergent.

(**) : L�hiver 1917 fut un des hivers les plus froid du 20e si�cle. La Seine � Paris �tait gel�e pendant 15 jours emp�chant le ravitaillement. Des temp�ratures entre � 15 et � 20 ont perdur�es pendant pr�s de 3 semaines � Paris.

Le 23 f�vrier

Je pars en permission de 4 jours � Paris. La ville n�a pas chang� comme aspect, mais les conditions de

vie ne sont plus les m�mes. Les parisiens commencent � s�apercevoir de la guerre. Il n�y a presque plus de charbon. Le pain est rassi. Les p�tisseries sont ferm�es le mardi et mercredi. Les th��tres et cin�mas sont ferm�s 4 fois par semaine.

 

Deuxi�me stage.

Tr�s heureux. J�ai un bon camarade professeur de math�matiques avec qui je repasse mes connaissances g�n�rales. Il fait beaucoup moins froid. De bonnes promenades dans les bois environnants.

Je quitte la Courtine avec la mention � tr�s apte ï¿½. Tr�s content.

Je retourne � Cognac avec tous les � vieux ï¿½ du 33.

 

Le voyage est tr�s long, 3 jours et deux nuits. Je couche � Angoul�me et Limoges. Je visite les ruines de l�abbaye, le ch�teau de Montaigut.

Bref je suis abruti en arrivant. Mais il parait que je n�ai pas assez pris le train. J�arrive � 7h, � 7h et demi on me signe une permission de d�tente et je pars le soir pour Paris.

Quelle bonne permission ! Comme c�est bonde se retrouver pour 10 jours chez soi. Le lit semble bon et doux.

La vie � Paris est toujours la m�me. Un peu plus de restrictions. Mais les parisiens s�en fichent. Les diners, Deux plats. Ils sont un peu plus gros !

 

Je suis tr�s content de revoir L�on. Il a chang� et bien maigri. Le dimanche petite promenade au jardin des plantes. �a aussi n�a gu�re chang�.

On dresse de jeunes fox-terriers � chasser des rats, pour les tranch�es. Les petits ne sont pas bien braves.

Un peu de musique me fait plaisir. J�ach�te des chansons, souvenirs de La Courtine, et je les apprends. Elles font surtout le plaisir de Titine. Il est dommage que je ne puisse rester jusqu�� P�ques.

Paul, Gaston et le petit Samson seront l�. Je rate de bonnes parties.

Papa trouve que j�aurais du demander ma permission un peu plus tard. Il croit que �a se fait comme �a, au r�giment. Il n�a pas bien l�air de se douter de la fa�on dont le r�giment est organis� actuellement.

C�est malheureusement une s�rie d�ennuis et de tracasseries pour le soldat. Ah ! C�est tr�s chic de d�fendre servir son pays ; mais pas vu sous ce jour-l�.

Nos charmantes parisiennes qui envient le sort de nos poilus, en auraient vite assez si elles � go�taient ï¿½ un peu. Enfin ma permission se termine.

Avril 1917

Je prends le train le 3 au soir et j�arrive dans de bonnes conditions � Cognac. J�y reste 10 jours. Jours heureux et paisibles ! Je travaille au bureau, puis on me bombarde garde-magasin. C�est vraiment ma cr�ation !

Il est dommage que je n�y sois pas rest� toute la guerre, je me serais fait du lard. Il y a beaucoup de femmes au magasin du corps, et la vie est gaie.

Malheureusement je suis arrach� de ce lieu de d�lices pour �tre exp�di� dans la zone des arm�es. Habill� de neuf. Tout me va, par hasard tr�s bien.

 

Je voyage en train sp�cial, et pas mal ma foi. Mais quel d�tour ! De Cognac : Limoges, Orl�ans, Juvisy, Noisy, Gretz et la Fert�-Gaucher.

Je n�ai malheureusement pu aller chez moi � Noisy. C�est rageant passer si pr�s et �tre clou� l�. J�arrive � la Fert�-Gaucher.

Ville assez gaie. Beaucoup de civils. Je loge dans un grenier. Exercice d�abord assez dur.

Je commence un stage de signaleur. C�est un deuxi�me filon ! Je vais � l�exercice sans sac. J�apprends le � morse au son ï¿½.

Le 29 mai

Je pars en permission.

Permission toujours tr�s bonne, mais la vie � Paris a bien chang�. Impossible de trouver quoi que ce soit. Sucre, lait, beurre charbon. Rien. Le pain commence � �tre bien gris.

Je passe quelques bonnes soir�es � Paris. Quelques jours pass�s avec Gaston et le cousin Michel passent tr�s vite.

 

Je rejoins HABIDUSSE avec qui je fais une petite bombe. �a change ! (*)

Bref je prends mes pr�cautions pour me retrouver avec Gaston, Georgette, Melles BEAU et FRAN�� Sergines et � Paris � ma prochaine permission. Je songe d�j� la suivante ! En rentrant je continue mon stage. Toujours tranquille.

Je pars � Jouy-sur-Morin. Je suis v�ritablement bien dans cette ville. La nourriture est excellente. Pas grand-chose � faire. J�apprends la TSF. Tr�s int�ressant�

Encore bien plus int�ressant. Il y a de gentilles ouvri�res qui travaillent � une usine toute proche. Je fais la connaissance d�une charmante blonde, B.M. que je vois bient�t midi et soir.

Avec quel regret je quitte Jouy. Je me promets de venir retrouver ma petite B. souvent.

 

A la Fert�, je suis signaleur permanent et suis propos� pour la T.S.F. au 8�me g�nie. Je prends les messages de la tour. Je suis instructeur pendant quelques temps.

Bref c�est l�embusquage complet, quand le 7 juillet je pars en renfort au 72e d�infanterie.

Je � l�ai mauvaise ï¿½. Partir dans les tranch�es ne me souris pas du tout. Enfin je pars pour destination inconnue. Bon dieu, que le sac est lourd.

 

(*) : Faire une bombe = Faire la f�te.

Juillet 1917

7 juillet

Le 7 � midi j�arrive � Noisy. Ma foi c�est plus fort que moi !!

On m�annonce que le renfort va rester tout le tant�t � Noisy. Je fais 1 km � pieds sur les voies. Je passe sous des wagons, je monte dans une locomotive qui fait la man�uvre et apr�s avoir saut� une barri�re, je tombe sur le tram � Raincy � Paris � qui passe. Je saute dedans et���j�arrive chez moi en trombe o� je reste 2 heures.

Surprise, exclamations. Je garde le bouc � la suite d�un pari. Il para�t que �a me va mal. Je m�en doute !

 

Apr�s 2 heures, je reprends le chemin de Noisy. J�arrive sans encombre � 8 heures. J�embarque pour destination toujours inconnue. Voyage de nuit. Je m�installe avec 4 camarades dans un wagon de 1�re classe.

 

Arriv�e au front avec le 72.

Le sergent nous cherche et se demande o� nous sommes pass�s. Il nous retrouvera une fois arriv�s au bout du voyage ! A 6 heures du matin, arriv� dans un pays nomm� Bazoches. (*)

Le canon commence � se faire entendre. Nous partons � pieds, c�est �reintant, j�en ai plein le dos�.c�est le cas de le dire. Apr�s 3 h de marche, arriv� � Fismes au D.D. (**)

Diable, le canon tape dur !

Nous restons sous un hangar toute la journ�e. Nous bouffons avec nos vivres de r�serve.

 

Le lendemain, toujours au D.D.

Visite � un ch�teau qui est compl�tement d�moli. Nous montons dans une tour � moiti� d�molie. De l�, le front s�aper�oit distinctement. Qu�est- ce qu�il y a comme avions. Le canon est calme actuellement.

 

(*) : Bazoches-sur-Vesle (02) qui poss�de une gare.

(**) : D�p�t divisionnaire.

8 juillet

Je quitte le D.D. Je n�y suis pas rest� longtemps.

Une journ�e de marche. Je vois du pays. Arriv�e � Braine. Il n�y a presque plus de maisons debout.

Nous sommes log�s dans une cave � vin. Il y a d�immenses cuves. Je suis log� dans une. Vers� � la 3�me compagnie.

Nuit calme. Toujours couch� sur la paille.

 

Le 72e r�giment d�infanterie a �t� retir� du front le 2 juillet. � la date du 8 juillet, il est cantonn� � Braisne (pour le 1e bataillon) et � Chassemy (pour le reste du r�giment).

9 juillet

Je suis vers� � la 1�re compagnie.

Je couche cette fois dans un grenier, assez mal install�. Le village est tr�s mouvement�. Il passe continuellement des troupes. Camions, autos et avions.

 

A 10h, premi�re �motion, les boches bombardent. Le rapport est interrompu, puis est repris quelque temps apr�s.

Le 72 a �t� l�g�rement � amoch� � au chemin des Dames. La premi�re compagnie est redescendue avec un effectif de 8 hommes !

A part �a, nous n�avons pas eu de pertes.

10 juillet

C�est d�go�tant. Impossible de dormir !

Les Allemands bombardent continuellement. Une premi�re fois � 1h du matin et ensuite � 3h. Brrr ! Quelle sale impression. Toute la maison tremble. On s�attend toujours � recevoir une bombe ou un obus sur la t�te.

La journ�e est calme. Bombardement intermittent.

Je suis mis dans les F.M. (*) comme c�est ma partie. Je n�y connais rien du tout, mais �a ne fait rien. J�apprendrai.

C�est bien de l�administration fran�aise. Il fallait un infirmier, un ajusteur m�canicien a �t� nomm�. C�est toujours la m�me histoire. (**)

Nourriture bonne.

 

(*) : Fusils mitrailleurs.

(**) : On rappelle ici que Roger MACOUIRE est �tudiant en m�decine.

11 juillet

La nuit toujours mouvement�e.

Dans la journ�e, rien � faire. Le r�giment qui revient d�Alg�rie (*) va peut-�tre partir � Salonique. En attendant, il faut aller se reformer au grand repos.

 

(*) : En effet, le 72e RI est parti en urgence en Alg�rie en d�cembre 1916 pour y effectuer une action de police contre des soul�vements � indig�nes ï¿½. Il rentre en France en mars 1917.

12 juillet

Toujours bombardement. J�en ai plein le dos.

13 juillet

D�cid�ment, je n�ai pas �t� tranquille cette nuit. Une escadrille d�avions et les canons lourds boches nous ont tap�s dessus. Quel vacarme. L�artillerie fran�aise r�pondait. Les mitrailleuses tiraient sur les avions, puis par-dessus tout, le bruit formidable des bombes. Tout le monde est debout. Quelques-uns ont eu r�ellement peur para�t-il. Je suis bien content de quitter Braine.

Voyage toujours � pieds. Arriv�e � midi � Acy.

L�, nous sommes tranquilles.

14 juillet

Nous sommes log�s chez l�habitant.

Oh ! Il n�en reste pas beaucoup, mais c�est plus retir� et ils sont revenus. Nous touchons une bouteille de champagne pour 4. Nourriture excellente ce jour-l�.

La musique joue quelques morceaux. C�est tout comme distraction.

15 et 16 juillet

D�part de permissionnaires.

La nourriture est moins bonne, mais nous sommes tranquilles. Repos toute la journ�e.

La nuit, il pleut bien un peu sur la t�te. Mais il ne faut pas �tre trop difficile. Une escadrille d�avions a bombard� les environs mais ne nous a laiss� aucun � souvenir �. Toujours beaucoup d�avions fran�ais. Bombardement assez fort dans les lignes. Beaucoup de fus�es et de saucisses. Mais ici, nous sommes assez loin.

Je fais connaissance d�un camarade avec qui je m�entends bien. Nous allons faire des promenades dans les bois et nous nous enfilons des cerises et des fraises � en avoir une indigestion.

17 juillet

J�ai �t� visiter une escadrille qui se trouve tout pr�s d�Acy. C�est une escadrille de rep�rages. J�assiste � la premi�re ascension d�un � sidi �. Le pauvre diable a bien peur.

