�tudiant de l�Ath�n�e de Li�ge, o� il suit des
humanit�s gr�co-latines, Fran�ois Perin d�vore de nombreux ouvrages de
litt�rature et d�veloppe un esprit anti-belge qui ne le quittera pas.
Produit de l�enseignement officiel, comme il aime � se pr�senter, il
�tudie le droit � l�Universit� de Li�ge lorsque la Seconde Guerre mondiale
�clate. Il se souvient que, dans les derni�res ann�es de ses humanit�s
(1937-1938), il fait partie d�un groupe d��tudiants form� spontan�ment sous
le nom de Cercle 40, l�ann�e 40 devant �tre le moment de leur acc�s �
l��ge adulte. Au cours des nombreux d�bats organis�s par le Cercle, naquit
le constat que la Belgique �tait une stupidit� historique, qu�elle �tait
donc grotesque, vulgaire, moralement basse, inculte, ridicule, m�pris�e et
m�prisable. Lorsque la guerre �clate, il se retrouve en France, en tant
que soldat sursitaire. Mais la guerre se termina avant que nous ayons eu
le temps de la faire (Wallonie libre, 15 juin 1990). Membre de
Wallonie libre d�s 1942 et surtout de la section Jeune Wallonie, il rejoint
les Lyc�ens wallons (septembre 1943) qui se transforment alors en Jeunesses
estudiantines wallonnes, mouvement wallon pluraliste, affili� � la Wallonie
libre. Outre une action par la presse clandestine, il collabore au journal
du mouvement ; Fran�ois Perin fait partie de Jeune Wallonie. J�avais 20
ans en 1941, durant la Seconde Guerre mondiale et c�est � ce moment-l� que
je suis devenu socialiste par haine du fascisme. Sur le plan wallon nous,
jeunes, nous avions r�pondu � l�appel du 18 juin du g�n�ral de Gaulle avec
l�organisation clandestine Wallonie libre. Plus tard, ce sont les rencontres
avec le groupe Esprit, fr�quent� par des amis de l�ULB et de l�UCL
qui m�ont influenc� (Le Soir, 15 juin 1974). D�but 1944, il entre
en contact avec le parti socialiste et en devient membre. Apr�s la
Lib�ration, il participe � une intense campagne de propagande (par
conf�rences, meetings, d�bats, organisation de bals et placardage
d�affiches), notamment en faveur de l�abdication de L�opold III. Il
participe aussi � la pr�paration du congr�s national wallon des 20 et 21
octobre 1945. � ce congr�s, Fran�ois Perin ne peut pas �tre pr�sent :
malade, il a d� partir en convalescence en Suisse. Pour la m�me raison � son
�tat de sant� �, c�est en 1946 que Fran�ois Perin ach�ve ses �tudes de droit
� l�Universit� de Li�ge. Stagiaire au minist�re de l�Int�rieur d�s la fin de
son doctorat, il entre au Conseil d��tat, comme substitut (1948). Assistant
� temps partiel de Walter Ganshof van der Meersch, professeur de droit
public � l�Universit� libre de Bruxelles (1954), chef de Cabinet adjoint
aupr�s du ministre de l�Int�rieur Pierre Vermeylen (1954), charg� du cours
de droit constitutionnel � l�Universit� de Li�ge (1958), il est mis en
disponibilit�, � sa demande, par le Conseil d��tat en 1961. Ce haut
fonctionnaire de l��tat est ainsi d�li� de son devoir de r�serve. Il devient
professeur ordinaire en 1968.
