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== Lyon, entre catholicisme minoritaire et autres minorités religieuses ==

{{citation|Plus encore que les événements politiques ou économiques, les attitudes religieuses sont sujettes à interprétations divergentes, surtout lorsque la proximité des faits ne permet pas encore de les mettre en perspective et de saisir leur importance.}} (Christian Ponson)<ref group=a>{{harvsp|Pelletier|Rossiaud|Bayard|Cayez|2007|p=900}}.</ref> Pour de nombreuses évolutions, les analyses manquent encore<ref name="p907" group=a>{{harvsp|Pelletier|Rossiaud|Bayard|Cayez|2007|p=907}}.</ref>.

=== Évolution du catholicisme lyonnais dans le monde contemporain ===

==== De la guerre au Concile : renouveau et innovations sous {{Mgr}} Gerlier ====

La période entre 1944 et 1965, durant le mandat de [[Pierre Gerlier|{{Mgr}} Gerlier]], dernier « prince »<ref group=c>{{harvsp|Comby|1977|p=172}}.</ref> de l'Église de Lyon forme un tout et peut être considéré de manière indépendante. Cette période commence avec la [[Libération de la France|Libération]] et {{citation|s'achève avec le [[IIe concile œcuménique du Vatican|concile]] et plus encore avec les crises post-conciliaires}}<ref group=c>{{harvsp|Comby|1977|p=190}}.</ref>.

Lyon, dans les années 1950 et 1960, apparaît comme un terrain d'expérimentation d'idées nouvelles pour lutter contre la déprise de la religion catholique au sein de la population (Œuvre du [[Antoine Chevrier|Prado]], [[Prêtre ouvrier]], renouveau [[catéchèse|catéchétique]]). Ces expériences, à Lyon, sont jumelées à une entreprise de retour aux sources du christianisme avec la fondation durant la Seconde Guerre mondiale du centre des [[Sources chrétiennes]]<ref group=b name="HYRDDf7Q">{{harvsp|Gadille|Fédou|Hours|de Vregille|1983|p=308}}.</ref>.

===== L'Église de Lyon =====

====== Les hommes et les murs ======
La [[Séminaire (catholique)|formation des prêtres]] reprend après la guerre à un rythme important, entre une quarantaine et une cinquantaine d'[[Ordre (sacrement)|ordination]] par an. Cela génère une émulation qui pousse les autorités à construire jusqu'à dix établissements de formation dans les années 1950, ensemble qui se retrouve dès la décennie suivante sur-dimensionné<ref name="Comby1977 p191" group=c>{{harvsp|Comby|1977|p=191}}.</ref>. En 1954, une enquête indique qu'il y a {{unité|1459|prêtres}} séculiers, 527 frères et 499 prêtres en congrégations et plus de {{unité|6000|religieuses}}<ref name="Comby1977 p192" group=c/>.

Dans le même élan, de très nombreuses constructions de bâtiment de culte suivent la formation de nouvelles [[paroisse|paroisses]]. En tout, sur cette période, une quarantaine d'[[Église (édifice)|églises]] et de [[chapelle|chapelles]] nouvelles sont érigées sur l'agglomération lyonnaise, en plus de la reconstruction ou rénovation d'édifices en mauvais état<ref name="Comby1977 p191" group=c/>.

Le [[Archidiocèse de Lyon|diocèse]] évolue durant cette période, s'adaptant aux nouvelles populations catholiques. Il absorbe ainsi la commune de [[Villeurbanne]] et plusieurs autres proches<ref name="Comby1977 p195" group=c>{{harvsp|Comby|1977|p=195}}.</ref>.

====== L'expérience des prêtres ouvriers ======

L'expérience des [[prêtre ouvrier|prêtres ouvriers]], initiée à Lyon comme à Paris durant la Seconde guerre mondiale pour des raisons de nécessités, se poursuit malgré les réticences naturelles du cardinal Gerlier. Celui-ci, même si son inclinaison naturelle penche vers l'Action catholique, décide de soutenir toutes les entreprises menant l'évangile vers les incroyants. Il soutient donc jusqu'au bout les prêtres ouvriers<ref group=d>{{harvsp|Berthod|Ladous|1995|p=73}}.</ref>.