18 juillet

Les hangars des avions sont bombard�s par les canons ennemis. Des 210 qui font pas mal de bruit. Heu ! Il en est tomb� un tout pr�s. �a fait un trou �norme. On peut facilement y mettre un cheval.

Visite d�avions allemands.

19 juillet

D�part brusque. �a doit mal aller par l�. Le canon tape dur.

Bonne �tape 20 km. Nous nous arr�tons � Villers-H�lon. Nous sommes log�s dans une grande ferme. Il n�y a que des grandes fermes dans cette contr�e. Ce sont des champs � perte de vue.

Pour la premi�re fois, je vois man�uvrer des charrues automobiles. Nous sommes tr�s � l��troit dans le grenier de la ferme. Je prends tout mon � barda � et je vais coucher sur un tas de paille que j�avais rep�r� sous un hangar. Je me fais un trou dans la paille et je passe une bonne nuit.

20 juillet

Nous repartons.

Nouvelle �tape de 20 km. Je commence � sentir des picotements dans les pieds. Diable, l��quipement commence � peser apr�s 3 h de marche. Nous arrivons � Passy-en-Valois. Hameau situ� � 6 km de la Fert�-Milon.

La 1�re compagnie seule est cantonn�e ici. Nous sommes log�s dans une ancienne��porcherie. Mais il ne faut pas se plaindre. C�est tout neuf et tr�s propre. Notre cantonnement se compose d�une grande cour rectangulaire sur laquelle donne une cinquantaine de petites portes qui donnent acc�s � autant de petites cabines pouvant contenir cinq � six hommes. Comme couchage, de la paille.

Vivement les permes pour coucher dans un lit. Nourriture d�testable.

21 juillet

Me voici install�.

Nous sommes 6 bons camarades qui s�entendons tr�s bien dans une � chambre �.

22 juillet

De mieux en mieux. Nous avons pu avoir des poires pour dessert et une brave femme nous vend de la salade.

Cela semble bon. Repos.

23 juillet

Nous faisons un peu d�exercice. Oh ! Pas beaucoup, � la bonne franquette. On entend tr�s peu le canon � cette distance.

J�ai visit� ce soir un poste d�observation contre avions. Ce poste est tenu par des auxiliaires. Aux moyens d�appareils sp�ciaux, ils entendent les avions de tr�s loin et les signalent � la batterie voisine. Ils nous disent qu�ils entendent tr�s bien le canon et qu�ils voient la lueur produite par les fus�es et l��clatement des obus. Ils se croient au front quoi !!

Les � pauvres diables �.

Je voudrais bien les voir en ligne, surtout celui qui nous cause .Il n�a jamais �t� au front et est tout effray� de se trouver � 20 ou 25 km des lignes .Il nous demande ce que disent les prisonniers. Fichtre ! Il se figure que les prisonniers se font comme �a. Si il avait re�u les obus sur le nez et vu le 72�me rentrer en si piteux �tat, il aurait vu qu�il est d�j� souvent bien difficile de se d�fendre, � plus forte raison de faire des prisonniers.

 

Quand il a 15 jours, j�ai �t� par deux fois � Viel-Arcy et Pont-Arcy � 2km des lignes et que les boches bombardaient nos cantonnements ou qu�ils ex�cutaient des tirs de barrage pour emp�cher d�envoyer des renforts. J�en avais gu�re la t�te � moi, je l�avoue, et je ne pensais pas � faire des prisonniers !

Jusqu�au 25, repos calme. Nous sommes tranquilles.

26-27-28-29

Quatre jours d�enfer.

Quatre jours pass�s dans les tranch�es au Chemin des Dames. Comment je ne suis pas devenu fou !

Parti le 25 au soir en autobus. Arriv� dans la nuit � Bourg-et-Comin. Canon tonne terriblement. Nous avan�ons en tirailleurs. Tirs de barrages. Le r�giment s�arr�te � 2 ou 300m des premi�res lignes. Le 1/3 est hors de combat.

C�est un bombardement effroyable. Les hommes volent en l�air comme des mannequins en baudruche.

Je reste avec LENOIR tireur et mon premier pourvoyeur dans un entonnoir. (*)

Le deuxi�me jour le premier pourvoyeur est tu� par. Une boite de singe.

Enterr� 3 fois.

Le sang me sort par les oreilles et par le nez. Je sens que je deviens fou. Cette vie d�enfer dure jusqu�au 29.

Dans la nuit un agent de liaison vient me chercher. Je pars en permission et de l� � Grenoble au 140i�me. Je ne sais plus o� j�en suis. L�agent de liaison disparait.

Je fais des bons d�sordonn�s d�un trou d�obus dans un autre. Les �clats sifflent autour de moi. Tout d�un coup une fus�e. Je fais un saut dans un trou .J�aper�ois un trou noir .Je me pr�cipite et rentre t�te baiss�e dans un lieutenant qui sortait .Il me demande si je suis fou .Je lui r�ponds que je vais en permission .Il veut m�emp�cher de sortir.

Nous sommes interrompus par un tir de barrage qui nous jette � terre. Je sors du trou le tir de barrage fini. Je fais quelques bonds. Un obus �clate devant moi. Je suis rejet� du trou d�obus d�o� je sortais.

J�ai tellement peur que je reste au moins un quart d�heure sans pouvoir sortir du trou ou je me trouve. J�arrive enfin apr�s cinq heures d�efforts � Vendresse. Je suis habill� � nouveau et exp�di� en permission.

C�est le 30 juillet, c�est-�-dire beaucoup plut�t que je ne le d�sirais.

 

(*) : On pourrait croire qu�il est mitrailleur.

31 juillet

Arriv�e � Paris.

Mes parents partent le lendemain � Sergines. Je fais changer ma permission.

Ao�t 1917

1er au 10 ao�t

Permission pass�e � Sergines. Sans grand amusement.

Je vais avec Georges DANGU et Andr� BARR�. Je soupe le soir chez Henri DANGU en compagnie de Maurice TH�NARD.

Je retrouve une demoiselle �lisa qui reste � Sergines. Je passe agr�ablement ma derni�re journ�e et ma derni�re nuit.

Bref la permission est assez morne.

Je pars le 11.

Je reste quelques instants avec mon p�re et Suzanne. Je d�jeune chez Mme DELECOURT.

 

Selon sa fiche matriculaire, Roger MARCOUIRE est pass� au 175e r�giment d�infanterie le 11 ao�t 1917. Le r�giment est parti de France en Gr�ce depuis mi-1915.

12 ao�t

J�arrive � Grenoble apr�s 24 heures de voyage.

Je reste � Grenoble jusqu�au 21.

Je ne fais absolument rien. Grenoble est une jolie ville. Je vais au cin�ma et au th��tre.

Le 15 ao�t

J�ai un sacr� cafard. Savoir tout le monde l�-bas en train de s�amuser et �tre clou� l� tout seul.

C�est emb�tant.

22 ao�t

Arriv�e � Marseille apr�s avoir �t� habill� � neuf. Voyage r�ellement joli. Nous sommes log�s au camp Mirabeau � 10 km de Marseille. Le pays s�appelle L�Estaque.

Nous sommes extr�mement libres. Le capitaine ï¿½ nous laisse la bride sur le cou ï¿½. Il est tr�s chic notre capitaine. C�est le fils du g�n�ral PAU et tient � faire honneur � son nom. Seulement il y a des bagarres tous les jours � Marseille ; des bless�s, quelquefois des morts. I y a surtout certaine rue dans Marseille o� il ne faut aller que bien arm� et � plusieurs. Je ne puis avoir la permission de quatre jours que l�on m�avait promise.

Si j�avais su ! Ce que je l�aurais pris les 4 jours � Grenoble. Mais tant pis, ce qui est fait.

29 ao�t

D�part de Marseille. A partir de ce jour, je fais r�ellement partie des troupes d�Orient.

Nous partons � 4 h du matin

Le 29, nous passons � Toulon, Nice, Cannes, Monaco.

Le voyage est joli. Je suis dans un wagon de marchandises et je suis tr�s bien. A la fronti�re tout le monde nous applaudit. Vintimille ; nous changeons de wagon, Nous nous arr�tons aussi � San-R�mo.

Je me r�veille � minuit � G�nes.

30

Nous arrivons � Livorno. Couche dans une caserne italienne. Je me prom�ne dans Livorno. Les Italiens nous ach�tent nos boites de singe, nos chaussures, tout !

Mes camarades vendent tous leurs effets. Ah ! Elle est belle l�arm�e � SARRAIL ! (*)

 

(*) : Le g�n�ral SARRAIL est le commandant en chef des arm�es alli�es d�Orient depuis janvier 1916.

31 ao�t

Le voyage continue Civita-Vecchia.

Nous arrivons � Rome dans la nuit. Les romains nous font une tr�s belle r�ception�4h d�arr�t. Visite un peu la ville. Malheureusement, ce n�est pas assez.

Au d�part, un incident � un arr�t de train, quelques camarades descendent et cueillent des raisins dans une vigne. Un italien tire sur eux avec un fusil. Il a de la chance que nous n�ayons pas de fusils.

Enfin le train repart.

Nous quittons la cote un peu avant Naples. Passons � Bari le soir. Nous avons travers� toute la Calabre. Quelle triste contr�e ! Pas une maison. Rien que des plaines d�sertes. De temps quelques affiches sur lesquelles on aper�oit le mot � banditto ï¿½ et � calabro ï¿½ Faggio.

Distribution de caf� ! Deux heures d�arr�t.

Nous nous promenons un peu dans la ville. Continuant � voyager toute la nuit.

Septembre 1917

1er septembre

5h du matin. Arriv�e � Tarente.

Une tr�s jolie rade. Des cuirassiers italiens et fran�ais. Nous prenons un bain et couchons dans une guitoune ou il y a pas mal de puces.

2 septembre

Embarquons � 10h du matin sur le croiseur-cuirassier � Jules-Ferry ï¿½. .

Partons � 2h. Nous sommes accompagn�s du croiseur � Ch�teau�Renaud ï¿½ et de quatre torpilleurs. La rade de Tarente est magnifique. Nous passons devant l�escadre italienne dont tous les marins sont sur le pont et saluent.

Les habitants nous disent au revoir.

Jusqu�au soir nous voyageons dans le golfe de Tarente. La mer est calme. Je visite le cuirass�, tr�s int�ressant.

De grosses pi�ces sont mises en batterie. Les tourelles point�es vers le large.

Dans la nuit nous traversons l�Adriatique � toute vitesse et tous feux �teints.

Pench� sur le bastingage, je distingue la silhouette du Ch�teau-Renaud un peu en arri�re. De temps en temps des �tincelles sortent des chemin�es. Tous mes camarades sont endormis. Le calme est impressionnant.

Vers minuit bruit de voix. Des signaux sont �chang�s entre les navires.

Le Ch�teau-Renaud disparait et r�apparait alternativement. Les navires marchent en diagonale. Je m�endors.

3 septembre

Arrivons en vue des c�tes grecques. Nous p�n�trons dans le golfe de Corinthe. Il n�y a plus de danger.

Longeons les c�tes grecques jusque vers 4 heures. D�barquons � It�a. (*)

Tr�s bon raisin. Restons sous les tentes jusqu�� 8 h du soir.

A 8 h, embarquons sur les autres camions. Il fait noir. La route est b�tie � la diable.

 

A 11h arr�t. La deuxi�me voiture dans un tournant est partie dans un ravin.

Trois morts et quelques bless�s. Du coup, personne ne veut repartir. Nous couchons dans la montagne jusqu�au jour.

 

Vers 4 heures, le voyage reprend. Il faut �tre enrag� pour aller en auto dans des routes pareilles. Jamais un voyageur ordinaire ne voudrait passer dans des chemins pareils. Les camions prennent les montagnes v�ritablement d�assaut. Nous montons en serpentant. La route b�tie � flanc de coteaux est bord�e de pr�cipices. C�est r�ellement magnifique.