Depuis 1954, il participe avec Jean Ladri�re,
Marcel Liebman, Jules G�rard Libois, Yves de Wasseige, Ernest Glinne et
Jacques Yerna, aux discussions et rencontres du groupe Esprit qui, en
1958, donne naissance au CRISP. Membre actif du journal La Gauche, il
y c�toie Jacques Yerna, Freddy Terwagne et Andr� Renard. Avec ces deux
derniers, il se trouve � la base de la cr�ation du Mouvement populaire
wallon, n� au lendemain des gr�ves contre la Loi unique (1960-1961). Avec
Fernand Dehousse, il est rapporteur de la commission politique du congr�s du
Mouvement populaire wallon (novembre 1961) : leur projet pr�voit un
f�d�ralisme � trois o� chaque r�gion dispose d�une Assembl�e nationale �lue
au suffrage universel direct et au scrutin proportionnel, ainsi que d�un
Ex�cutif coll�gial responsable devant la seule Assembl�e. L��tat central ne
conserve que certaines comp�tences sur la r�gion o� est situ�e la capitale
f�d�rale ; le projet pr�voit aussi un Conseil �conomique et social r�gional
qui disposera de r�els pouvoirs. Le referendum d�initiative populaire
est enfin inscrit dans le projet. � la tribune du congr�s constitutif du
Mouvement populaire wallon, Fran�ois Perin pr�vient que la monarchie doit
rester en dehors du d�bat sur le f�d�ralisme. Ne r�sistant pas � l�envie
d�ironiser sur la disparition prochaine des monarchies europ�ennes (Un
souverain d�chu a dit un jour qu�en l�an 2000, il n�y aurait plus que cinq
monarques : le roi de C�ur, le roi de Tr�fle, le roi de Carreau, le roi de
Pique et le roi d�Angleterre. Le roi des Belges n��tait pas mentionn�. Je
m��tonnerais qu�il ne soit pas bient�t mis en disponibilit�, avec pension,
pour suppression d�emploi). Cette philippique provoque les
applaudissements des congressistes mais la r�action n�gative d�Andr� Renard
et de Fernand Dehousse. Apr�s que le second s�est d�solidaris� de Fran�ois
Perin, Andr� Renard souligne que Perin n�a engag� que lui-m�me, qu�il peut
se faire �lire � la pr�sidence si telles sont les conclusions du congr�s,
mais Ce n�est pas avec des paroles prononc�es dans des moments de passion
que nous sauverons la situation. Des discours, nous en avons assez entendus
pendant des ann�es. Ce qui compte aujourd�hui, c�est l�action. L�incident
�tait clos.
Membre du bureau du MPW, il est l�un des
principaux responsables de la doctrine du mouvement. En 1962, il publie
La Belgique au d�fi, livre dans lequel il analyse de fa�on pr�cise la
situation interne de la Belgique, dresse la gen�se de deux peuples et, sur
base de donn�es statistiques �conomiques, sociales et d�mographiques de la
crise wallonne, en conclut que seul f�d�ralisme et r�formes de structure
peuvent apporter un rem�de � la Belgique. Fid�le aux deux revendications
majeures que sont le f�d�ralisme et les r�formes de structure (adopt�es par
le PSB en 1959, 1960, 1961 et 1962), il n�h�site pas � d�noncer les prises
de position du PSB qui s�en �cartent progressivement.
Membre de la Commission politique et de la
Commission des r�solutions du Congr�s d�Action wallonne (Namur, 1963), le
juriste Fran�ois Perin explique � la tribune comment permettre au peuple de
proc�der lui-m�me � une r�vision constitutionnelle (r�vision de l�article 31
de la Constitution). Il d�fend l�id�e f�d�raliste et de l��tablissement d�un
nouveau pacte constitutionnel reconnaissant en Belgique l�existence de deux
communaut�s �gales en droit. Il r�clame une plus grande initiative pour les
parlementaires, l�introduction du principe du referendum et la
constitution d�une assembl�e wallonne ; il s�oppose � la fixation de la
fronti�re linguistique et � l�adaptation des si�ges parlementaires au
chiffre de la population sans mesure sp�cifique en faveur de la Wallonie.
L�id�e du referendum sera reprise par le Coll�ge ex�cutif de
Wallonie, o� Fran�ois Perin repr�sente le MPW, lors du p�titionnement de
l�automne 1963 : 645.499 signatures seront r�colt�es en faveur d�un mode de
consultation populaire directe.
Faisant suite � l�adoption par le Parti
socialiste belge d�une motion d�incompatibilit� de double appartenance au
MPW et au PSB, Fran�ois Perin poursuit son combat pour le f�d�ralisme en
dehors du PSB non sans avoir lanc� un dernier pav� dans la mare socialiste
lors du congr�s des 16 et 17 novembre 1963. � la tribune, il affirme aux
dirigeants socialistes que le nationalisme wallon n�existe pas, pas plus que
la culture ou la nation wallonnes. Conspu� par la salle, il d�fend le
f�d�ralisme comme seule solution au mal belge et pr�conise le r�f�rendum
comme moyen de rencontrer le choix des gens.
