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La face noire de Franquin

Série « Palette d’artistes » (2/18). Le « père » de Gaston Lagaffe dévoile sa part sombre dans une œuvre plus intime et torturée, « Idées noires ».

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Publié le 09 août 2016 à 08h41, modifié le 26 août 2016 à 15h41

Temps de Lecture 5 min.

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Couverture de l’album de Franquin, « Idées noires ».

Série « Palette d’artistes » (2/18)

Pour une rupture, c’en fut une, et une belle ! En mars 1977, le dessinateur André Franquin et le scénariste Yvan Delporte lancent, encarté dans l’hebdomadaire Spirou, une sorte de contre-journal autonome appelé Le Trombone illustré. Alors que la bande dessinée s’ouvre à un public adulte à travers la création de revues spécialisées (Métal hurlant, L’Echo des savanes, Fluide glacial…), leur idée est de proposer aux jeunes lecteurs du magazine de la maison Dupuis des récits « différents », exonérés des codes de la BD franco-belge. Des auteurs qui n’auraient jamais travaillé dans le Spirou traditionnel sont sollicités : Gotlib, Tardi, F’Murr, Moebius, Bilal…

C’est dans ce laboratoire éphémère – Le Trombone s’arrêtera après 30 numéros – que Franquin va donner corps à son œuvre la plus intime et la plus torturée, loin de l’humour potache et consensuel de son héros Gaston Lagaffe : Idées noires, dans laquelle il traitera du thème de la mort et de celui de la bêtise humaine, incarnée à ses yeux par diverses corporations – militaires, chasseurs, curés, sportifs, technocrates…

« Les “Idées noires”, c’est du Gaston trempé dans la suie », selon le maître bruxellois, mort en 1997

A contre-pied des productions infantiles tout en couleurs de l’époque, cet ensemble de gags en une planche est réalisé en noir et blanc, et même « en noir seulement », a-t-on envie de dire, tellement l’encre de Chine envahit tous les personnages, ramenés au rang de silhouettes. « Les Idées noires, c’est du Gaston trempé dans la suie », avait pour habitude de dire le maître bruxellois, mort en 1997.

Franquin a alors 53 ans et est au sommet de son art. Le premier Festival d’Angoulême lui a décerné son grand prix, trois ans plus tôt. L’expressivité et le dynamisme de son dessin n’ont pas d’égal dans le 9e art. Gaston Lagaffe, lui, est devenu un personnage iconique dont la célébrité tutoie celle de Tintin et d’Astérix. Ce n’est pas que le dessinateur s’ennuie avec son héros en espadrilles. Grâce à Gaston, il peut aborder des sujets qui lui sont chers – l’écologie ou la protection des animaux – ou qui le hérissent – l’installation des premiers parcmètres dans les villes.

Pessimiste

Mais Franquin ressent le besoin d’exprimer ses idées plus frontalement, comme si le temps pressait. Il a fait un infarctus quelques années plus tôt et sa morosité naturelle n’en finit pas de s’épancher. Lui qui souffre d’être perçu comme un « dessinateur gentil », parce qu’il a créé le Marsupilami, s’avère être un pessimiste de première. Tout l’exaspère. Dieu : « Une religion, c’est une secte qui a réussi », confie-t-il au périodique belge En attendant (repris dans Franquin et les fanzines, Dupuis, 2013). L’armée : « Je déteste cordialement tout ce qui est militaire. » L’existence en général : « Je ne comprends pas pourquoi nous sommes là, je ne comprends pas la raison de ce monde ; je le trouve absurde. »

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