Mais quand le tournant est brusque, on a toujours le trac d��tre pr�cipit� dans le vide.

Apr�s 60 km de chemins enrag�s, nous d�bouchons dans la plaine. �a descend raide ! Nous sommes pleins de poussi�re. Je me suis couvert la t�te avec une musette. Je dois �tre beau.

Arriv� � Bralo.

 

(*) : It�a est une ville grecque portuaire situ� dans le golfe de Corinthe. Les troupes d�barquent dans ce port pour rejoindre, � travers la montagne, la ligne de chemin de fer � Bralo qui am�ne � Salonique. Voir la route actuelle ici.

Voir cette carte de la Gr�ce.

4 septembre

Bralo est un pays perdu, mais il y a un chemin de fer. C�est tout ce qu�il nous faut.

Le soir, je visite le patelin. Toutes les femmes se sauvent � notre approche. Celles qui restent sont voil�es. Nous avons la chance de nous trouver au moment d�une f�te de conscrits. Pas ordinaire.

Ils se suivent tous en se donnant la main et le premier danse un pas bizarre en sifflant de temps en temps et en poussant des exclamations gutturales. Comme musique, une esp�ce de biniou rappelant la � nouba � des S�n�galais.

On croirait un village n�gre.

5 septembre

Prenons le train pour Salonique.

Le voyage est toujours tr�s joli. Nous sommes toujours dans les wagons � marchandises, ce que je ne regrette pas car il commence � faire chaud. Nous escaladons toujours des montagnes. Ce qui est joli, c�est que nous montons toujours � flanc de coteaux.

A notre droite, nous dominons la plaine de Bralo. On se croirait en a�roplane.

 

A 6 h du soir, nous d�bouchons dans la plaine de Larissa. Toujours des descentes endiabl�es. C�est r�ellement merveilleux comme voyage. Quoiqu�il arrive, je ne regretterai pas l�Orient.

 

A Larissa, distribution de vivres.

6 septembre

Arrivons � Salonique au matin. Campons hors de la ville au camp des alli�s (ou Zeitenlik).

Il y a de tout dans ce camp. Des Fran�ais, des Anglais, de Italiens, des Russes, des Serbes, des Grecs et des �.puces ; impossible de dormir.

La nuit, nous allons dormir hors des baraques. Les premiers jours, nous allons visiter les r�fugi�s grecs et serbes qui dorment aux environs du camp. Il y a un marchand de vin qui vend du Sammos, un vin �patant. Seulement, il monte vite � la t�te et tous les soirs occasionne des batailles entre les alli�s.

Les Grecs ne nous aiment pas beaucoup. Ils n�aiment gu�re les V�niz�listes aussi. Si tous les Grecs sont ainsi, nous pouvons avoir confiance en eux.

 

Je visite Salonique, tous les beaux quartiers sont br�l�s. L�incendie a r�ellement �t� formidable. (*)

Nous allons du c�t� de la tour Blanche. Le coin de la ville est tr�s anim�. C�est le seul de la ville europ�enne qui est �chapp� au d�sastre. Les animaux de Grecs cherchent � nous voler.

Pour d�ner en ville, il faut au moins payer 7 � 8 f par t�te. C�est pour rien.

 

L�avant-dernier soir de notre s�jour � Salonique, nous allons au fameux vendeur de Sammos. Malheureusement, nous en buvons un peu trop et � moiti� gris, nous jouons un tour pendable au malheureux Grec. Nous �tions assis pr�s d�un tonneau d�une cinquantaine de litres. Un Italien nous fait signe de l�emporter.

Aves quelques-uns de ses camarades et mes trois copains habituels, nous enlevons le tonneau et nous nous sauvons vers le camp. A moiti� chemin, nous nous arr�tons pour vider le fameux tonneau qui contient de la bi�re.

Malheureusement, le Grec nous court apr�s. Il veut son tonneau. Pour couper court � toutes explications, nous lui fichons une vol�e, ainsi qu�aux deux grecs qui sont avec lui. Puis nous rebuvons. Mais les Grecs arrivent en nombre. Les Italiens se sauvent et sous peine d��tre massacr�s, nous devons en faire autant.

De rage, nous renversons le tonneau. Il faut tout de m�me �tre rosse.

 

(*) : Le grand incendie de Salonique en ao�t 1917 a d�truit 1/3 de la ville, presque 10.000 b�timents auraient �t� d�truits.

15 septembre

D�part de Salonique.

4 heures du matin. Voyageons toujours dans wagon � marchandises. Tr�s serr�s.

Dans la journ�e, je prends le parti de monter sur le toit. Il y fait de l�air. Tr�s chaud. Quelques-uns ont la fi�vre et sont �vacu�s. Voyageons toute la journ�e et toute la nuit.

16 septembre

Arrivons � 10 h � Ostrovo.

 

 

Situation de Salonique et d�Ostrovo � Cliquer sur la carte.

 

 

Les habitants ayant vu les Bulgares aiment un peu mieux les Fran�ais. Ils sont bombard�s para�t-il de temps en temps. Le train s�arr�te des heures enti�res dans chaque gare. Je m�informe de l�heure. Les a�rostiers sont plus pr�s du front.

Contournons tout le lac d�Ostrovo. Tr�s joli.

Descendons de wagon � Florina. Campons sous les guitounes. A partir de maintenant, nos toiles de tente seront nos demeures.

 

 

Situation de d�Ostrovo et de Florina

 

Je monte ma maison en compagnie de trois camarades qui ne me quittent gu�re. Ce sont COUD� dit � Fantomas � ; PLAZA (*) dit � toto � ; CHANOINE dit � Quiqui �. Quant � moi, je m�appelle � Taufan �.

Visite d�avions boches ou bulgares. Ils ne sont pas m�chants et ne nous laissent pas de souvenir.

 

(*) : Jean PLAZA sera tu� en octobre 1917.

17 septembre

La nuit a �t� tr�s fra�che.

Il y a dans ces montagnes une grande diff�rence de temp�rature entre le jour et la nuit. Nous nous sommes lev�s � 3h du matin pour faire du feu et du chocolat. Visite d�avions boches. Toujours pas m�chants.

La journ�e est tr�s chaude.

Passons une deuxi�me nuit meilleure que la premi�re, nous avons pris nos pr�cautions contre le froid.

18 septembre

D�part � 5h du soir � pieds � travers la montagne. Les sacs dans des voitures. Florina est une ville assez monotone et pas du tout moderne malgr� ses 15.000 habitants.

Halte � 8h du soir au kilom�tre 6 en pleine montagne. Passons la nuit sous nos guitounes.

 

Nota : Selon sa fiche matriculaire, Roger MARCOUIRE est pass� au 176e r�giment d�infanterie le 18 septembre 1917. Le r�giment est parti de France depuis mi-1915.

19 septembre

Reprenons la marche. Bonne �tape. 25 km dans la montagne.

Mes trois camarades et moi nous sommes d�brouill�s. Nous avons pris un camion qui nous a men� jusqu�� Zenovah (J�lova)

Vraiment, les routes ne sont pas �patantes et il faut �tre forc� pour passer dans des endroits pareils. Tous les jours, des camions tombent dans des ravins.

Le n�tre contient des barriques de gnole qui se sauve par endroit. Nous y go�tons.

Couchons toujours � la belle �toile.

20 septembre

Partons de Zenovah (J�lova) le matin. Je fais l��tape � pieds. Pas longue, une quinzaine de kilom�tres. Marche tr�s fatigante faite en plein midi. Je jure de ne plus faire un kilom�tre � pieds. Couchons � Smrd�s. (*)

 

(*) : Smerdech sur les plans fran�ais ; s�appelle maintenant Krystallopigi.

21 septembre

Repartons � pieds.

Les Russes occupent tous ces villages. On se croirait presque en Russie. Ces animaux-l� ne veulent plus marcher et ne sont bons qu�� se pr�lasser � l�arri�re. (*)

Je puis enfin avoir un journal de France. Il date du 18 ao�t !

Quel pays. Impossible de rien avoir. On se croirait en pleine Alg�rie. Les montagnes sont calcin�es par le soleil. Il n�y a aucun arbre fruitier, pas de vigne, pas de culture.

Prenons un camion qui nous conduit au g�te d��tape � Zemlak.

Nous sommes � 1500 m�tres d�un patelin, toutes nos guitounes mont�es capricieusement � flanc d�un coteau, un d�sert aussi d�pourvu de v�g�tation que les sables du d�sert. Malgr� la fatigue de la marche et la chaleur, je me porte bien. J�oubliais de dire que l�on nous donne deux comprim�s de quinine par jour et dans les marches toutes les fois que l�on en d�sire.

Nous avons ici une journ�e de repos.

�a ne nous fait pas de mal.

 

(*) : La 1e division russe occupe le secteur.

23 septembre

Reprenons la marche le matin � 4h. J�ai la chance de rencontrer un camion qui me conduit jusqu�au g�te d��tape qui se trouve pr�s du village de Zwesda (Zvewda). Passons la journ�e au camp. (*)

Rien d�anormal.

 

(*) : L��tat-major de la 124e division d�infanterie (qui comprends entre autres le 175e r�giment d�infanterie) se trouve dans ce village de Zvewda.

24 septembre

Repartons au matin. Je me suis d�brouill� pour faire porter mes sacs en camion. Je pars � pieds avec quelques camarades. Nous nous trompons de route et allons jusqu�au lac de Prespa. Il faut retourner.

Prenons un camion conduisant des boules de pain qui nous conduit jusqu�� Podgaric.

Passons la journ�e � Podgaric. Pays toujours d�sert.

25 septembre

Repartons � 3h matin. Nos sacs sont port�s par des arabas. Je monte dans une.

Arrivons le soir � Pogradec. Nous y trouvons enfin le colonel du 176. Depuis 140 km que nous courons apr�s lui, ce n�est pas un malheur.

26 septembre

D�part de Pogradec.

 

JMO du 176e RI annon�ant l�arriv�e de 3 sous-officiers, 5 caporaux et 138 soldats dont Roger.

 

 

Nous montons en ligne � 5h du soir. Il faut faire 9 km dans la montagne.

Arrivons � 9h du soir aux cuisines. On nous donne � manger. J�oubliais : je suis affect� � la 10�me compagnie

Mes trois camarades sont s�par�s. Ils sont � la 2�me, 6�me et 7�me. Suis affect� � la 15�me escouade avec deux camarades de renfort. Arrivons aux positions dans l�apr�s-midi du 27.

La 4�me section tient un mamelon qui est assez mal d�fendu. A notre droite, le capitaine et 2 sections, � notre gauche une compagnie de mitrailleuses. Nous sommes entour�s de ravins de tous c�t�s. Les Autrichiens sont sur les cr�tes faisant face � 4 ou 5 km. Comme ligne, c�est tranquille. Un bombardement de temps en temps, c�est peu.

Montons notre guitoune � nous trois. Nous creusons le sol puis nous la camouflons avec des branches.

 

 

Secteur o� se trouve Roger MARCOUIRE - Au nord-est de Hom�s - Piton de Sherlock -

 

Piton de Sherlock qu�il nommera le 6 octobre (JMO 156e DI)

 

28 septembre

Allons poser des fils de fer. Pas un coup de canon la journ�e. Nourriture compl�tement insuffisante.

Je prends la garde dans la nuit du 28 au 29.

29 septembre

Journ�e assez calme.

Bombardements intermittents avec des 77 et des 88. Nous prenons la garde toutes les nuits.

Dans le tant�t alerte. Une patrouille arrive jusqu�au petit poste et tire des coups de feu. Pas de suite si ce n�est une demi-heure de bombardements assez violents. Je suis de garde et pas tr�s rassur�. Je me baisse derri�re les pierres quand je sens arriver les obus sur moi. Pas de bless�s.

Tout le monde travaille dans la nuit. Le capitaine a peur d�une attaque. Fortifions la position. Pas tr�s rassur�s au sujet de l�ennemi. Je prends la garde de minuit � 2h.