Pendant quelques mois, Fran�ois Perin tente de
convaincre le Mouvement populaire wallon de se transformer en un parti
politique travailliste wallon. Face au refus d�Andr� Genot, notamment,
Fran�ois Perin constitue, avec d�autres militants MPW, le Parti wallon des
Travailleurs (1964), sur les listes duquel il est �lu d�put� en 1965. Avec
Robert Moreau � Charleroi, Fran�ois Perin devient ainsi le premier
parlementaire �lu sur une liste exclusivement wallonne. Par la suite, dans
le souci de rassembler les forces wallonnes, le PWT fusionne avec le Front
wallon de Robert Moreau et devient le Parti wallon, dont le programme repose
sur quatre revendications : f�d�ralisme, r�formes de structure, r�f�rendum,
retour des Fourons � Li�ge. En juin 1965, lors du congr�s de fusion du PWT
et du FW, Fran�ois Perin est d�sign� comme pr�sident du nouveau parti. �
cette occasion, il est charg� de la r�daction du programme �conomique et
social. Ce rapport s�articule autour de plusieurs axes essentiels :
planification et r�formes de structure (les pouvoirs publics wallons doivent
pouvoir exercer une v�ritable politique �conomique) ; action r�solue pour
moderniser l�agriculture et la d�gager de l�emprise du Boerenbond ;
politique d�mographique r�solument ouverte sur l�immigration et qui conduit
� la r�organisation en profondeur de la scolarit� ; r�forme de la s�curit�
sociale ; r�forme fiscale et salariale ; r�duction du temps de travail ;
suppression du service militaire obligatoire ; r�duction du budget de la
gendarmerie et extension de la s�curit� sociale aux ind�pendants... Pour
Fran�ois Perin, la prise de conscience ethnique doit s�accompagner d�une
prise de conscience �conomique et sociale. N�appr�ciant pas la
d�mocratie au deuxi�me degr�, il pr�f�re l��lection d�un Parlement wallon et
d�un Parlement flamand au suffrage universel direct, dans un syst�me o� il y
aurait moins de ministres et de parlementaires. D�s cette �poque, la qualit�
du travail parlementaire de Fran�ois Perin ne manque pas d��tre soulign�e
par l�ensemble des commentateurs politiques.
Apr�s les �v�nements de Louvain, le Parti
wallon se transforme en Rassemblement wallon, accueillant des catholiques
d��us par l�attitude du Parti social chr�tien. Entour� de Marcel Thiry et de
Jean Duvieusart, Fran�ois Perin pr�side ce nouveau parti wallon et en
devient un des repr�sentants � la Chambre (31 mars 1968), confirmant ainsi
son �lection de 1965. Son r�le dans les discussions conduisant � la r�forme
de l��tat de d�cembre 1970 est consid�rable. Au sein de la Commission des
XXVIII, il apporte un programme clair tenant en quelques lignes
directrices : reconnaissance parall�le de l�autonomie des communaut�s
(culture) et des r�gions (�conomie et social), attribution de comp�tences et
de r�els pouvoirs � ces entit�s f�d�r�es, consultation des populations sur
le trac� des limites territoriales. La Libre Belgique titrera F.
Perin conduit le bal. S�il n�obtient que des satisfactions partielles,
elles sont n�anmoins fort importantes pour la Wallonie, apr�s l�apport de
voix lib�rales wallonnes au projet gouvernemental. En ayant fait admettre
que les r�gions devaient disposer d�une dimension politique, Fran�ois Perin
peut �tre consid�r� comme un des p�res du fameux article 107 quater et des
institutions r�gionales.
Le Rassemblement wallon que pr�side Fran�ois
Perin ne d�veloppe pas que des positions d�ordre institutionnel. C�est la
vie de la cit� dans son ensemble qu�ambitionne de changer le parti wallon.
Ainsi en 1970, Fran�ois Perin propose-t-il la cr�ation de nombreux Conseils
de consommation afin d��laborer une politique saine et r�aliste des prix. De
m�me, en 1971, Fran�ois Perin sugg�re de faire inscrire dans la Constitution
le droit � un environnement non polluant parmi les droits �conomiques et
sociaux.
