Un accord qualifi� d'��historique, de d�cisif�� par la sc�ne internationale a �t� obtenu sur les pertes et dommages climatiques, le 20�novembre, � la cl�ture de la Conf�rence mondiale sur le climat (COP�27), � Charm el-Cheik, en �gypte. Seule avanc�e majeure de cette conf�rence qui ent�rine la cr�ation d'un fonds financier pour compenser les pertes et pr�judices occasionn�s par les �v�nements climatiques extr�mes, comme les temp�tes ou les inondations.
Car depuis trente ans, d�s le d�but des n�gociations climatiques, en 1991, indemniser les d�g�ts climatiques irr�versibles est une demande forte des pays insulaires et en voie de d�veloppement, qui sont les plus touch�s et qui pointent la responsabilit� des pays riches, historiquement �metteurs de gaz � effet de serre (GES). ��C'est avant tout une question de justice�: les pays en d�veloppement ne peuvent pas et ne doivent pas assumer seuls les cons�quences d'�v�nements dont ils ne sont que tr�s peu responsables �, r�sume l'ONG Greenpeace France.
Quand les pays riches reconnaissent leur dette climatique
Or, jusque-l�, les pays riches du Nord s'�taient toujours refus�s � ��mettre la main � la poche��, au pr�texte qu'ils financent d�j� deux piliers de l'action climatique�: l'att�nuation (projets destin�s � r�duire les �missions de GES) et l'adaptation (projets permettant de mieux faire face aux cons�quences du d�r�glement). En�2009, � la Conf�rence sur le climat de Copenhague, les pays d�velopp�s s'�taient alors engag�s � mobiliser 100�milliards de dollars par an, � partir de�2020, en faveur des pays en d�veloppement pour les aider � r�duire leurs �missions et � s'adapter. Toutefois, selon l'Organisation de coop�ration et de d�veloppement �conomiques (OCDE), les montants qu'ils ont mobilis�s conjointement n'ont totalis� qu'un peu plus de 83�milliards en 2020. Leur engagement ne devrait finalement �tre tenu qu'� partir de 2023.
En 2021, la COP�26 de Glasgow (�cosse) a aussi act� le doublement des financements consacr�s � l'adaptation au changement climatique entre�2019 et�2025 (de 20 � 40�millions de dollars par an), et d�cid� de cr�er un ��dialogue�� de deux ans sur la question des pertes et dommages. D'ailleurs, de nouvelles promesses de dons de plusieurs pays -�dont les �tats-Unis et la France�-, d'un montant total de plus de 230�millions de dollars pour l'adaptation, ont aussi �t� faites lors de la COP�27.
Apr�s les catastrophes climatiques qui ont notamment ravag� le Pakistan, le sujet des pertes et pr�judices est devenu plus pr�gnant et a figur� de nouveau au menu des n�gociations climatiques de la COP�27. Apr�s des d�bats houleux, notamment sur la question de la responsabilit� historique (quels pays devraient contribuer au financement), les pays d�velopp�s ont finalement consenti � cr�er un fonds sp�cifique, comme le confirme la d�cision finale de la COP�27 (1) .
Qui doit financer le nouveau fonds�? Qui en b�n�ficiera�?
D'ores et d�j�, les �tats-Unis et l'Union europ�enne poussent pour inclure la Chine, premier �metteur mondial de gaz � effet de serre parmi les contributeurs pour abonder le fonds, mais aussi l'Arabie saoudite et le Qatar, grands producteurs de p�trole. Or, jusqu'� pr�sent, la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Ccnucc), adopt�e en�1992, distingue les pays riches et industrialis�s (annexe�1) qui abondent les fonds, des pays en d�veloppement, les moins avanc�s qui per�oivent les financements. Tandis que la Chine est devenue l'une des plus grandes �conomies mondiales, l'UE et les �tats-Unis plaident pour actualiser le classement de l'ONU en prenant en compte la situation �conomique actuelle. La Chine et les �tats p�troliers arabes sont, en revanche, plus favorables au statu quo.
La question des pays donateurs promet donc des discussions tendues � la COP�28. Et d'ici l�, le pr�sident Emmanuel Macron souhaite, avec Mia Mottley, la Premi�re ministre de la Barbade, organiser, en juin�2023, un sommet � Paris pour trouver des m�canismes de financements permettant de soutenir les pays vuln�rables au changement climatique. ��� la COP�27, la France et l'Europe ont r�affirm� leur engagement pour le climat. Nous avons besoin d'un nouveau pacte financier avec les pays les plus vuln�rables. J'y travaillerai avec nos partenaires en vue d'un sommet � Paris avant la prochaine COP��, a d�clar� le chef de l'�tat fran�ais, le 20�novembre, sur Twitter.