Pas d�incidents nuit calme aujourd�hui.

30 dimanche

Repos.

Violents bombardements � 11h et 5h du soir. Les obus tombent en plein sur nos guitounes. Garde de nuit 10h � minuit. Pas d�alerte.

Octobre 1917

1er octobre

Journ�e calme.

Garde de 8h � 10h. Calme.

2 octobre

Journ�e calme.

Prends la garde au petit poste. Observons une patrouille avec le guetteur. Je suis photographi�.

Nous sommes relev�s le soir. Allons au repos � 2 kilom�tres en arri�re.

3 octobre

Journ�e pass�e au repos. Couchons dans hutte en feuillages.

4 octobre

Toujours petit repos. Changeons de secteur.

Partons demain pour Florina au grand repos.

5 vendredi

Toujours petit repos. Pars ce soir.

Passe � Pogradec. Arrivons � 2 km d�Okrida� � 2h matin.

Samedi 6

Beaucoup de ch�taignes. Trouvons des �quipements que les Autrichiens ont laiss�s dans leur fuite.

� propos, nous �tions en ligne au piton Sharlock (cote 1700).

Repartons le soir.

Dimanche 7

Marche extr�mement fatigante.

Partis le soir � 6h, arriv�s � 4h matin. March� toute la nuit. Cantonn� en pleine montagne. Passons la journ�e. Beaucoup de ch�taignes. Apprends la mort du pauvre RUBENS par Ren�. �moi, le cafard toute la journ�e.

Repartons le soir pour Podgori. Ces marches sont tr�s fatigantes. J�arrive ext�nu�.

Pars le soir, c�est-�-dire le lundi 8. La journ�e est calme.

Mardi 9

Arrive le matin apr�s 9h de marche tout pr�s de Vraneste, avons pass� � Zwezda sans s��tre arr�t�.

Je passe la journ�e du 9 dans un repos bien gagn�.

Mercredi 10

Repos au m�me endroit.

Mange pour la premi�re fois de la tortue et une omelette d��ufs de �tortue. Tr�s bon. Vraiment il faut venir en Orient pour manger de ces bestioles. Il est vrai que la nourriture est maigre, chacun se d�brouille comme il peut.

Nous allons le soir 1 km plus loin. Nous allons probablement y rester un certain temps.

Jeudi 11

Nous sommes dans un bois. Tr�s bien.

Rien � signaler.

Vendredi 12

D�part brusque.

Marche sous une pluie battante. Oh ! La sale journ�e. Nous faisons 30 km rinc�s jusqu�aux os. J�arrive ext�nu�. Un de mes camarades est malade.

Il reste un peu en arri�re. Je reste avec lui avec le troisi�me copain habituel. Le lieutenant-colonel vient � passer. Il nous demande pourquoi nous restons derri�re, puis se met � nous � habiller � en termes peu choisis. Vraiment, il y a des moments o� le m�tier militaire est �c�urant. Un homme est moins regard� qu�un chien. Ce colonel n�a donc pas d�enfants pour causer de la sorte.

Arrivons sur le soir compl�tement tremp�s. Couchons dans une maison. Nous nous faisons ouvrir une porte pas de bon gr�, naturellement, et nous passons une nuit potable.

Samedi 13

D�part de Podgori le matin � 10h. Je vais commencer � conna�tre la route. Marche sans incident. Temps beau.

Arriv�e � Sterova, sur les bords du lac Okrida. Couchons encore dans les maisons.

� 11h du soir, alerte. Les Autrichiens d�barquent sur les rives du lac. Nous tirons quelques coups de fusil et�restons toute la nuit � nous geler au bord de l�eau. Au matin, nous rejoignons Mumulista � 10 km de notre emplacement. En arrivant, je suis ext�nu�.

Dimanche 14

Cela fait 360 km � pieds que je m�envoie depuis le d�part de Florina. (*)

J�en ai plein le dos. Je suis r�ellement � bout. Nous sommes ici par crainte d�une attaque autrichienne. Nous devons y rester 12 � 15 jours puis revenir o� nous �tions, � moins qu�il n�y ait une attaque.

Je passe enfin une nuit � peu pr�s. On entend des coups de fusils, grenades ou canons presque toute la nuit. Je suis tellement fatigu� que �a ne m�emp�che pas de dormir � poings ferm�s.

Heureusement que ce n�est pas � notre compagnie � marcher, sans cela nous nous serions encore mis la ceinture comme repos.

 

(*) : C�est la ville (terminus du train) o� il a d�barqu� le 16 septembre.

Lundi 15

Nous sommes donc revenus au point o� nous �tions le 6, c�est-�-dire tout pr�s des lignes. Prenons la garde au bord du lac.

Nuit calme.

Mardi 16

Rien � signaler.

Mercredi 17

Partons au matin dans la montagne pour travailler. 4 outils par section.

Pas le temps d�arriver au lieu de travail, il faut redescendre. Total rien de fait. Il faut que le travail soit fait dans deux jours pour une attaque probable. Si �a va comme �a, le chemin sera fait.

Remontons tant�t.

Jeudi 18

Tout est pr�t.

Attaquons demain avec le 176, le 1er RMA (*) et 372, ainsi qu�un bataillon d�Annamites.

Nous devons d�gager le lac Okrida et prendre un piton qui parait-il sera assez dur.

 

(*) : RMA : R�giment de marche d�Afrique. Les Annamites sont des Indochinois.

Vendredi 19

Partons � 2h matin

Arrivons en premi�re ligne � 6h matin. Toute la journ�e attendons. Le bataillon est en r�serve et nous entendons l�attaque men�e par les 1er et deuxi�mes bataillons. Les deux attaques sont malheureusement manqu�es. Les Autrichiens sans doute pr�venus fauchent nos vagues d�assaut.

Vers le soir quittons nos positions, nos bless�s d�filent.

Arriv�s � 3km nous retournons en arri�re le passage n�est pas praticable.

Enfin au soir, nous apprenons que l�attaque est suspendue la position autrichienne �tant imprenable. Couchons dans un ruisseau. Au matin sommes r�veill�s par la pluie.

Reprenons nos positions de la veille.

Samedi 20

Je suis compl�tement tremp�.

Jusqu�� 11h00, nous sommes transis de froid. Impossible de monter ces montagnes sans se casser la figure. La pluie cesse un peu. Nous montons notre toile de tente un peu plus solidement et attendons.

Pour aller chercher la soupe, on tombe � chaque instant et les Autrichiens, pour nous remettre, nous envoient des obus. La pluie retombe � torrent vers 5 heures. L�attaque est rat�e.

Les Autrichiens sans doute pr�venus mitraillent les n�tres � 800m. Une centaine de bless�s pour les 1er et 2�me bataillons.

Dimanche 21

Toujours m�me endroit. Rien � faire si ce n�est se faire mouiller. Les boches attaquent par deux fois et tombent sur un � bec ï¿½

Lundi 22

Allons travailler.

Sommes aper�us sur la cr�te par les Autrichiens qui nous rep�rent. Un peu meilleur temps.

Vers le soir apr�s la soupe, nous sommes bombard�s violemment. Les 100 de marine tombent sur nous. Personne n�est bien fier, car nous n�avons pas d�abri et c�est ces � gros noirs (*) � �clatent bien. La position ne devient plus bonne.

 

(*) : L�explosion produit un nuage noir.

Mardi 23

Dans la nuit � 2h matin, les Autrichiens attaquent. Violent bombardement. On nous disait qu�ils n�avaient pas d�artillerie ! Je crois qu�ils en ont plus que nous. Les mitrailleuses p�taradent.

Vers 3h tout rentre dans le silence.

Violent bombardement toute la journ�e.

Mercredi 24

Allons travailler � la piste. Temps pluvieux.

Bombardement intermittent.

Notre tente est travers�e par un obus �clat d�obus. Personne de bless�. Un mulet a le ventre ouvert.

Jeudi 25

Repos toute la journ�e. Beau temps.

Les deux camarades qui montaient la tente avec notre trio habituel retournent en France dans la marine. Nous h�ritons de leurs toiles de tente. Nous voil� mont�s pour l�hiver.

J�oubliais : depuis trois jours nous avons la soupe le soir � dix heures. La fum�e �tant vue des autrichiens qui nous bombardent. C�est amusant.

La nourriture devient d�ailleurs totalement insuffisante. Pas de l�gumes, du singe, et 1/3 de boule par homme pour toute la journ�e. Parfois, nous avons des biscuits. Avec ce r�gime on peut engraisser.

D�cid�ment les mauvaises nouvelles se suivent. J�apprends la mort de ce pauvre PLAZA (*), tu� � la derni�re attaque. Venir de si loin pour se faire tuer.

Je re�ois une lettre de Sergines en date du 28 ao�t.

 

(*) : PLAZA Jean Jos�, 21 ans, du 176e r�giment d�infanterie est mort � l�h�pital d�Holm�s (Serbie). Il �tait d�Oran en Alg�rie. Voir sa fiche.

Vendredi 26

Journ�e calme sans bombardement. Passent quelques bless�s et malades et pieds gel�s ! Nourriture de plus en plus rare.

Samedi 27

R�veil a deux heures du matin. Nous d�m�nageons. La soupe est pr�te � 2h matin on la mange de suite.

Jusqu�au soir, 8 ou 9 heures avec cette soupe dans le ventre. C�est amusant. Les chemins sont impossibles ; la colonne est continuellement coup�e. On peut � peine s�arracher de la boue. Un homme reste derri�re.

Le capitaine lui demande pourquoi. Le soldat est fatigu�. Il faut marcher ou � crever ï¿½ r�pond le capitaine, tu auras 8 jours de prisons. C�est �c�urant. Le ventre vide il faut marcher tout de m�me. Les hommes ici sont men�s comme des b�tes de somme.

Arrivons � la cote 1857. Jolie hauteur.

Dimanche 28

Repos.

Neige sur les montagnes environnantes.

Lundi 29

Cassons quelques piquets puis repos.

� 1h plions de nouveau bagage.

Revenons en avant, en lignes pour les organiser. Montons nos guitounes � flanc de montagne.

Mardi 30

Le matin repos.

Une nouvelle. Les Russes ne marchent pas trop ici. Ils restent en ligne, parce qu�ils sont� forc�s. Pour la premi�re fois nous avons un journal, dat� du 3 octobre. Nous nous pr�cipitons sur ces nouvelles, fraiches pour nous. Les Russes reculent en France.

On parle de trahisons. Un nomm� BOLO. (*)

Je suis tout �tonn� d�apprendre que le minist�re est chang� ! Que nous vivons en sauvages !! On parle de paix. Viendra t-elle cet hiver ?

Notre artillerie divisionnaire est partie en Syrie. Il parait que notre division, la 156, la plus vieille d�Orient, doit �tre relev�e et partir l�-bas. � ? de voyage.

Nourriture toujours mauvaise et insuffisante.

Hier soir � � 9h du soir � un morceau de viande immangeable et un quart de � jus �. Tous les jours il manque quelque chose.

J�attends des colis avec impatience.

 

(*) : L�affaire BOLO Paul Marie a secou� la France de cette ann�e 1917. Durant le premier conflit mondial, il convainc l'Allemagne de corrompre la presse fran�aise pour y publier des articles pacifistes destin�s � atteindre le moral des Fran�ais. Arr�t� en septembre 1917, apr�s avoir re�u sur son compte 11 millions de marks en provenance de la Deutsche Bank, Bolo (dit Pacha) est jug� par le conseil de guerre en f�vrier 1918 et condamn� � mort. Lire ici.

Mercredi 31

Allons creuser des tranch�es. Il fait tr�s froid au matin. Sur le soir le temps se radoucit. Le front est tr�s calme ces jours-ci. On n�entend ni coups de canon, ni coups de fusil.

Novembre 1917

Jeudi 1 novembre

F�te de la Toussaint. Quelques piquets et c�est tout. (*)

Il y a un an, j��tais en permission. Que de diff�rence ! Dans un an, o� serais-je ?