En pr�nant une nouvelle voie, celle du
f�d�ralisme int�gral, Fran�ois Perin souhaite faire une synth�se de la
substance positive du socialisme, du lib�ralisme et du christianisme ;
davantage que contre les autres, c�est un combat contre eux-m�mes que les
Wallons doivent mener sur le chemin de la lib�ration. Fran�ois Perin d�nonce
la scl�rose qui emprisonne la soci�t� wallonne. L�autonomie � qui peut
s�appliquer � de nombreux aspects de la vie � est une lib�ration mais aussi
un moyen de se mettre soi-m�me au pied du mur. La soci�t� que nous
voulons, faite d��tre libres et divers, de communaut�s multiples, autonomes
et associ�es, c�est la soci�t� f�d�raliste. Elle est possible dans l�Europe
occidentale enti�re du Cap Nord � Gibraltar (Forces wallonnes,
13 mars 1971). L�influence de Denis de Rougemont, de Jean Monnet, du
personnalisme et du f�d�ralisme d�Alexandre Marc est �vidente chez un
Fran�ois Perin qui rencontra pour la premi�re Guy H�raud et ses id�es lors
d�un colloque en 1964.
Parti d�opposition, le RW se montre
constructif. Soucieux d�atteindre ses objectifs, Fran�ois Perin n�h�site �
proposer des moyens et des sch�mas � la majorit� en place. Ainsi, �
l�automne 1972, trace-t-il le canevas d�une n�gociation de communaut� �
communaut� afin que se concr�tisent les principes contenus dans l�article
107 quater ; plus pr�cis�ment, il souhaite simplifier le syst�me
tortueux issu de la r�forme de 1970. Dans ses priorit�s, il inscrit le
retour de Fourons � la province de Li�ge, la dotation de l��ducation aux
Conseils culturels, la d�limitation de la r�gion bruxelloise, l�octroi de
r�els pouvoirs (l�gislatif, ex�cutif, financier, comp�tences) aux entit�s
f�d�r�es. Quant aux structures p�rim�es (la province de Brabant par
exemple), elles doivent �tre supprim�es. Et Fran�ois Perin de souligner que
l�ensemble des changements devra faire l�objet d�une consultation des
populations. Au moment de la pr�sentation du gouvernement tripartite conduit
par Edmond Leburton (1973), Fran�ois Perin d�nonce la faiblesse du projet de
r�gionalisation et propose un contre-programme : limitation du nombre de
ministres � douze, mesures pour am�liorer le travail parlementaire,
�tablissement d�un syst�me scolaire pluraliste, r�gionalisation v�ritable et
totale �tablissant une proc�dure pr�-f�d�rale.
M�me si les �lections du 10 mars 1974 ne
permettent pas � la f�d�ration FDF-RW de confirmer sa progression
victorieuse, le RW accepte l�invitation � participer aux discussions de
Steenokkerzeel (19 avril 1974). N�gociateur pour son parti, Fran�ois Perin
est heureux d�engranger des avanc�es significatives pour la Wallonie. Outre
une s�rie de comp�tences conforme aux souhaits du RW, Fran�ois Perin obtient
la reconnaissance de Conseils et d�Ex�cutifs r�gionaux. Pour le pr�sident du
RW, le choix des s�nateurs pour composer les Conseils r�gionaux n�entra�nera
pas de nouveaux mandats et pourrait conduire � la r�forme du S�nat en une
Chambre des R�gions. Souhaitant poursuivre les n�gociations de communaut� �
communaut�, le RW apportera tout d�abord un soutien passif au gouvernement
minoritaire de L�o Tindemans. Soucieux de conserver la solidarit�
Wallonie-Bruxelles mais en m�me temps d�engranger des avanc�es pour la
Wallonie, le RW et lui seul accepte de renforcer le gouvernement de sa
pr�sence en m�me temps qu�est vot�e � la majorit� simple le projet
provisoire de r�gionalisation ; il est pr�vu que, dans un second temps, la
n�gociation de communaut� � communaut� devra se poursuivre pour chercher un
accord sur Bruxelles avant que, d�s l�automne, le gouvernement ne s�ouvre au
FDF et � la VU, apr�s le vote du projet d�finitif (application du 107
quater qui requiert la majorit� des deux tiers).
