Les tensions s'avivent entre Tokyo et Séoul après la visite, vendredi 10 août, du président sud-coréen, Lee Myung-bak, sur les îlots appelés Dokdo dans la péninsule coréenne et Takeshima au Japon. Connus également sous le nom de rochers Liancourt, ces îlots de la mer du Japon (mer de l'Est pour les Coréens) alimentent un contentieux ancien entre le Japon et les deux Corées.
Cette fois, le premier ministre nippon, Yoshihiko Noda, a qualifié la visite de "totalement inacceptable". L'ambassadeur du Japon à Séoul a été rappelé. Samedi, l'Archipel a annoncé qu'il allait porter l'affaire devant la Cour internationale de justice (CIJ).
"Faire connaître au monde la position japonaise sur Takeshima est plus important que de faire preuve de retenue ", a déclaré le chef de la diplomatie japonaise, Koichiro Gemba.
Les rochers Liancourt se trouvent dans une riche zone halieutique, aux fonds présumés riches en gaz. En Corée, leur annexion en 1905 par l'empire nippon est considérée comme la première étape vers la colonisation de la péninsule. La possession des îlots n'a pas été tranchée après la décolonisation de 1945. Séoul y maintient un détachement de police et un couple de pêcheurs y réside. Au Japon, les îlots sont rattachés depuis 1905 à la préfecture de Shimane.
"PROTOCOLES ROYAUX"
Les élus et responsables sud-coréens s'y rendent régulièrement. Mais le déplacement de M. Lee est le premier d'un président. "Les Dokdo sont l'extrémité du territoire coréen, a-t-il déclaré aux policiers qui y sont basés. Assurez-vous de bien les défendre."
Cette visite intervient alors que M. Lee, dont le mandat se termine en février 2013, doit prononcer son dernier grand discours à la nation le 15 août, jour anniversaire de la libération de la Corée de la férule japonaise.
Sans critiquer le principe de sa visite, les partis d'opposition lui reprochent de chercher à améliorer sa cote de popularité, au plus bas, et à redorer une image ternie par une série de scandales et par la politique suivie jusque-là.
A la différence de son prédécesseur Roh Moo-hyung, Lee Myung-bak, arrivé au pouvoir en 2008, privilégiait une meilleure entente avec le Japon. Ce positionnement avait été facilité par l'attitude de Tokyo.
En 2010, le premier ministre d'alors, Naoto Kan, avait exprimé de profonds regrets pour les souffrances infligées pendant la période coloniale entre 1910 et 1945. Il avait favorisé la restitution des Uigwe, les "protocoles royaux" de la dynastie coréenne Jeoson qui étaient détenus par l'agence de la famille impériale.
Les deux pays envisageaient un accord de libre-échange. Une coopération dans le renseignement militaire, la première dans ce domaine, devait être conclue au mois de juin.
ANCIENS CONTENTIEUX
C'était compter sans la vigueur du ressentiment coréen envers le Japon, toujours perçu comme une menace potentielle. Les vives réactions ont obligé le gouvernement Lee à annuler à la dernière minute la conclusion de l'entente à vocation militaire, prouvant que la politique suivie ne saurait faire oublier les contentieux anciens.
Outre la dispute autour des rochers Liancourt, les deux pays restent divisés sur le travail forcé des Coréens au Japon pendant la colonisation ou le dédommagement des femmes coréennes obligées de se prostituer pour les soldats de l'armée impériale pendant la seconde guerre mondiale.
En décembre 2011, M. Lee avait demandé à M. Noda de trouver une solution pour ces femmes. M. Noda avait répondu que Tokyo considérait le problème comme réglé depuis la normalisation des relations bilatérales en 1965, sans exclure d'y réfléchir "d'un point de vue humanitaire".
Cette fois, difficile de dire comment la situation va évoluer entre les deux pays dont les liens économiques et touristiques n'ont jamais été si étroits. Les Etats-Unis ont appelé leurs deux alliés dans la région à la retenue.
Mais, déjà, deux ministres japonais ont menacé de se rendre le 15 août au sanctuaire Yasukuni, où sont honorés les morts pour la patrie, dont des criminels de guerre nippons. De quoi exacerber la rancoeur sud-coréenne.
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