Le psychanalyste Pierre Fédida est mort à l'hôpital Necker de Paris, vendredi 1er novembre, des suites d'un accident vasculaire cérébral. Pendant quarante ans, il aura dispensé au sein de l'Université française un enseignement fécond de la psychanalyse.
Né le 30 octobre 1934, il était issu d'un milieu modeste. Son père, juif séfarade d'origine algérienne, exerçait le métier de menuisier, et sa mère, catholique lyonnaise, était ourdisseuse de vêtements sacerdotaux. C'est à Lyon, dans sa ville natale qu'il effectue une partie de son cursus universitaire. Il passe ensuite l'agrégation de philosophie avant de soutenir un doctorat de lettres et de sciences humaines puis de s'orienter vers une tradition de la psychopathologie qui a connu son heure de gloire avec Ludwig Binswanger, médecin-chef de la prestigieuse clinique de Bellevue, située à Kreuzlingen, sur le lac de Constance.
Auprès de cet ami de Freud, grand maître d'une psychiatrie existentielle d'inspiration husserlienne, Fédida, proche en cela de Henri Maldiney et des premières œuvres de Michel Foucault, reçoit, entre 1958 et 1966, une solide formation clinique et théorique dont il conservera la marque aussi bien dans son enseignement que dans son itinéraire de psychanalyste qui le conduira, après une cure didactique sur le divan de Georges Favez, à adhérer à l'Association psychanalytique de France (APF).
Dans la droite ligne de Daniel Lagache, Didier Anzieu ou Jean Laplanche, il considère que la discipline freudienne ne doit pas se transmettre exclusivement dans le cadre privé des associations psychanalytiques. Pour se laïciser, encore faut-il qu'elle se confronte aux autres domaines du savoir. A cet égard, et après être devenu professeur à l'université Paris-VII en 1979, Fédida s'engage dans une voie difficile. Il refuse en effet la politique de ses prédécesseurs, lesquels n'avaient pas réussi à éviter que les départements de psychologie clinique servent d'annexes aux grandes sociétés freudiennes. Aussi ouvre-t-il un véritable dialogue avec les freudiens d'obédience lacanienne, d'une part, et avec les autres universitaires, de l'autre, permettant que l'Université devienne le lieu d'une confrontation entre les divers courants freudiens et entre ces courants et les autres disciplines.
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