Durant cette phase de n�gociation, Fran�ois
Perin accepte d�abandonner l�id�e d�une consultation des populations de
Bruxelles pour d�finir ses limites territoriales. Cependant, avec Ch-F.
Nothomb, il propose le statu quo pour les six communes � facilit�s et
en m�me temps de doter les francophones des autres communes jouxtant les 19
communes de Bruxelles-Capitale d�un statut individuel leur permettant de
s�inscrire dans l�une de celles-ci afin d�y exercer leurs droits essentiels
et d�y �tre trait�s en langue fran�aise, notamment en mati�re judiciaire,
sociale et administrative (ce syst�me sera connu sous le nom de Droit
d�inscription).
Tentant l�exp�rience gouvernementale afin
d�approfondir le processus de la r�gionalisation, Fran�ois Perin devient
ministre de la R�forme des Institutions (10 juin 1974-1976), tandis que
Robert Moreau assure la pr�sidence int�rimaire du parti. Au gouvernement,
Fran�ois Perin tente de mettre en application l�article 107 quater. Vot�e en
juillet 1974, la loi Perin-Vandekerckhove � tous les deux ministres de la
R�forme des Institutions � cr�e des institutions r�gionales provisoires. En
octobre 1974, Fran�ois Perin fait ainsi partie du tout premier comit�
minist�riel r�gional pour la Wallonie (octobre 1974), sorte de premier
ex�cutif wallon officiel. Pendant la dur�e de son mandat minist�riel,
Fran�ois Perin entretiendra un mutisme qui d�sar�onnera les militants de son
parti. Je ne peux exercer � la fois un r�le de ministre et un r�le de
pr�sident de parti. Je dois loyaut� � l��quipe minist�rielle (1975).
L��cart va cependant se creuser entre nombre de
militants et le ministre : l�achat des F16 au lieu des Mirage fran�ais ; le
projet pr�paratoire de r�formes institutionnelles, la rupture de
subsidiation des �coles fran�aises de Fourons provoquent de vifs remous au
sein du Rassemblement wallon. En remettant un Rapport politique au
Premier ministre (26 mars 1976) dans lequel il fait le bilan de la
r�gionalisation pr�paratoire et propose de nouvelles pistes, Fran�ois Perin
tente de donner une nouvelle impulsion au processus de r�forme
institutionnelle : il propose notamment de superposer les institutions
culturelles et r�gionales, de maintenir les Ex�cutifs r�gionaux pendant
quelques ann�es encore au sein du gouvernement central et de donner un
statut particulier � � d�finir � � Bruxelles ; Perin propose la suppression
de l�agglom�ration et la fusion des 19 communes bruxelloises (par la suite,
dans les ann�es 1980, il �mettra l�id�e de faire de Bruxelles un district
europ�en). Il estime aussi indispensable d��laborer une proc�dure �lectorale
garantissant une repr�sentation propre aux deux communaut�s linguistiques.
N�ayant pas �t� soumis pr�alablement � l�aval de son parti, ce Rapport
politique va faire �clater publiquement le conflit larv� qui minait le RW
depuis son entr�e au gouvernement. Convaincu du succ�s de sa politique (le
bureau du PSB pr�sente un document de travail sur la r�gionalisation
d�finitive le 8 juin 1976), Fran�ois Perin se heurte � un mur
d�incompr�hension du c�t� des militants du RW. Il est vrai aussi que le
Fran�ois Perin volubile et parfois arrogant lorsqu�il �tait pr�sident de
parti a fait place � un Fran�ois Perin taiseux et discret lorsqu�il est
devenu ministre.
Durant la m�me p�riode, Fran�ois Perin est en
contact avec le PSC ; en juillet, avec Jean Gol et �tienne Knoops notamment,
il constitue le groupe CR�ER, club de r�flexion centriste. L��chec �lectoral
du Rassemblement wallon aux communales de 1976 pr�cipite les �v�nements.
