La rentrée, toute récente, semble déjà loin à la vue des enfants se pressant bras dessus, bras dessous pour passer le portail de l’ikastola Oihana, à Bayonne (Pyrénées-Atlantiques). Le bâtiment blanc et rouge sang-de-bœuf, couleurs emblématiques de la région, n’est pas tout à fait achevé. Une petite fille se retourne : « Gero arte ! » (« à tout à l’heure »), lance-t-elle, à sa maman. « Bonne journée ! », lui répond cette dernière. « J’aurais dû lui répondre en basque, regrette sa mère, mais je n’ai pas encore le réflexe. » Car dans l’école où la fillette est inscrite, en moyenne section de maternelle, on ne parle que le basque.
Jusqu’au lycée, maths, histoire, sciences, récréations, cantine, parties de pelote contre le fronton, tout à l’ikastola (« le lieu où l’on apprend ») se fait en basque ; sauf les cours de français, introduits au CE1. Le Pays basque français compte 38 de ces écoles privées associatives (34 maternelles, trois collèges et un lycée), et 4 064 élèves y sont scolarisés. L’académie de Bordeaux estime à 10 % le nombre total d’enfants scolarisés en immersion en basque en maternelle, à 10 % en primaire, 7,36 % au collège et 6,21 % au lycée. Et une centaine de nouveaux viennent grossir les rangs chaque année.
Les parents de Manon, 4 ans, également en moyenne section de maternelle à l’ikastola, ne sont pas, eux non plus, encore très à l’aise avec l’euskara (la langue basque). Avant d’arriver à Bayonne en 2015, à la faveur d’une mutation professionnelle, sa mère, Emeline Robillard, 36 ans, originaire du Pas-de-Calais, et son père, Gérôme Sonois, 43 ans, parisien, habitaient Paris. Ils appréciaient le Pays basque pour y avoir passé des vacances, en aimaient « la culture », « le cadre ». « Tant qu’on n’habite pas ici, on ne se rend pas compte que la langue basque est aussi courante, explique Emeline. Alors, quand s’est posée la question de l’école, on a voulu que Manon, née à Bayonne, le parle aussi, qu’elle soit proche de sa culture. »
Engagement des parents
Même son de cloche du côté de Camille Montagne, 43 ans, mère d’Elise, 11 ans, en 6e au collège Xalbador de Cambo-les-Bains, et de Laia, 5 ans, en maternelle à Ustaritz. Installée à Larressore, à une vingtaine de kilomètres de Bayonne, elle aurait pu, de chez elle, voir ses enfants sortir de la bâtisse rouge et blanc de l’école privée Saint-Martin. Une école qui propose un enseignement bilingue, à parité horaire français-basque. Mais elle et son ex-conjoint, Marc, originaire des Pays de la Loire, ont préféré mettre leurs filles dans des ikastola.
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