Ainsi, lorsqu'en 1953 la papauté et [[Pie XII]] dévoilent aux autorités ecclésiales leur volonté d'arrêter l'institution, il se déplace à Rome avec {{Mgr}} [[Maurice Feltin|Feltin]] et [[Achille Liénart|Liénard]] pour tenter d'infléchir la volonté du Vatican. Il échoue et se soumet à l'injonction du chef de l'Église, mais refuse toujours de condamner les prêtres ouvriers, même ceux qui refusent de quitter leurs frères de travail<ref group=d>{{harvsp|Berthod|Ladous|1995|p=75}}.</ref>.

Résolu à ne pas gâcher une telle expérience, il la poursuit dans la mesure des libertés accordées par les décrets pontificaux avec l'œuvre du Prado et l'abbé Alfred Ancel<ref group=d>{{harvsp|Berthod|Ladous|1995|p=78}}.</ref>.

====== L'ouverture au monde ======
L'[[œcuménisme]] est bien vivant à Lyon, mené par l'abbé Couturier et ses successeurs. Un grand nombre de mouvements en naissent, dont le plus notable est le groupe des Dombes, qui publie des points d'accord entre catholiques et protestants après le concile<ref name="Comby1977 p195" group=c/>.

Les missions lointaines sont toujours activement soutenues à Lyon. Les congrégations missionnaires sont toujours nombreuses et bien vivantes à cette période et de nombreux prêtres partent pour l'Afrique ou l'Amérique latine. Le cardinal Gerlier soutient fortement ces œuvres et se déplace lui-même, sacrant en [[Haute-Volta (colonie)|Haute-Volta]] l'[[Archidiocèse de Koupéla|archevêque de Koupéla]] ou allant à [[Rio de Janeiro]] à un congrès Eucharistique<ref group=c>{{harvsp|Comby|1977|p=197}}.</ref>.

====== Nouvelles études et nouvelles pensées ======
Les Sources chrétiennes, créées pendant la Seconde guerre mondiale, prennent un essor particulier durant les vingt ans qui suivent et prennent une place particulière dans les études théologiques<ref group="b" name="HYRDDf7Q" />.

===== La vie religieuse =====

====== Le catholicisme au quotidien ======
Les vingt ans qui suivent la libération sont portées par un retour des grandes manifestations catholiques. Le Congrès Marial de 1954 marque la réconciliation de l'Église et de l'État à Lyon, il est l'occasion de nombreux évènements festifs. Le 17{{è}} [[Congrès eucharistique|Congrès Eucharistique]] national se réunit à Lyon en 1959. Il est l'occasion d'une large procession à travers le [[parc de la Tête d'Or]] en clôture des célébrations<ref name="Comby1977 p191" group=c/>. Le diocèse accueille également des congrès plus pointus tel celui du [[Centre national de pastorale liturgique|C.P.L.]] en 1947 qui marque les esprits dans sa volonté de mettre en avant tous les aspects de la messe dominicale sans se limiter à la célébration de la messe<ref name="Comby1977 p194" group=c/>.

La pratique dominicale se maintient à un niveau élevé par rapport aux autres grandes villes françaises. Un questionnaire organisé en 1954 dans toutes les églises de l'agglomération indique que 19 % de la population se rend à la messe régulièrement<ref name="Comby1977 p192" group=c>{{harvsp|Comby|1977|p=192}}.</ref>. Les enfants suivent encore très largement le catéchisme, mais la déprise est déjà très forte après l'âge de 12 ans (toutefois moindre pour le sexe féminin)<ref name="p306 & 307" group=b>{{harvsp|Gadille|Fédou|Hours|de Vregille|1983|p=306 & 307}}.</ref>.

À Lyon, la rénovation de la [[théologie pastorale|pastorale]] suit les idées du [[Fernand Boulard|chanoine Boulard]]<ref>Un résumé des thèses de Fernand Boulard est visible dans ''Archives des sciences sociales des religions'', 1977, {{n°|44}}-2, {{p.|303-305}} {{lire en ligne|lien=http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/assr_0335-5985_1977_num_44_2_2137|langue=fr|texte=sur le site de Persée|date=10 septembre 2013}}.</ref>, qui préconise de tenir un discours spécifique selon l'environnement et le public<ref name="Comby1977 p194" group=c>{{harvsp|Comby|1977|p=194}}.</ref>. Dans le même état d'esprit, la liturgie est modernisée dans certaines paroisses, avec l'utilisation davantage du français, la composition de cantiques nouveaux ou la messe face aux fidèles pour leprêtre<ref group=c name="bJj76w">{{harvsp|Comby|1977|p=193}}.</ref>. Dans cet élan de renouveau, l'institution du [[Antoine Chevrier|Prado]] trouve toute sa place et se développe considérablement après-guerre<ref group=c>{{harvsp|Comby|1977|p=199}}.</ref>.