Pluie intermittente. Le soir de 7 � 9, alerte. Les Autrichiens attaquent.

 

(*) : Ils plantent des piquets avec du fil de fer barbel�s.

Vendredi 2

Repos toute la journ�e.

Samedi 3

Travaux de tranch�es. Notre guitoune br�le � moiti�. Tout va mal apr�s. On nous vole notre viande, les haricots ne sont pas cuits etc.� le vin chaud est ex�crable.

Dimanche 4

Mon oreille recoule.

Il me faut y aller tous les jours � la visite. Mes deux camarades prennent la garde dans la nuit.

Lundi 5

Je vais me faire soigner.

Camouflage des guitounes. Nous nous prot�geons contre la neige.

Mardi 6

Les premi�res lignes doivent �tre ramen�es en arri�re, � l�endroit o� sont les tranch�es, le 11, je crois. Les travaux sont donc press�s. Je ne fais rien.

Le major parle de m��vacuer. Dr�le d�histoire, � laquelle j��tais loin de m�attendre.

Mercredi 7

Mon oreille va mieux.

Les nouvelles venant de France sont assez graves.� Il circule des bruits extraordinaires. On parle de trahisons. BOLO, FUNNEL, MALVY, Charles HUMBERT seraient emprisonn�es. Quel grabuge �a doit faire en France. (*)

Il paraitrait aussi que les Italiens se sont rendus et qu�ils ont laiss� 80 000 hommes aux mains des Autrichiens. (**)

Tout ce chambard sent la fin.

Ce que je rage d��tre enterr� ici et de ne saisir aucune nouvelle. Il est vrai que sur le front fran�ais on les sait de trop pr�s.

Depuis 15 jours, nous avons comme l�gumes, lorsqu�il y en a, des haricots pas cuits. Je commence � en avoir plein le dos des � fayots �.

 

(*) : Affaire politico-financi�re-espionnage. Voir ici.

(**) : La bataille de Caporetto (octobre-novembre 1917) a �t� perdu par l�Italie face aux Austro-Hongrois-Allemands. Bilan pour l�Italie 30.000 morts et bless�s et 260.000 prisonniers. On est loin des renseignements de Roger MARCOUIRE ! Cette bataille a entrain� l�envoi massif de troupes fran�aises sur le front italien.

Jeudi 8

Hier nous avons re�u chacun un colis. Ces envois nous mettent le c�ur de l�estomac en joie. L�ordinaire est vari�.

Nous nous couchons de bonne humeur. Pas de bougie un rem�de : un bocal tremp� dans de la graisse d�arme procure une lumi�re assez fumeuse et sans trop mauvais go�t. Je ne serai plus embarrass� dans le civil ! Rien autre de nouveau aujourd�hui.

Vendredi 9

Pluie torrentielle. Toute la nuit. Il fait humide.

Nous devons quitter le bivouac dans la nuit du 12 au 13, parait-il. Nous ne savons pour o� aller. Certains disent que nous allons en arri�re, d�autres que nous allons occuper les tranch�es faites en arri�re de� nous�

Les lettres et colis arrivent r�guli�rement ces jours-ci.

Samedi 10

Pas de changement. Toujours de la pluie.

S�rieux coup de main de main pour les boites de conserves.

Depuis quelques jours, je ne vais plus travailler. Je suis sens� me faire donner des soins pour mon oreille. Tant que �a durera.

J�ai oubli� de mettre les noms des deux camarades qui forment notre trio depuis quelques temps. Ce sont GUEYLARD de Bordeaux et MOREAU des environs de Ruffec. Mon sergent travaille � la bijouterie AGNEAUX au 78.

D�part le soir � minuit au milieu d�une pluie battante.

Dimanche 11

Je crois que je me souviendrai toute la vie de cette marche � travers la pluie. Les pistes n��tant plus� praticables il nous a fallu passer � c�t�. Impossible de voir l�homme qui se trouve devant soi. Nous ne faisons tous que tomber dans l�eau et la boue qui nous vient jusqu�aux genoux.

Ce ne sont plus des hommes qui arrivent du c�t� de la 1704 � 8h du matin. Ce sont des masses de boue qui peuvent � peine se trainer.

La pluie tombe � torrent jusqu�� 11h. Nous grelottons de froid. Le bois est mouill�, impossible de faire du feu.

La soupe arrive � 5h. Le bouillon nous r�chauffe.

Vers le soir la pluie cesse. Nous faisons un bon feu devant la guitoune et un coup de main sur les conserves.

Nuit tranquille.

Lundi 12

Matin�e tranquille.

D�montage des guitounes � 11h. D�part � 12h. Temps meilleur.

Arriv�e en ligne � 4h

Nous relevons le 175. Le piton o� se trouvent les tranch�es s�appelle � Piton chevelu �. Notre section est en r�serve. Le bombardement est violent toute la journ�e, il ne cesse que vers le soir, au moment o� la pluie recommence.

La soupe arrive � 9h. Il faut faire 6km pour la chercher.

Mon copain MOREAU qui a �t� la cherch�, s�est perdu dans la montagne et revient de fort mauvaise humeur.

Je re�ois un colis contenant du chocolat, un peigne, des �pingles et un journal en date du� 7 d�cembre 1914.

Moi qui voulais des nouvelles fraiches, je suis servi ! J�oubliais nouveau coup de main sur les conserves et le chocolat. Le pain manque un peu.

Nuit calme.

Vue sur le piton Chevelu de nos jours

Mardi 13

Pluie toute la matin�e.

Nous avons un mal de chien pour allumer du feu. Nous arrivons au moyen de la graisse d�arme de deux bouts de bois qui tenaient� mon peigne et d�une boite en fer. Tant�t calme. Bon feu

Am�nagement de la guitoune.

Bombardement 4 coups de 65.

Mercredi 14

Journ�e de brouillard et tr�s calme. Pas un coup de canon.

Jeudi 15

Les artilleurs se rattrapent. Ils nous marmitent toute la journ�e. La canonnade et la� fusillade ne discontinuent pas� jusqu�au soir. Les fran�ais tirent avec des 120 sur Okrida.

Il ne va plus rien rester de la ville.

Vendredi 16

Journ�e un peu plus calme. Un peu de brouillard. Quelques fusillades et c�est tout.

Samedi 17

Toujours assez calme. Il fait aujourd�hui tr�s froid.

Dimanche 18

Toujours froid et calme.

Lundi 19

Temps splendide, le vent est froid mais il fait un beau soleil. Les boches devaient attaquer hier, nous avons �t� alert�s toute la nuit et toute la journ�e, tout �tait pr�t pour les recevoir et�ils n�ont pas tir� un coup de canon. Je crois que si nous ne les emb�tions pas, ces gens-l� ne diraient jamais rien.

J�ai re�u trois lettres successives de C�line, dans lesquelles, elle me met des coupures de journaux.

Forte offensive en France, parait-il.

Mardi 20

Le m�me bruit court toujours que nous devons �tre relev�s. Finira t-il par se r�aliser ?

Toujours calme.

Les Fran�ais ainsi que les Autrichiens font beaucoup sauter de mines, pour faire des tranch�es et des routes.

Mercredi 21

Prenons les tranch�es.

Un avion autrichien fait du rep�rage pendant une demi-heure. Journ�e calme.

Jeudi 22

Avons pris la garde cette nuit avec MOREAU. 4h c�est diablement long. Il fait assez froid. Nous la prenons dans un trou en avant des tranch�es, contre les barbel�s. Nuit calme. Le secteur n�est pas si bon qu�au Sherlock.

Il faut mettre une heure pour aller � la soupe. 4h de garde de nuit et 2 de jour.

Il faut travailler par-dessus le march� et aller faire des patrouilles. Nous en avons fait une la nuit derni�re, mais il nous a �t�� impossible de trouver la � Chicane � et ma foi, nous sommes revenus, sans aller plus loin. Nous avons pris la garde en revenant. Nous nous sommes serr�s dans notre trou, la couverture sur la t�te.

De temps un temps, un petit tressaillement, ce ne sont pas les Autrichiens qui nous d�rangent, mais les � totos �. Sales b�tes !!! Il y en a d�ailleurs pas mal dans notre gourbi. Il faut �tre esquint� pour y dormir.

D�s qu�on y fait du feu, le gourbi s�emplit de fum�e, c�est irrespirable, nous sommes des rats, enfum�s dans le sol.

Vendredi 23

Journ�e calme.

Patrouille la nuit de 2h � 4h.

Samedi 24

Toujours calme.

Garde et patrouille.

Dimanche 25

Vive fusillade toute la Journ�e. Moreau part aux mitrailleurs. Je reste seul. Hommes relev�s le soir � 10h. Pendant ces quatre jours de ligne nous avons entendu 3 coups de canon.

Lundi 26

Marche tr�s dure.

Arrivons dans un petit pays � 6km au nord de Pogradec.

Totalement esquint�. Le capitaine compl�tement ivre, nous fait faire du maniement d�arme.

Mardi 27

Arriv�e � Podgori.

Logeons toujours dans habitations. L�int�rieur des Albanais est pauvre. Pas de meubles. Hommes et femmes dorment et mangent dans la m�me pi�ce. Je go�te leur pain. Il est fait avec du ma�s. Pas mauvais go�t, mais tr�s serr� et indigeste.

Mercredi 28

Repartons au matin de� Podgori.

Grand�halte � Sousda (Zvezda). Le lac Malik a d�bord� et est au bord de la route.

Arrivons vers 4H � Cangoni (Tsangoni). Couchons sous les guitounes sous pr�texte qu�il y a la peste au village.

Jeudi 29

Repartons au matin.

Arrivons � Biklista (Biklichta), village assez important o� l�on trouve quelques boutiques et quelques articles vari�s. Le pain naturellement est introuvable.

Logeons dans les guitounes.

Vendredi 30

Repos.

Attendons le reste du r�giment. Dans la nuit : alerte. Sacs mont�s pr�ts � revenir en lignes.

Ce n�est heureusement qu�une fausse alerte.

D�cembre 1917

Samedi 1 d�cembre

Restons encore � Biklista.

Tous les mouvements de troupe sont arr�t�s. J�ignore la raison.

Dimanche 2

Partons le soir et allons loger dans Biklista m�me.

Ma demi-section est toute enti�re dans une maison. Ne sommes pas mal. J�apprends pourquoi nous restons ici.

Les Russes ont sign� un armistice avec les Allemands et ne combattent plus. Restons derri�re les lignes au cas o� ils ficheraient le camp.

Ils ont fraternis� avec les Autrichiens dans la nuit du vendredi au samedi, ce qui a caus� l�alerte dont j�ai parl� !

Retourne voir le major pour mon oreille. Nourriture sensiblement meilleure.

Lundi 3

Rien de nouveau.

Mardi 4

Toujours rien de nouveau.

5-6-7-8

Repos. Rien � faire. Les Russes ont sign� un armistice et sont relev�s.

Je fais le bucheron ces jours-ci. Nous partons avec des camarades et de petits chevaux albanais dans la montagne et nous abattons des arbres pour nous chauffer.

9-10-11-12-12-14

Toujours au repos � Biklista.

Nous devons aller � Doiran par crainte d�une attaque, � la suite du l�chage de la Russie. Il n�y a plus rien � craindre parait-il. Nous restons ici, je ne sais jusqu�� quand. Le courrier va tr�s mal. Il neige fort ces temps-ci. Les camions tombent dans les ravins.� Je n�ai pas re�u de nouvelles de la maison depuis que je suis � Biklista (Biklichta).

La nourriture qui s��tait am�lior�e est redevenue subitement tr�s mauvaise. Il faut serrer la ceinture.

Enfin esp�rons qu�avec le minist�re CLEMENCEAU la guerre va se terminer. Il parait que nous devons �tre rentres chez nous pour le mois d�octobre 1918.

Nous avons le temps d�attendre.