Apr�s l��chec d�un rapprochement avec le PSC et dans la mesure o� il se
trouve en d�saccord avec le Manifeste politique du pr�sident Gendebien,
Fran�ois Perin opte pour un rapprochement avec l�aile wallonne du PLP ;
ayant abandonn� la voie du f�d�ralisme int�gral, il quitte le RW, dynamise
l�ancien parti lib�ral et lui donne une coloration wallonne. La formation du
Parti pour les R�formes et la Libert� de Wallonie est annonc�e le 24
novembre 1976. Fran�ois Perin d�missionne de sa charge minist�rielle en
d�cembre.
Membre-fondateur du PRLw o� il a souhait� avoir
la caution des sages Jean Rey et Robert Henrion, Fran�ois Perin poursuit
toujours le m�me objectif : contribuer � la transformation de l��tat belge.
Il se refuse � tout n�gativisme st�rile et n�h�site pas, loin de la
discipline de parti, � soutenir tout projet qui lui para�t bon, quels qu�en
soient les auteurs (bien que dans l�opposition, il s�abstient lors du vote
au S�nat du pacte d�Egmont). Au sein du PRLw, Fran�ois Perin se sent
cependant mal � l�aise. Ses contacts avec Jean Gol se d�t�riorent ;
l��lectoralisme du parti ne lui pla�t pas, la pr�sence de Luc Beyer de Rijke,
notamment sur les listes europ�ennes, encore moins. Au moment des
n�gociations du Stuyvenberg, il se r�jouira de voir le FDF reprendre le
principe du Droit d�inscription, que le parti bruxellois avait rejet�
quelques ann�es plus t�t, et pr�nera le r�f�rendum d�autod�termination pour
les populations des communes bruxelloises ou proches de la fronti�re
linguistique. Entre le FDF et Fran�ois Perin, les relations seront toujours
tr�s tendues.
Pr�sent comme dernier suppl�ant aux premi�res
�lections europ�ennes au suffrage universel (1979), �lu par cooptation puis
directement au S�nat, il est chef de groupe de son parti lorsqu�il d�cide de
quitter d�finitivement l�h�micycle parlementaire avec fracas, le 26 mars
1980 : en pleine discussion sur le projet de r�gionalisation, il donne sa
d�mission d��lu de la nation, disant ne pouvoir rester le repr�sentant d�un
�tat auquel il ne croit plus et d�une nation qui n�existe plus. La
Belgique est malade (...) du nationalisme flamand, (...) de la
particratie et (...) des groupes syndicaux de toutes natures. Le
seul pr�c�dent avait �t� cr�� en 1839 lorsque Alexandre Gendebien
d�missionna pour marquer son d�saccord sur l�abandon de territoires belges
aux Pays-Bas. Cinq ans plus tard, c�est-�-dire le 12 juin 1985, Fran�ois
Perin d�missionne du PRL dont il ne peut, dit-il, supporter la
politique conservatrice, et avec lequel il ne partage pas la m�me vision
du f�d�ralisme europ�en.
Puissant penseur et orateur brillant, Fran�ois
Perin n�a cess� de clamer que la Belgique n�a plus de raison d��tre. Au
printemps 1982, alors que la crise sid�rurgique bat son plein, il consid�re
que la r�gionalisation est un �chec. S�il estime que les lois de 1980
sont mieux que rien, il n�en conclut pas moins que le f�d�ralisme est
bloqu� par les pr�tentions flamandes en mati�res �conomiques et sur la
question de Bruxelles. Je suis un s�paratiste de c�ur mais ma raison me
dit le contraire (Le Soir, 4 mai 1982). Il estime qu�un
rattachement de la Wallonie � la France se r�alisera in�luctablement par
�tapes. Le 26 mars 1982, pour le CACEF, Fran�ois Perin suscite une r�flexion
d�capante et fouill�e en posant la question Quelle identit� pour quelle
communaut� ? Tout au long des ann�es 1980 et 1990, Perin reste un acteur
et un observateur attentif de la vie politique belge. Lors des multiples
interviews que sollicitent les journalistes, il continue � faire preuve
d�ind�pendance d�esprit mais aussi d�imagination institutionnelle.
