« Nous nous sommes mis d’accord pour changer le nom du pays en République de Macédoine du Nord [“Severna Makedonija”] », a annoncé solennellement le premier ministre grec, Alexis Tsipras, mardi 12 juin. Il s’était entretenu auparavant avec son homologue, Zoran Zaev, au téléphone, afin de peaufiner l’accord qui devrait être signé, d’après la presse grecque, ce week-end au lac Prespa, à la frontière entre les deux pays.
Un quart de siècle après l’éclatement de la Yougoslavie et l’indépendance du petit pays des Balkans, Athènes autorise enfin Skopje à porter le nom de « Macédoine » avec une référence géographique. « C’est un bon accord, qui couvre toutes les conditions posées par la Grèce », a assuré Alexis Tsipras. Le texte précise l’existence d’une « langue macédonienne » mais d’origine slave, il permet l’utilisation de l’expression « citoyen macédonien du Nord » sur les passeports, mais en ne faisant aucune référence à Alexandre le Grand.
Ratifier l’accord trouvé
« Dans l’accord trouvé, nos voisins du Nord ne peuvent revendiquer, ni maintenant ni dans le futur, l’héritage culturel de la Macédoine antique grecque », s’est félicité Alexis Tsipras. Ce dernier fait face, depuis le début des négociations sur le sujet, à une opposition virulente d’une frange de la population, qui s’est mobilisée en masse en février et dans une moindre mesure la semaine dernière. « Le plus important reste que nos voisins ont accepté de faire une réforme constitutionnelle en enlevant toute revendication territoriale », a ajouté Alexis Tsipras.
Athènes comme Skopje voulaient résoudre ce conflit avant le sommet européen du 28 juin et le sommet de l’OTAN prévu les 11 et 12 juillet, où il sera question de l’adhésion de la « République de Macédoine du Nord » à ces deux organisations internationales. Jusqu’à présent, Athènes bloquait ces processus. Mais encore faut-il maintenant qu’Athènes et Skopje convainquent leurs Parlements respectifs de ratifier l’accord trouvé.
Mardi matin, avant même l’annonce officielle du nom trouvé par les deux parties, l’allié gouvernemental d’Alexis Tsipras, Panos Kammenos, ministre de la défense grec et chef de file des Grecs indépendants (nationalistes), avait déclaré « s’opposer à cet accord » et avait appelé son camp à voter contre. L’opposition de droite, Nouvelle Démocratie, a dénoncé un « mauvais accord ». Tsipras pourra tout de même compter sur les voix de députés de centre gauche pour obtenir une majorité.
« Farouchement contre »
Pour le premier ministre macédonien, Zoran Zaev, la tâche est plus difficile. Il ne détient pas au Parlement la majorité de deux tiers requis pour faire adopter la réforme de la Constitution. Le président et l’opposition de droite sont farouchement contre. Surtout, Zoran Zaev doit consulter ses concitoyens sur cet accord lors d’un référendum, à l’automne.
« La Grèce peut devenir un leader dans les Balkans, apporter une stabilité dans une région déchirée par les nationalismes pendant des années, nous sommes des acteurs du changement et pouvons être fiers », a expliqué M. Tsipras mardi soir.
« Je n’ai aucun doute que cet accord va ouvrir une période de relations renforcées entre les deux pays et entre leurs peuples », a déclaré l’émissaire des Nations unies sur cette question, Matthew Nimetz. Les représentants de l’OTAN et de l’UE se sont réjouis de l’accord, à l’image du président du Conseil européen, Donald Tusk, qui a tweeté : « Mes sincères félicitations aux premiers ministres Alexis Tsipras et Zoran Zaev. Je croise les doigts. Grâce à vous l’impossible devient possible. »
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