====== Œuvres traditionnelles, œuvres nouvelles ======
Les œuvres traditionnelles perdent à cette époque de l'importance par rapport aux [[action catholique|mouvements d'actions catholiques]]. Ces derniers connaissent alors leur âge d'or. L'un des symboles de leur importance est le mandat accordé par l'épiscopat à l'[[Action catholique ouvrière]] pour l'évangélisation du monde ouvrier, en remplacement du [[Mouvement populaire des familles (France)|M.P.F.]]<ref group="c" name="bJj76w" />. Les [[Semaines sociales de France|semaines sociales]] sont à présent pleinement intégrées à la vie de l'Église. La [[chronique sociale]] est dirigée par [[Joseph Folliet]] jusqu'en 1964<ref group=c name="ADQPm0">{{harvsp|Comby|1977|p=196}}.</ref>. Dans les années cinquante, Gabriel Rosset met en place avec l'institution de Notre-Dame des sans-abri des foyers d'accueil et des [[Cité d'urgence|cités d'urgence]] pour les nombreux sans-abris qui dorment dans les rues de Lyon. Rejoint par de nombreux bénévoles des conférences de Saint-Vincent de Paul et d'amis de la paroisse universitaire, il fonde une nouvelle œuvre pérenne dans la pure tradition lyonnaise des bonnes œuvres<ref group="c" name="ADQPm0" />{{,}}<ref>{{Lien web |langue=fr |url=http://www.fndsa.org/index.htm |titre=site internet de l'institution de Notre-Dame des sans-abri|consulté le= 10 septembre 2013}}.</ref>.

==== De l'après-concile à nos jours ====
[[Fichier:Philippe Barbarin (cropped).jpg|vignette|l'actuel archevêque de Lyon, {{Mgr}} Barbarin]]
Mais après le concile et les [[Mai 68|événements de mai 1968]], le déclin du catholicisme semble devenir inéluctable pour beaucoup. De nombreux catholiques, déçus par les choix de l'autorité, quittent brusquement ou s'éloignent silencieusement de l'Église ; ce qui entraîne une sévère crise des vocations, dès les années 1970<ref group=b name="p306 & 307"/>. La plupart des innovations voulues par le concile (synodes diocésains, catéchuménat…) ne revitalise pas significativement la pratique religieuse. Par ailleurs, de nombreuses institutions chrétiennes disparaissent ou se sécularisent, sans toujours perdre leur particularité. De nombreux chrétiens se rassemblent toujours pour défendre leurs valeurs, mais au sein d'organisations non-confessionnelles, tel le Cercle de Tocqueville durant les évènements de la guerre d'Algérie<ref group=a name="p907"/>.

Les opposants catholiques aux conciles qui suivent {{Mgr}} [[Marcel Lefebvre|Lefèbvre]] ne s'implantent pas à Lyon. Seul un prêtre traditionaliste, le curé Largier, et quelques prêtres de la [[Fraternité sacerdotale Saint-Pierre|Fraternité Saint-Pierre]] rassemblent les catholiques opposés à certaines nouveautés introduites par le concile Vatican II<ref group=a>{{harvsp|Pelletier|Rossiaud|Bayard|Cayez|2007|p=920}}.</ref>.

À l'inverse, les autorités et la grande majorité des catholiques, au cours des années 1980 à 2000, professent et soutiennent les nouveautés essentielles de l'Église contemporaine, tel l'[[œcuménisme]]. Celui qui symbolise le mieux cette recherche est l'archevêque {{Mgr}} [[Albert Decourtray]], sensible aux problèmes des autres communautés religieuses, qu'elles soient musulmanes, juives ou autres. Ses successeurs poursuivent dans cette voie<ref group=a>{{harvsp|Pelletier|Rossiaud|Bayard|Cayez|2007|p=925}}.</ref>.

