Hachette Livre a annoncé, jeudi 24 mars, le départ de Sophie de Closets. Elle quitte la présidence des éditions Fayard, « désireuse », officiellement, « d’aborder une nouvelle phase de sa carrière ». Depuis que le projet d’offre publique d’achat (OPA) de Vivendi sur Lagardère a été déposé auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF), le 21 février, c’est la première éditrice d’une importante maison d’Hachette qui tire sa révérence. Un départ qui sous-entend à quel point elle n’a guère envie de continuer de travailler sous le règne d’un groupe détenu par Vincent Bolloré. D’autres pourraient la suivre.
Nommée PDG des éditions Fayard en janvier 2014, Sophie de Closets a réalisé avec succès plusieurs coups marquants. Comme l’édition critique française de Mein Kampf en 2021. Ce livre programme d’Adolf Hitler a été présenté comme un moyen d’« historiciser le mal » et accompagné d’une très solide critique scientifique. A l’affût, la fille du journaliste François de Closets a publié la jeune poétesse californienne Amanda Gorman, qui avait volé la vedette à Joe Biden lors de la cérémonie d’investiture du président des Etats-Unis.
Querelles capitalistiques
La patronne de Fayard, normalienne et agrégée d’histoire, s’est illustrée en devenant l’heureuse éditrice des Mémoires de Barack Obama. Avec Arnaud Nourry, alors PDG d’Hachette Livre, elle avait décroché à New York les droits français de ce titre auprès de Penguin Random House. En réussissant à convaincre l’ancien président qu’elle saurait y faire. Les ventes d’Une terre promise ont explosé dès leur mise en vente, en novembre 2020. Deux ans exactement après le succès de Devenir, le témoignage de l’ex-première dame, Michelle Obama, que Fayard avait écoulé à plus d’un demi-million d’exemplaires dans les pays francophones.
Chez Fayard, Sophie de Closets a aussi édité des personnalités politiques marquées très à droite comme Philippe de Villiers. Ce dernier a fait entrer son frère, Pierre, ancien chef d’état-major des armées, dans la liste des auteurs de la maison. Dans une enquête publiée mercredi, Le Monde relatait comment Nicolas Sarkozy, ami d’Arnaud Lagardère, et administrateur du groupe Lagardère, affirmait « s’occuper » du sort de l’éditrice après la publication de livres qui lui avaient déplu. Depuis plus de deux ans, les querelles capitalistiques au sein de la maison mère d’Hachette pèsent sur les salariés.
Sophie de Closets reconnaît : « J’ai passé dix-huit merveilleuses années » chez Hachette, « où j’ai appris le métier d’éditeur et (…) pu l’exercer dans des conditions exceptionnelles. » Elle a remercié les salariés et les auteurs « dont la confiance nous oblige ». L’hypothèse de son arrivée n’est pas confirmée chez Flammarion. La maison (dans la galaxie de Gallimard) qui justement a accueilli Betty Mialet et Bernard Barrault lorsqu’ils ont quitté la direction de Julliard (Editis), fin 2019, en emportant avec eux leurs principaux auteurs.