Nul ne s’attendait à ce que la fille de deux pasteurs luthériens originaires des austères plaines du Jutland profère une allusion si osée.

On était à la mi-2014 et Margrethe Vestager, qui était à l’époque vice-Premier ministre du Danemark chargée de l’Economie et de l’Intérieur [et membre du parti de centre gauche Radikale Venstre], était sous le feu des critiques à cause de son plan de relance : l’opposition, menée par Lars Lokke Rasmussen [du Parti libéral], avait qualifié ses projets de “petits”. Elle avait répliqué, avec un sourire malicieux :

Certains pensent que c’est un plan plutôt petit, cependant j’ai tendance à me méfier de tout jugement sur la taille émis par un homme, et je m’intéresse peut-être davantage à l’effet – mais il est possible que ce soit un point de vue féminin.”

Ces propos lui valurent d’être surnommée “Vestager la sensuelle” par les médias danois. C’est là un exemple typique de son humour acide et de sa capacité de surprendre. Ces deux caractéristiques soutiennent sa réputation de commissaire européen à la concurrence, poste qu’elle a obtenu quelques mois plus tard.

Une réserve froide et clinique

Si M. Rasmussen, désormais Premier ministre, doit être soulagé qu’elle soit partie à Bruxelles, ce sont maintenant les patrons des plus grandes multinationales qui découvrent la frustration qu’engendrent les tentatives de prévoir les réactions de cette femme de 47 ans, réservée mais vive.

Tim Cook est le dernier gros poisson en date à avoir tenté de la convaincre qu’elle faisait fausse route [le 21 janvier]. Les pratiques fiscales d’Apple en Irlande font l’objet d’une enquête de l’Union européenne qui pourrait coûter des milliards au fabricant de l’iPhone. Selon des personnes bien informées, c’est en vain que M. Cook, malgr