Soulevant un nuage de poussière jaune, une camionnette fluo, fièrement immatriculée «Incassable», freine sèchement sur le terre-plein de la Maison de la culture d’un petit village situé à 10 kilomètres à vol d’obus au sud de Vovtchansk. Quelques heures plus tôt, samedi 11 mai, un point d’évacuation y a été installé à la hâte pour les civils pris dans l’étau des combats qui s’intensifient d’heure en heure entre l’armée régulière russe sur le retour, et les défenseurs ukrainiens qui tentent de s’organiser comme ils peuvent, alors que la situation se dégrade à vue d’œil.
Slava, volontaire, préposé à aller chercher les naufragés de la guerre, arrache les velcros de son gilet pare-balles, le visage rouge et les traits encore tirés par sa dernière course, qui a vu une bombe guidée s’écraser à 300 mètres de son véhicule, d’où s’extraient péniblement trois personnes âgées. «Je reviens du centre de Vovtchansk. Vous savez quoi ? Et bien, en fait, il n’y a plus de centre à Vovtchansk. Il n’y a plus un bâtiment entier, dit-il, comme essoufflé. KAB [bombes planantes, ndlr], artillerie, drones FPV, des chars se mettent à tirer. [Les Russes] balancent tout ce qu’ils peuvent.»
Slava a été un des derniers volontaires à s’aventurer dans Bakhmout en 2023, pour évacuer