360 millions de dollars d�j� promis pour les pertes et dommages
Au cours de la COP�27, douze gouvernements (�cosse, Belgique, Allemagne, Irlande, Autriche, Canada, Espagne, Nouvelle-Z�lande, etc.) et l'Union europ�enne ont d�j� promis de d�bloquer, au total, environ 360�millions de dollars pour les pertes et dommages, en particulier � travers l'initiative du Bouclier mondial contre les risques climatiques et des syst�mes d'alertes pr�coces des Nations unies. Le Bouclier vise � �largir l'acc�s aux syst�mes d'assurance contre les risques climatiques pour les pays les plus vuln�rables. L'Allemagne, le Canada, le Danemark, les �tats-Unis, la France et l'Irlande y contribueront ensemble � hauteur de 210�millions d'euros.
La France y injectera notamment 20�millions, sous forme de subventions en 2023. L'Hexagone doublera aussi � partir de l'ann�e prochaine sa contribution � l'Initiative pour les syst�mes d'alerte pr�coces face aux risques climatiques (Crews), pour la porter � 8�millions par an. L'ONU demande, quant � elle, de mobiliser 3,1�milliards de dollars pour ces syst�mes d'ici � 2027. ��Cependant, cela repr�sente une goutte d'eau face aux pr�s de 580 milliards de dollars par an qui seront n�cessaires chaque ann�e d'ici � 2030 pour aider les pays du Sud pour r�pondre aux pertes et dommages. Autre b�mol�: � l'exception de la France, de l'Autriche et de la Wallonie, les autres contributeurs ont en r�alit� d�shabill� Pierre pour habiller Paul en recyclant des financements initialement allou�s � la r�duction des �missions et � l'adaptation des pays du Sud��, d�plore toutefois Fanny Petitbon.
Op�rationnaliser le r�seau Santiago
En revanche, la militante de Care France salue l'accord des �tats pour rendre op�rationnel, d�s l'ann�e prochaine, le ��r�seau de Santiago ��sur les pertes et dommages, cr�� � la COP�25, � Madrid, en 2019. � Ayant pour r�le de fournir une assistance technique aux pays vuln�rables afin qu'ils puissent �valuer et chiffrer leurs besoins en pertes et dommages et identifier le type d'interventions n�cessaires pour y r�pondre, le r�seau de Santiago est une pi�ce ma�tresse du puzzle pour une r�ponse efficace aux pertes et dommages��, explique Fanny Petitbon.���L'accord comprend la mise en place d'un "advisory board" comme demand� par les pays du Sud, avec des repr�sentants des populations les plus vuln�rables (femmes, jeunes, peuples autochtones). Reste aux pays riches � garantir une mise en route efficace de cet outil dans les meilleurs d�lais � l'aide de contributions financi�res��, estime-t-elle.
La COP rate le coche sur la sortie des combustibles fossiles
Outre ce nouveau fonds ��pertes et dommages��, la COP�27 a aussi r�affirm�, in extremis, � la fin des n�gociations, l'engagement des �tats parties � limiter l'augmentation de la temp�rature mondiale � 1,5��C d'ici � la fin du si�cle. Cependant, notamment au grand dam de l'UE, de la France et des ONG, la conf�rence n'a pas permis d'obtenir l'engagement des principaux �metteurs mondiaux de GES de r�duire progressivement le recours aux combustibles fossiles, ni de nouveaux engagements en mati�re d'att�nuation du changement climatique.
Frans Timmermans, vice-pr�sident de la Commission europ�enne, a rehauss� l�g�rement les ambitions climatiques de l'UE, afin d'atteindre au moins 57�% de r�duction des �missions d'ici � 2030, au lieu de 55�%. Le Mexique et la Turquie ont aussi propos� de nouveaux objectifs de r�duction d'�missions � cette �ch�ance. Les gouvernements ont donc �t� invit�s, dans l'accord final, � r�examiner et � renforcer les objectifs fix�s pour 2030 dans leurs plans nationaux pour le climat (2) (NDC) d'ici � la fin de 2023. Et � acc�l�rer ��les efforts � visant � r�duire progressivement l'�nergie produite � partir du charbon et � supprimer les subventions ��inefficaces � accord�es aux combustibles fossiles.
��Nous devons drastiquement r�duire les �missions maintenant, et c'est une question � laquelle cette COP n'a pas r�pondu, a regrett� Ant�nio Guterres, secr�taire g�n�ral des Nations unies, en ajoutant que, si un fonds pour les pertes et dommages est essentiel, ce n'est pas une r�ponse si la crise climatique raye un petit �tat insulaire de la carte ou transforme tout un pays africain en d�sert��. Un avis que partage Zeina Khalil Hajj, de l'ONG 350.org, pour qui l'accord sur les pertes et dommages est ��une avanc�e majeure mais, sans mesures pour �liminer progressivement l'expansion des combustibles fossiles qui causeront de nouvelles pertes et dommages, la COP�27 n'a pas r�ussi � faire les progr�s n�cessaires. Et nous construisons un fonds pour notre propre destruction��.
La COP�28, aux �mirats arabes unis en 2023, sera donc l'occasion d'appr�cier � quel rythme doit s'op�rer le retrait des �nergies fossiles pour rejoindre une trajectoire de 1,5��C. Elle marquera le premier bilan mondial des progr�s r�alis�s en mati�re de climat depuis l'Accord de Paris, adopt� fin 2015.