Professeur de droit constitutionnel de l�Universit�
de Li�ge, il est admis � l��m�ritat le 1er octobre 1986. Quelques
jours auparavant, lors du congr�s constitutif de Wallonie R�gion d�Europe,
il apportait sa caution � la naissance du nouveau mouvement wallon (Namur,
25 septembre 1986). Membre de Wallonie R�gion d�Europe, il ne manque pas de
prodiguer ses conseils � Jos� Happart. N�anmoins, rapidement, Fran�ois Perin
fera savoir qu�il ne croit gu�re au succ�s de l�id�e de l�Europe des
r�gions : ce sont les �tats qui feront l�Europe et celle-ci pourra alors
peut-�tre � lib�rer � les r�gions sans effacer les �tats.
Soucieux de faire aboutir les r�formes
n�cessaires au maintien de l��tat belge, dans l�int�r�t de ses composantes,
Fran�ois Perin arrive n�anmoins � la conclusion que le flamingantisme
emp�che toute r�forme intellectuellement acceptable. Attir� depuis longtemps
par la France, il se range progressivement dans les rangs des Wallons qui
per�oivent le rattachement de la Wallonie � la France comme une solution
r�aliste. Le Belgique requiem �crit par Ren� Swennen, un ancien
�tudiant du professeur li�geois, ne manque pas de l�impressionner (1980). En
1986, il participe � la naissance du Mouvement pour le Retour � la France
(Manifeste du 21 octobre). Avec Pierre Ruelle et Ren� Swennen, il est aussi
l�un des auteurs et signataires d�un m�morandum destin� aux membres du MRF.
D�non�ant les vell�it�s des partisans de l�apprentissage du wallon et de la
cr�ation d�une langue commune wallonne, les auteurs du Memorandum
soulignent les liens multis�culaires qui unissent les habitants de
l�actuelle Wallonie et de la France. La langue et la culture fran�aises sont
la langue et la culture naturelles des Wallons qui sont en fait des
Fran�ais. Ils soulignent que la Flandre, nation en devenir, qui lorgne sur
Bruxelles et la Wallonie, est un corps �tranger inassimilable pour la
France. Conscients que toutes les conditions d�un rattachement de la
Wallonie � la France ne sont pas encore r�unies, ils constatent cependant
une �volution majeure m�me si entre partisans et opposants au rattachement,
c�est le groupe des indiff�rents qui est le plus important. N�imaginant pas
d�autres voies que la d�mocratie et le suffrage universel pour arriver �
leurs fins, les auteurs du M�morandum prendront un maximum de contacts
aupr�s de tout interlocuteur fran�ais quel qu�il soit. Ils affirment aussi
que la Wallonie, peuple de langue fran�aise, est une fraction de la nation
fran�aise que seuls les al�as de l�histoire ont maintenu en dehors des
fronti�res de l��tat fran�ais. Voulant m�nager toutes les susceptibilit�s,
le texte pr�voit de nombreuses �tapes sur le chemin du retour � la France.
Quant � Bruxelles, aux communes � facilit�s et � la Communaut� germanophone,
leur cas devra trouver une solution particuli�re. Ce Memorandum
servira de base au Manifeste sur la Wallonie fran�aise, publi� en
avril 1990. � Paris, en 1997, lors d�une conf�rence de Ren� Swennen, chaque
participant re�oit une plaquette intitul�e Scission de la Belgique,
r�dig�e par Fran�ois Perin. En 2002, Fran�ois Perin annonce son adh�sion au
Rassemblement Wallonie-France, pr�sid� par P-H. Gendebien qu�il consid�re
comme son deuxi�me fils spirituel, apr�s Jean Gol.
Homme de plume, pol�miste ardent, Fran�ois
Perin publia notamment La d�mocratie enray�e. Essai sur le r�gime
parlementaire belge de 1918 � 1958 (IBSC, 1960) ; La Belgique au
d�fi : Flamands et Wallons � la recherche d�un �tat (Huy, 1962) ; La
d�cision politique en Belgique (CRISP, s.d.) ; Le r�gionalisme
dans l�int�gration europ�enne (Bruxelles, 1967) ; Germes et bois
morts dans la soci�t� politique contemporaine, (Bruxelles, 1981) ; �
la recherche d�une nation introuvable (Bruxelles, 1989).
Paul Delforge