15-16-17-18-19-20-21-22-23-24-25-26-27- jusqu�au 2 janvier 1918

Repos.

Pendant la journ�e du 19, nous avons fait rester la femme de notre logeur pendant 4 heures dans les W-C. Le bonhomme ne voulait pas que nous voyions son �pouse. Il a des m�urs toutes musulmanes.

1918

Janvier 1918

2 janvier 1918

D�part inattendu. Les Russes ont sign� la paix. Il faut aller les relever �  Lescoveck.

Arrivons le soir � Swesda (Zvezda). Logeons sous les guitounes. Il neige toute la journ�e.

3 janvier

D�part. Beau temps.

Arrivons sur les bords du lac Prespa. Logeons dans les maisons de Gloubec (Glombotch). 

4

Arrivons en lignes apr�s 3 jours de marche tr�s durs.

Couchons sous les guitounes dans la neige. Il fait un froid du diable.

5

Partons le soir.

Arrivons � 2h du matin en lignes.

Il y a un travail formidable de fait. Tout un r�seau de tranch�es creus�es en plein roc. Il y a des escaliers pour y monter car elles sont sur une pente rapide.

Restons toute la nuit dans la tranch�e.

 

(*) : Il se trouve dans la r�gion de Lescoveck (L�shov�ts).

 

 

 

 

Positions fran�aises (en rouge) et russes (en marron) juste avant le d�part des Russes en janvier 1918.

Roger MARCOUIRE se trouvait donc dans la r�gion de Lescoveck (L�shov�ts) entre les lacs d�Okrida et de Prespa.

6

Journ�e tr�s calme.

Les boches nous dominent et plongent dans nos tranch�es. C�est �tonnant qu�ils ne nous bombardent pas.

7

Violent bombardement. Les boches ont un crapouillot qui nous a rep�r�.

Qu�est-ce que nous prenons ! Un 105 tombe entre mon abri et celui du fusil-mitrailleur. Nous sommes trois l�-dedans renvers�s les uns sur les autres. Le gourbi est d�moli. C�est irrespirable. Je me sauve dans l�abri� de bombardement.

Sur le soir, je suis appel� par le lieutenant comme agent de liaison. Bon gourbi pr�s de lui. Les boches peuvent bombarder.

8

4h du matin.

R�veil en fanfare. Crapouillotage. Les Allemands tentent un coup de mains. Je suis oblig� de chercher le lieutenant sous les obus. Qu�est ce qui tombe ! Les FM ne marchent pas. J�essaie d�entrer en liaison avec la 2i�me section. Un poilu bless�, il a l��il enlev�, se fiche dans moi et me dit que les Allemands sont dans le boyau.

J�avance : personne. Ni Fran�ais ni Allemands.

J�arrive � la 2nde section. Une torpille �clate au-dessus de ma t�te. Je suis jet� � terre. Une pierre me coupe un peu l�oreille, la 2i�me n�a plus de grenades. Je reviens le dire au lieutenant.

Enfin vers 7h tout cesse. Mon escouade est d�membr�e. Trois bless�s assez gri�vement. Un disparu. (*)

Les Allemands ont laiss� un des leurs aux fils de fer. Ils n�ont pas pu l�emporter.

 

(*) : Le coup de main allemand fait 1 tu�, 10 bless�s et 12 disparus. Les faits et les causes de l�action allemande sont relat�s dans le JMO de la 156e division d�infanterie. Voir ici.

Le tu� est �MIE Andr� Joseph (sa fiche). 2 bless�s mourront ensuite : CHAMIGON Charles et SAGETTE Ferdinand.

9

Journ�e calme. L�ger bombardement.

Le soir l��quipement du disparu est retrouv�. Les Allemands ont laiss� une centaine de grenades, des b�rets, un revolver. Ils ont d� se retirer pr�cipitamment.

10

Nuit et journ�e calmes.

Il pleut.

11

Journ�e calme.

Alerte dans la nuit. Les Allemands coupent les fils de fer. Tir de grenades et de FM. La nourriture est insuffisante. Le ravitaillement n�arrive pas. Pour la 1i�re fois depuis Biklista, je re�ois du courrier. Les lettres se perdent beaucoup.

Tr�s froid. Impossible de se r�chauffer les pieds.

12

Nuit calme.

Pas d�rang�. Encore le m�me bruit dans la nuit. C�est la gel�e. Les fils de fer sont bien coup�s mais par nos grenades.

Depuis 4 jours je suis mouill�. J�ai r�ussi juste � me s�cher aujourd�hui. J�ai enlev� mon chandail et comme je n�en ai pas de rechange, je suis rest� sans chemise ni chandail. Vivement que la guerre finisse.

Je n�aurais jamais cru mener une pareille existence. Les pieds et le corps dans l�eau, plein de totos, rien � se mettre sous la dent et � peine de courrier.

13

Journ�e calme.

Beau temps. Froid. Re�u lettre de Suzanne. J�ai le cafard !!

14

Re�u colis de grand-m�re.

Pluie. La boue va recommencer. Un Allemand s�est rendu la nuit derni�re. Bombardement.

15

Nouveau coup de main allemand dans la nuit � 4h du matin. D�cidemment, ils veulent � toute force nous emmener � Berlin.

�a n�a rien � faire. Ils sont encore rest�s au fil de fer. Ils en ont coup� quelques m�tres. Mais j�ai eu un moment de trac. La mitrailleuse ne marche pas. Plus de grenades. Le lieutenant reste seul avec un poilu et moi. Il m�envoie en vitesse cherch� des grenades au PC du capitaine et tire des coups de fusil en hurlant comme un beau diable.

Arriv� au capitaine, on me dit de ne pas trop tirer l�-haut. Qu�il ne faut pas se presser ni s�affoler. Il n�y a plus de grenades. Ah ! Ils sont charmants ! Sentir les Allemands sur les fils de fer, pas de quoi les recevoir et pas s�affoler !

Je remonte avec une caisse de VB (*).

Autre histoire :

Tout le monde me fuit comme un pestif�r�. Ils ont peur qu�un obus tombe sur la caisse et qu�elle n��clate. Je reste seul � m��vertuer � l�ouvrir, me fourrant le plus possible dans le pare-�clat. Enfin un sergent vient m�aider et les VB partent.

Tout rentre dans le silence.

 

� 5h1/2, nouvelle alerte. Sans importance.

Journ�e froide et pluvieuse. Calme.

Tous mes anciens copains sont �vacu�s. Je reste seul. Mon tour va-t-il venir ?

 

(*) : Le syst�me VB (Viven Bessi�re) est un syst�me de lancement de grenade par fusil. Voir ici.

16

Nuit et journ�e calme. Suis toujours agent de liaison.

2i�me demande d�aspirant appuy�e par mon lieutenant. R�ussira-t-elle ? Pour le 11 f�vrier pas longtemps � attendre.

17

Nuit et journ�es calmes.

Les Allemands sont venus essayer de couper les fils de fer. On leur a flanqu� une charge sur la figure et ils sont partis.

J�ai fait avec mon lieutenant les plans des tranch�es et leur relev� exact. Le lieutenant est charmant pour moi. C�est un v�ritable camarade. Il sait que je suis �tudiant et nous sommes une paire d�amis. Je voudrais bien rester agent de liaison tant que nous serons en lignes.

Temps magnifique. Nourriture meilleure. Je mange mieux qu�� la section.

18

Journ�e calme.

Bombardement assez violent sur le soir. Ce matin en montant sur la tranch�e pour aller satisfaire un besoin pressant les bulgares m�ont tir� dessus. �tonnant de leur part.

19

Changeons de secteur. Appuyons un peu plus � droite.

Je retourne � ma section. Ce qui ne me plait gu�re. Il faut reprendre la garde.

20 Dimanche

Alerte dans la nuit. 6H30. Je tire quelques coups de fusil, je ne sais trop sur quoi.

Journ�e calme.

21 Lundi

Journ�e calme.

Temps magnifique.

22 Mardi

Toujours calme.

Brouillard. Je me prom�ne sur les parapets. Je trouve quelques grenades.

23 Mercredi

Bombardement assez violent dans l�apr�s-midi.

24 Jeudi

Calme.

L�ger bombardement.� Temps toujours tr�s beau.

25 Vendredi

Journ�e et nuit calmes.

26

Violent bombardement.

27 Dimanche

Journ�e calme. Temps beau mais un peu froid.

Le secteur de la section est rallong�. Je m�attends tous les jours � nous voir faire prisonniers. Nous ne sommes pas le 1/4 du monde n�cessaire. Si les Allemands tentent un coup de main un peu important, nous sommes flamb�s. Ma foi, j�irai faire un petit tour � Berlin.

La nourriture est bonne mais insuffisante. Courrier n�arrive pas.

Je crois que ma demande d�aspirant est dans le lac. Il y a d�j�� 10 jours. C�est un peu tard. Tant pis.

28 Lundi

Rien � signaler.

29 Mardi

Je pars comme observateur d�artillerie. Arriv� au colonel, on m�apprend que ma demande a r�ussi.

Je pars en France comme aspirant. J�arrive � la maison fronti�re. (*)

 

(*) : Maison fronti�re entre la Serbie et l�Albanie.

30

En arabas (*), � pied puis en auto jusqu�� Smrd�s.

 

(*) : Un araba est un v�hicule hippomobile sans caract�ristiques particuli�res, tract� par des chevaux ou des b�ufs, utilis� dans les pays du Moyen-Orient. Il est g�n�ralement lourd et sans ressorts, et souvent couvert.

31

G�novah (J�lova), Florina, Salonique.

Nous sommes deux du 176.

F�vrier - juillet 1918

1-2-3-4-5

D�part � Salonique.

Petite bombe avec les E A de L�A F O. (*)

Presque tous sergents ou caporaux-fourriers. Beaucoup de changement comme intellectualit� avec le 176.

 

(*) : �l�ves-Aspirants de l�Arm�e Fran�aise d�Orient.

6

D�part de Salonique. Serr�s comme des sardines.

Soupe � Larissa.

7

Arriv�s � Bralo.

D�part le soir m�me en camions. La route est meilleure qu�au d�part. Le moral est meilleur aussi ! Couchons sous les marabouts.

Avons pass� pr�s du temple de Delphes.

8 � 9

S�jour � It�a.

10

Embarquons sur le � Guichen ï¿½, croiseur dans le genre du � Jules Ferry ï¿½. Le convoi comprend aussi le � Team Gat �, bateau marchand.

Arrivons la nuit � Corfou o� nous faisons escale � cause des sous-marins.

Avons vu � It�a la tombe du lieutenant, commandant l�UC38, qui a coul� le Ch�teau-Renault. Il s�appelle Bock. (*)

Sous-marins.

 

(*) : Le 14 d�cembre 1917, en mer Ionienne, le � Ch�teau-Renault ï¿½ re�oit deux torpilles lanc�es par le sous-marin allemand UC 38. Les marins avaient tous �t� �vacu�s avant le naufrage.

11

Journ�e pass�e � bord du � Guichen ï¿½ en vue de Corfou.

D�part le soir. Nous devions �tre � St Cyr. L�ger retard.

12

Travers�e bonne. Temps admirable. Pas de sous-marin.

Je repars � 5h.

13

Journ�e pass�e en chemin de fer.

Bari, Foggia, le V�suve.

14

Civitavecchia, Rome et Livourne le lendemain � 4h du matin.

15

D�part de Livourne � 11h

16

Arriv�s au jour avant San R�mo, Vintimille. Bonjour aux annamites qui gardent la fronti�re.

17

Arriv�s � Marseille � 6h matin. Amerikan Park jusqu�� 9h. Fort St Jean.

Prends le train � 12h50. Express, �a me change.

18

D�raillement avant Tonnerre (Yonne). Changeons de train.

Arriv�e � Paris � 1h de l�apr�s-midi. Apprends les d�g�ts commis par le � Gothas �. (*)

 

(*) : Ce sont des avions allemands qui survole et bombardent Paris pour terroriser la capitale.