===== Œcuménisme =====
Le retour des rapatriés d'Algérie pousse les autorités de différentes religions à s'organiser ensemble pour venir en aide à ses populations. Cela aboutit à une œuvre originale : le Comité de liaison des œuvres religieuses d'entraide, créé en 1968, qui regroupe des personnes catholiques, protestantes et juives. Organe de liaison et de conjugaison des énergies qui permet à chacun de garder ses activités propres ; il est lié tout autant à l'obligation d'agir efficacement au niveau local en mutualisant les énergies, qu'aux ouvertures œcuméniques engagées par le [[IIe concile œcuménique du Vatican|concile de Vatican II]]<ref group=a>{{harvsp|Pelletier|Rossiaud|Bayard|Cayez|2007|p=909}}.</ref>.

=== Les autres religions à Lyon ===

==== Religion musulmane ====
{{article connexe|Islam en France}}

La présence significative de musulmans à Lyon, comme dans la plupart des villes françaises, date des années 1950 et 1960, lorsque les besoins de l'économie française entrainent l'arrivée d'un grand nombre d'[[Immigration en France|immigrés]] de cette confession, la plupart maghrébins. Les premières décennies sont celles d'une présence essentiellement masculine d'ouvriers logés dans des bâtiments souvent insalubres. Cette communauté se soude dans la revendication politique avec la guerre d'Algérie et ensuite la lutte contre le racisme.

À partir des années 1980, les besoins en lieux de culte, présents souvent dans des foyers [[Adoma|Sonacotra]], trouvent un écho auprès des pouvoirs publics. En 1983, la mairie de Lyon décide de la construction d'une [[Grande mosquée de Lyon|mosquée]] et d'un centre culturel islamique. Retardées par de vives oppositions, ces institutions sont ouvertes en 1994. Dans les années 2000, il existe dans l'agglomération une soixantaine de lieux de culte. Le nombre de personnes de tradition musulmane est estimé à {{nb|150000}} personnes, sans que cela ne donne d'indication sur le niveau de leur implication dans la foi ; pour beaucoup, être musulman est avant tout une affaire de tradition familiale (avec essentiellement, le respect du [[ramadan]])<ref group=a>{{harvsp|Pelletier|Rossiaud|Bayard|Cayez|2007|p=916}}.</ref>.

==== Judaïsme ====
{{article connexe|Histoire des Juifs en France}}

À la suite de la [[guerre d'Algérie]], l'afflux d'immigrés fait passer la population juive de {{nb|15000}} à {{nb|35000}} personnes entre 1958 et 1968. Durant les années 1970 et 1980, de nombreuses [[Grande synagogue de Lyon|synagogues]] sont construites, puis le rythme ralentit pour atteindre 35 lieux de culte dans l'agglomération en 2006. Comme à d'autres endroits en France, des actes antisémites parsèment la vie de la communauté, jusqu'à nos jours<ref group=a name="p911">{{harvsp|Pelletier|Rossiaud|Bayard|Cayez|2007|p=911}}.</ref>.

==== Église apostolique arménienne ====
{{article connexe|Église apostolique arménienne|Arméniens de France}}

Issue pour une grande part d'immigrés libanais ayant fui la [[Guerre du Liban|guerre civile de leur pays]], la communauté de [[Église apostolique arménienne|religion arménienne]] représente environ {{nb|35000}} personnes dans les années 1980. En lien étroit avec les autorités catholiques (des cours de langue et spiritualité arméniennes sont ouvertes aux [[Université catholique de Lyon|facultés catholiques de Lyon]]), cette communauté est soudée autour de leur représentant religieux et de ses institutions<ref group=a>{{harvsp|Pelletier|Rossiaud|Bayard|Cayez|2007|p=913}}.</ref>.

==== Bouddhisme ====
{{article connexe|Bouddhisme en France}}

Avec la forte immigration [[Histoire du Viêt Nam|vietnamienne]] des années 1970, une solide communauté bouddhiste s'est implantée à Lyon, vivant en bonne intelligence avec les autres religions. Elle dispose depuis 1990 d'une pagode à [[Sainte-Foy-lès-Lyon|Sainte-Foy-les-Lyon]]<ref group="a" name="p911"/>.