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Anne Plantagenet, l’envie d’« écrire sur et pour les autres »

L’écrivaine et traductrice de l’espagnol délaisse la fiction pour un récit, à la fois personnel et social, sur une syndicaliste, Letizia Storti, détruite par le harcèlement moral. Peut-être l’amorce d’une nouvelle direction pour son œuvre

Par  (Collaboratrice du « Monde des livres »)

Publié le 12 mai 2024 à 08h00, modifié le 12 mai 2024 à 16h27

Temps de Lecture 6 min.

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L’écrivaine et traductrice Anne Plantagenet, à Paris, en 2021.

Quoi qu’en dise Wikipédia, Anne Plantagenet n’écrit pas sous un « nom d’emprunt ». Ce patronyme aux consonances royales, qui évoque la dynastie des comtes d’Anjou, est celui de sa famille paternelle, pieds-noirs espagnols dont elle a raconté l’histoire dans Trois jours à Oran (Stock, 2014). Du côté maternel, la généalogie est italienne. Son grand-père, qui deviendra maçon, est arrivé en France en 1922, à l’âge de 12 ans. Pas une once de sang bleu chez cette écrivaine pétillante née en 1972, autrice d’une dizaine de livres et traductrice reconnue de l’espagnol.

« Ça cache plein de choses, ce nom qui est le mien », confie-t-elle au « Monde des livres » dans un café du quartier Montparnasse, à Paris, où elle réside depuis peu. « Mes origines, mon parcours, mon intérêt pour les questions sociales, et ma sensibilité à l’égard des situations d’injustice. » Mais il est vrai, concède-t-elle, que ces aspects « n’étaient peut-être pas très perceptibles dans les romans ou les biographies publiés jusqu’ici ». Le livre qu’elle consacre à l’histoire tragique de Letizia Storti, une salariée de l’entreprise Upsa dont elle a fait la connaissance sur le tournage du film de Stéphane Brizé, En guerre (2018), où l’ouvrière était figurante, est sans doute, dit-elle, son texte à la fois le plus « tourné vers l’autre et en même temps intimement ancré en [elle] ».

A la façon dont la conversation hésite, néanmoins, à s’aventurer sur un terrain plus personnel, pour privilégier l’évocation de Letizia, on devine qu’écrire Disparitioninquiétante d’une femme de 56 ans a nécessité une longue réflexion éthique et esthétique sur la place que l’autrice pouvait prendre dans le récit. Pour éviter, sans doute, que le destin de cette femme pleine de « joie de vivre » et de « combativité » sur le tournage d’En guerre, qui ­tentera pourtant de se suicider sur son lieu de travail en 2021, avant de disparaître à Marseille où elle était en convalescence, soit perçue comme un prétexte à la mise en scène de soi.

« Je pense que le besoin d’écrire ce livre a commencé lorsque j’ai appris qu’elle avait “disparu”, se souvient l’écrivaine. Je ne comprenais pas si elle était morte ou si on l’avait perdue de vue. Dans les deux cas, c’était terrifiant et incompréhensible. » Pendant plusieurs mois, Anne Plantagenet ne cesse de penser à Letizia. « J’avais envie de raconter l’histoire de cette fille d’immigrés italiens qui avait lutté toute sa vie pour conquérir sa place. Même sur le tournage du film, elle faisait tout, à juste titre, pour se faire remarquer. » Dans son usine, elle était représentante syndicale, élue Force ouvrière, et n’hésitait pas à « s’opposer à la direction, pour faire valoir ses droits et ceux de ses collègues », comme on peut la voir le faire dans le film de Stéphane Brizé. « Et, soudain, elle avait disparu sans laisser de traces. » Elle ajoute, pour justifier encore sa démarche : « Je voulais à la fois comprendre ce qui lui était arrivé, et la rendre visible et audible. La faire échapper à l’anonymat auquel la renvoyaient les coupures de presse qui signalaient la disparition d’“une femme”. Il fallait lui redonner un visage et un nom. »

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