19

Repars pour St Cyr.

Arriv�e � 2h apr�s-midi. Exercice continu mais pas dur. Travail int�ressant. Nourriture bonne. Attends dimanche avec impatience.

Visite des Gothas sur Paris. Alerte dans la nuit du 8 au 9, 13 morts et une cinquantaine de bless�s.

Pas encore d�offensive au front fran�ais. La guerre avec le minist�re Cl�menceau est men�e vigoureusement. Des restrictions en quantit�. Pain rare. Plus de g�teaux ni bonbons ni cr�mes.

D�fection compl�te des Russes. Intervention probable du Japon. Roumanie �cras�e. On commence � voir un certain nombre de soldats am�ricains. Paris toujours tr�s anim� malgr� les Gothas.

12

Nouvelle visite des Gothas dans la nuit du 11 au 12. J�ignore encore le nombre de victimes. 14 escadrilles ce qui fait 60 gothas. 60 morts et quelques morts. 170 bless�s.

15 (mars)

L�usine d�explosifs de la Courneuve saute. (*)

 

(*) : L�usine de grenade a explos�e le 15 mars 1918.

22 mars

Visite des gothas en plein jour ce matin.

Alerte de 8h � 12h.

 

(*) : Une alerte a bien �t� d�clench�e � Paris vers 8h30 (les gothas allaient bombarder Compi�gne) mais le soir et non le jour : je n�ai pas retrouv� de raid gothas de jour sur Paris (voir Paris bombard� par zeppelins, gothas & berthas / Maurice Thi�ry | Gallica (bnf.fr). Ce n�est pas le 22 avril car pas de raid retrouv� ce jour et la � Bertha � �tait alors rest�e silencieuse (livre p197).

14 mai

D�part � Poitiers.

Je vais faire un stage de chef de section de mitrailleuse pour un mois. Tr�s bien log� et pas mal nourri. Libert� compl�te. La ville elle-m�me est jolie mais � province �. Les environs sont charmants. Les � Pictaviennes � sont charmantes mais ont peur des cancans.

Un canon � longue port�e a bombard� Paris pendant quelque temps mais est d�truit. Les gothas viennent de temps � autre. Nous avons �t� faire des man�uvres � Cernay. Coin charmant. Nous nous sommes pas mal amus�s.

L�existence est plus gaie comme E.O. (�l�ve-aspirant) qu�en Albanie.

 

Pas d��crit entre ces 2 dates. Roger MARCOUIRE devient caporal le 2 juin, puis sergent le 2 juillet.

22 juillet

Toujours � St Cyr.

Le cours se termine dans 13 jours. Je ne sais pas encore si je serai nomm� aspirant.

Trois grosses offensives boches qui avancent jusqu�� la Marne. Contre-offensive victorieuse de Foch qui les repousse vers le Nord. Canon et gothas bombardent toujours Paris de temps � autre.

Ao�t-d�cembre 1918

2 ao�t

Suis nomm� aspirant.

Pars en permission d�un mois. Vais tous les dimanches � Paris, reste la semaine � Sergine. Deux bombardements pendant ma permission. Offensive boche arr�t�e.

Il repart en Orient.

 

Repris Agde � la fin de ma permission. Sale patelin, je m�ennuie pendant 15 jours en compagnie de DEMONT.

D�part d�Agde avec un sergent armurier MARTINET. Arr�t � S�te, Tarascon, 3 jours � Marseille.

J�arrive � Puget � sec. 4 jours � Puget.

D�part du camp avec un convoi et 18 aspirants. Passage de la fronti�re le 20 septembre. Comme �a m�ennuie pas mal de suivre le train, je passe 2 heures � Cannes en compagnie d�un copain (aspirant GUILLEMAIN) et�nous ratons le train. Tr�s chic voyage.

Arr�t � Vintimille.

Tr�s bon restaurant. Bon repas. Jolies servantes, nuit encore meilleure.

D�part � 6 heures dans rapide G�nes. Journ�e pass�e � G�nes. Jolie ville, beau port. Reprenons le train. Arrivons � Livourne. Le convoi a quitt� cette ville la veille. Arriv�e � Naples. Quelques quartiers sont beaux. Presque toute la ville est pauvre et p�le.

Je me suis arr�t� �galement quelques heures � Rome. Malheureusement, je n�ai pas eu le temps de visiter la ville. Arriv�e � Tarente. Personne ne s�est aper�u de notre absence.

Nous embarquons le lendemain.

26-09-18

Sur � l�Amazone ï¿½, tr�s joli paquebot.

2 jours de travers�e. Beau temps. Nouba pendant tout le parcours.

Restons 2 jours � It�a. Prenons une barque, allons dans un petit patelin � c�t� pour y trouver une bo�te o� l�on s�amuse. Malheureusement, les renseignements �taient faux et c��tait un marchand de dentelles.

D�part d�It�a. Camions jusqu�� Bralo.

Jusqu�� Plati. De l� direction Vodena. Reste un mois � Vodena.

 

(*) : Les villes soulign�es sont visibles sur cette carte.

 

Suis nomm� adjudant de bataillon au bout de deux jours. Tr�s bonne popotte. Ville peu int�ressante.

Au bout de quelques temps, les noubas succ�dent aux noubas.

Suis affect� au 175 le 10 novembre. (*)

 

(*) : Selon sa fiche matriculaire, Roger MARCOUIRE est pass� au 175e r�giment d�infanterie le 24 octobre 1918.

 

Pars pour Monastir. Je dois rejoindre le r�giment qui est � Prilep.

Mais c�est trop loin. Je l�attends � Monastir. Deux ou trois bombes pendant ces quelques jours font passer le temps.

Le r�giment arrive � Monastir le 12. Suis affect� � la 11e Cie.

 

Quittons la ville le 18.

Prenons le train jusqu�� Verria. Voyage pas tr�s charmant. Tous les hommes sont saouls. Mon commandant de compagnie est parfaitement abruti. Faisons 15 km en pleine montagne. Je suis de garde de police.

Le capitaine fiche le camp et me dit de le rejoindre sans me donner d�indications.

� 9h du soir suis perdu en pleine montagne. Me dirige vers une lumi�re. Trouve un gardien de moutons qui me conduit vers Dolgeani (*) � Mes hommes n�en peuvent plus.

 

(*) : Pour info, Dolgeani est un peu � l�ouest de Verria.

 

Restons 15 jours � Dolgeani. M�y ennuie copieusement.

Le bataillon est dissout. Suis affect� � la 5�me, meilleure compagnie.

 

Restons 20 jours � Verria.

Partons pour Salonique et embarquons sur le � Dobroudja ï¿½ le 20. Un inf�me cargo.

Ai le mal de mer en passant au large de Lemnos � Les vagues passent par-dessus le pont. Travers�e des Dardanelles tr�s calme. Arr�t d�une journ�e devant Constantinople.

Visite la ville � tr�s jolie mais sale. Je me perds dans la ville en compagnie de quelques camarades et nous avons juste le temps le lendemain matin de sauter dans une barque de p�cheurs pour rejoindre le bateau.

25 d�cembre 1918

Pass� en mer. C�est le plus mauvais que j�ai pass� jusqu�� pr�sent. Mer un peu agit�e.

Arriv�e � S�bastopol le 27.

Sommes log�s aux casernes de la Marine. Jolie ville. Femmes charmantes. Jamais vu une ville aussi d�prav�e.

Sommes log�s en ville le 6. H�tel Roerberg, en plein centre.

Existence �patante. Le change est � 170 ce qui fait pas mal d�argent.

La vie est ch�re par exemple. Surtout les v�tements. 1500 roubles un costume, 300 roubles une paire de chaussures.

Faisons une bringue effr�n�e. Puis arr�t pendant quelque temps. Prend la garde � l�h�tel Rist. Tr�s jolies femmes. Ne couche jamais tout seul.

Le 29

Sale histoire.

Apr�s une soir�e rentre dans la chambre d�une copine, avec un camarade et une autre femme. Celles-ci un peu ivres touchent � mon browning et tirent un coup de revolver.

Branle-bas dans la maison. Nous sortons un voisin qui �tait venu voir. R�sultat la bonne femme est fichue � la porte.

1919

Le 10 f�vrier

Passe � la C.H.R. au S.R. du r�giment.

Loge au Grand-H�tel � Suis g�rant du foyer du soldat.

Existence calme. Nous nous endormons dans les d�lices de Capoue. Pendant ce temps les bolcheviks avancent.

 

(*) : CHR = Compagnie hors rang. SR = section de renseignements.

2 mars

Passe au S.R. de la brigade � Service int�ressant. Perquisitions � trouvons deux d�pots de munitions. Me voici devenu d�tective amateur � Prends les passeports.

15 avril

Alerte.

Les bolcheviks sont devant S�bastopol. Toutes les troupes remontent aux casernes. Une Cie et le S.R. restent dans la ville � l�h�tel Roergberg.

17

Les bolcheviks prennent le mamelon vert.

18

Nous leur reprenons.

La marine ex�cute un tir de barrage sur les lignes ennemies. Les bolcheviks ont 300 tu�s ou bless�s.

Vais faire le soir une perquisition. Je rencontre un lieutenant qui avait un poste pas loin.

Il vient avec moi. Nous trouvons une chique maison, de jolies femmes, pas d�armes. Ces dames nous offrent le th� et la nuit se finit fort agr�ablement.

 

(*) : La marine fran�aise d�fendait S�bastopol contre les bolcheviks (les rouges) qui attaquaient les � Blancs ï¿½

19 � 20 � 21

R�volte de la marine.

Les marins du � Vergniaud ï¿½, de la � France ï¿½ du � Jean-Bart ï¿½ et de la � Justice ï¿½, parcourent les rues de S�bastopol en chantant l�internationale et arborent le drapeau rouge sur les navires. Un comit� des marins s�installe � bord des navires.

Le mouvement ne durent heureusement que trois jours et tous rentre dans l�ordre. (*)

 

(*) : La mutinerie des marins fran�ais est peu connue. Pourtant elle a pr�cipit� le d�part des troupes fran�aises de Russie.

Le 19 avril 1919, les marins du b�timent de guerre � France ï¿½, ancr� pr�s du port de S�bastopol en Mer Noire, se sont r�volt�s contre des ordres de d�placer 700 tonnes de charbon durant le week-end de P�ques.

Le commandement fran�ais avait envoy� sur la c�te de la Crim�e une flotte dont les milliers de soldats et d'hommes d'�quipage �taient �puis�s par la guerre, certains �taient en service depuis 1915. L'objectif �tait d'apporter une aide mat�rielle et militaire aux arm�es blanches sous le commandement du g�n�ral Anton Denikine qui se battaient contre les bolcheviques. Cela a provoqu� un �norme m�contentement parmi les conscrits fran�ais, de janvier � avril, plusieurs unit�s fran�aises stationn�es dans le sud de l'Ukraine ont refus�es de combattre, et les blancs ont d� �vacuer Odessa.

Quand les marins du France ont re�u l'ordre de charger du charbon � la pelle, la discipline militaire �tait tr�s mauvaise dans toute la flotte. Quand les drapeaux ont �t� hiss�s le matin du 19 avril, une partie de l'�quipage a refus� de saluer. Puis des centaines de plus se sont rassembl�s sur le pont dans la matin�e pour demander un jour de cong�, et ils ont commenc�s � chanter l'hymne sociale, l'Internationale.

 

Bient�t les marins d'un autre navire de la flotte stationn� � proximit�, le � Jean-Bart ï¿½, se sont joints au chant.

Quand les officiers sont arriv�s sur le pont, et ont demand�s aux marins de se disperser, ils ont �t� accueillis par des moqueries et des menaces. Un officier a promis de transmettre les demandes des marins au capitaine. D'apr�s Andr� Marty, l'un des meneurs du mouvement en Mer Noire, les marins ont alors demand� � Qu'est-ce qu'on fait en Russie ? On ne veut pas se battre contre les ouvriers qui sont nos fr�res, on veut partir �, les marins du France ont envoy� une d�l�gation au Jean-Bart et ont demand� quelles �taient leurs demandes. Leur r�ponse fut � rentrer � Toulon ! Plus de guerre avec la Russie ! �

Malgr� un sermon de l'amiral de la flotte sur les m�faits du bolchevisme, les marins des deux navires ont d�barqu�s le lendemain, et ont rejoint une manifestation des ouvriers de S�bastopol contre la guerre. Des marins d'autres navires les ont rejoint �galement mais des soldats fran�ais et grecs stationn�s � proximit� ont ouvert le feu contre la manifestation, tuant et blessant des dizaines de personnes.

La flotte fran�aise a �clat� de col�re et des mutineries ont commenc� sur d'autres navires durant tout le mois qui a suivi. La pr�sence fran�aise en Mer Noire est devenue impossible � maintenir pour l'arm�e et la flotte a d� rentrer en France en mai.

 

Le m�contentement des mutins trouvait sa source dans les rations r�duites, la d�livrance hasardeuse des courriers, le manque d'autorisations de descendre � terre, et la brutalit� de la discipline impos�e par les officiers. Mais c'�tait en particulier l'engagement d'une nouvelle guerre qui les a radicalis�s. La propagande bolchevique a jou� un r�le crucial dans la mutinerie. Les bolcheviques ont �dit� un journal en fran�ais intitul� Le Communiste qui reprenait les demandes des marins et les informait sur l'objectif des bolcheviques d'une r�volution mondiale.

(Article paru en anglais le 16 avril 2019).

 

Voir ici

22

Armistice conclu avec les bolcheviks pour 8 jours.

Un gouvernement des soviets s�installe dans la ville � Le drapeau rouge flotte sur l�ancien h�tel Ranine.

Continuons � donner des passeports. Un d�l�gu� des Soviets vient me demander de ne pas en donner. Je le menace de le faire mettre en prison.

Fait connaissance Madame KALEDINE. C�est le chef du parti bolchevik de la r�gion. Tr�s jolie femme.

23

Perquisitionne dans 20 maisons de la Rarabelnaya. Faubourgs de S�bastopol.

Trouve un peu de tout. Des fusils fran�ais, russes ou japonais, des bandes de mitrailleuses, des bombes et une maison o� nous trouvons --- une quinzaine de femmes nues qui nous invitent � entrer.

Malheureusement elles sont d�une salet� repoussante.

24

Perquisition dans l�imprimerie du Volnei Youg. Trouvons des tracts pr�ts � �tre distribu�s aux matelots. Emboitons l�imprimeur, sabotons les machines, puis nous mettons tous les casiers au milieu de l�imprimerie.

25

Repartis en auto avec une interpr�te � l�imprimerie pour y mettre les scell�s.

Je suis remarqu� et le lendemain, ces messieurs du C. des S. (*) m�envoient une lettre de menaces.

Ils ont de la veine qu�on n�y soit pas rest� plus longtemps. Je leur en aurais foutu des menaces.

 

(*) : Comit� des Soviets

26,27 et 28

Rien de marquant.

Distribue les derniers passeports et derni�re vengeance, me paie la femme du maire pendant ces trois nuits.

29

Les troupes alli�es quittent S�bastopol. Tout se passe tr�s bien.

J�embarque sur le � Rodosto �. Je n�ai jamais vu un si grand nombre de navires. 6 gros fran�ais � 2 cuirass�s et 2 destroyers anglais, un cuirass� am�ricain et 1 grec, 1 cuirass� russe men� par les Anglais. Une quinzaine de torpilleurs ou contre-torpilleurs, cinq sous-marins, 14 transports de troupes et 2 navires h�pitaux fran�ais et un russe.

J�ai oubli� de dire dans la nuit du 16, les Bolcheviks avaient plac� 5 bombes sur le navire h�pital. Il y eut une vingtaine de morts et 80 ou 100 bless�s.

Du � Rodosto �, nous voyons les Bolcheviks p�n�trer dans la ville. J�ai mal au c�ur d��tre oblig� d�abandonner la ville � ces gens-l�. Enfin, il para�t d�apr�s les derniers tuyaux que ce ne sont plus les pillards du d�but. Peut-�tre vont-ils finir par donner � la Russie un gouvernement stable.

 

Les troupes �vacuant S�bastopol �taient les suivantes : 1 r�giment fran�ais, 2 bataillons indig�nes, deux r�giments grecs et un bataillon tch�coslovaque. Comme artillerie un r�giment fran�ais.

Une partie des cuirass�s reste encore quelques jours pour finir la r�paration du � Mirabeau ï¿½.

Le change �tait mont� � 1000 � la fin de l�occupation.

 

Deux jours de travers�e, mer calme. Nous d�barquons � Constantza, ville peu int�ressante. La monnaie change.

Apr�s les roubles, ce sont les leis.

 

 

Carte de situation des villes cit�es

 

 

R�embarquons le 3 mai sur le � Sadko �. Nous remontons les rives fleuries du Danube. Elles sont bien laides. Peut-�tre est-il plus beau du c�t� de Vienne ? 24 heures de voyage. Arrivons � Galatz. 2 jours encore pass�s.

Ville gu�re plus int�ressante que Constantza. Prenons le train le 7. Restons deux jours en chemin de fer. Pas de ville importante.

P�n�trons en Russie � R�ni.

 

Voyageons 24 heures en Bessarabie. Descendons le 9 � Passarewka, petit patelin � une vingtaine de kilom�tres du Nuiester.

10 mai

Nous nous installons � Masnnburg, colonie form�e enti�rement d��migrants allemands. Cette existence tranquille va me reposer de l�agitation des jours pr�c�dents. Passe au bout de quelques jours secr�taire du colonel. Je deviens un enrag� du football. C�est notre seule distraction avec l�harmonium. Il y en a un dans toutes les maisons.

Le 176 et le 1er RMA (*) sont � Akkerman sur les bords du Dniester (**) et sont en contact avec les Bolcheviks. C��tait bien la peine de faire un tout pareil pour revenir � 70 km d�Odessa. Je suis propos� pour une d�coration roumaine. J�ai oubli� de dire que j�ai une proposition de S/lieutenant depuis le 26 avril. Je re�ois peu de lettres de la maison pendant ce laps de temps. Ai re�u 20f de Suzanne.

 

(*) : 1e r�giment de marche alg�rien

(**) : Voir la carte.

10 mai au 1er juin 1919

Pas d��v�nements notoires, si ce n�est la dissolution d�un bataillon. Le r�giment est r�duit � l��tat de squelette. Il est compos� actuellement d�environ 400 hommes. Le 176 et le 1er RMA sont dans le m�me cas. Le r�giment va �tre dissout ces temps-ci. Je ne sais pas ce que je vais devenir.

Peut-�tre tirailleur alg�rien ? Quelle dr�le de t�te j�aurais sous la chechia.

8 juin

Le 175 est dissous.

Il est transform� en r�giment de marche m�tropolitain (RMM) et la 156e� division d�infanterie en division coloniale. (*)

On parle de repartir vers, encore une fois, destination inconnue � Buda-Pest ou ????

 

(*) : C�est exact. Voir ici.

1er juillet

RMM dissout transform� en bataillon de marche du 4�me zouaves. Nous portons une chechia et le costume kaki.

14 juillet

Morne. Rien d�extraordinaire.

17 juillet

D�part pour Varna (Bulgarie) par chemin de fer.

23 juillet

Arriv�e � Djudjulesti (*). Restons 2 jours.

 

(*) : Pour info Djudjulesti est au confluent du Prout avec le Danube ~15km � l�est de Galatz.

26

D�part � 4 heures du matin � pieds pour Galatz.

Arrivons � 2 heures de l�apr�s-midi. Ville assez gentille. Quelques maisons d�truites par les Allemands. Devons repartir dans quelques jours en direction Razgrad.

2�me proposition S/lieutenant partie le 24. Vais probablement me faire rapatrier en ao�t.

Beaucoup de travail actuellement.

Restons � Galatz jusqu�au 2 ao�t.

2 ao�t

D�part pour Reni � pieds. Sommes assez mal log�s. Ne trouvons que de l�eau sal�e. Restons jusqu�au 4 � Reni.

4

Embarquement � bord d�une p�niche. Nous devons remonter le Danube jusqu�� Rouchtchouk

5

Partons remorqu�s par un remorqueur. Allure moyenne� 5km � l�heure.

Nous allons pouvoir examiner les rives � loisir.

6

Le fleuve est tr�s joli. Extr�mement large. 2km en moyenne. Fort courant.

Passons � Tsernavoda � 1er pont sur le Danube.

 

(*) : � l��poque c�est le premier pont avant la mer. Il �tait ferroviaire. Il est toujours ferroviaire, mais c�est le second de nos jours. Voir.

7

Toujours navigation tranquille. Sommes mang�s par les moustiques. Nous logeons � fond de cale. Impossible de manger sans �tre piqu�.

Sur le soir, il pleut. Tous les moustiques rentrent � l�int�rieur. C�est intenable. Tout le monde remonte sur le pont. Puis nous faisons br�ler des vieux chiffons et du foin mouill�.

Au bout de deux heures, nous pouvons enfin rentrer et dormir � peu pr�s tranquilles. Il reste bien encore les puces mais il ne faut pas �tre trop difficile.

8

Voyage toujours tranquille. Passons � Silistrie.

9 et 10

Aucun incident.

11 ao�t

Arrivons � Rouchtchouk. Ville assez jolie. La vie y est ch�re.

Seulement le change �tant � 400, nous pouvons nous en tirer.

12

Les d�mobilisables des classes 13, 14 et 15 quittent Rouchtchouk pour la France. Mon tour va venir d�ici quelques jours. Le R.M.M est dissout. Le reste du r�giment va passer au 14�me R.T.A, les d�mobilisables partis.

13

Beaucoup de travail au bureau. Je ne puis sortir.

14

Sans changement.

15 � 16 � 17 � 18

Sans changement. Rouchtchouk est une ville assez gentille, mais sans amusement.

19

D�part de Rouchtchouk comme d�mobilisable en direction Varna. RMM dissout.

20

Arriv�e � Varna. Voyage sans incident.

 

Voir la carte de son p�riple sur le Danube.

21

Visite Varna. Ville gentille.

Les Fran�ais ne sont pas aim�s. Esp�re partir en direction de Constantinople le 23 sur le � Tigre ï¿½.

22

Sans changement. Sais prendre des bains de mer. Le temps est splendide. J�esp�re aussi ce temps pour la travers�e.

23

Embarquons sur le � Tigre �, bateau moyen. Suis log� dans une cabine de 1�re cl. Nourriture passable. Confort pas moderne. D�part � 16 heures de Varna.

24

Arrivons � Constantinople.

D�barquons � 14 heures.

Rembarquons sur le � Tigre ï¿½ imm�diatement. Une �pid�mie de chol�ra s�vissant, il est d�fendu de d�barquer.

25

Restons en rade. Le bateau fait du charbon et embarque des vivres et de l�eau pour 8 jours. Partons le soir � 20 heures en direction Marseille.

Beau temps, tr�s chaud, mer calme. Passons au large des �les ioniennes.

26

Mer calme. Temps splendide.

27

Doublons le cap Matafan � 11 heures. Piquons droit sur le d�troit de Messine � 2 heures. N�apercevons plus une terre.

Bateau marche r�guli�rement. Pensons arriver � Marseille vers samedi.

28

Mer d�serte.

Atteignons le d�troit de Messine � 16 heures. Traversons le d�troit sans nous arr�ter. Apercevons l�Etna environn� d�un nuage de fum�e.

Passons devant le Stromboli vers 10 h. Le crat�re est en flammes. L�effet sur la mer est tr�s joli.

29

Marchons toute la journ�e sans apercevoir aucune terre. Mer toujours calme.

Temps tr�s chaud.

 

�Fin des �crits

 

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