À l'école de l'Europe

Depuis 1953 existent une quinzaine d’écoles en Europe qui accueillent les enfants de ces fonctionnaires venus des vingt-huit pays membres pour œuvrer à l’intérêt général européen. Elles sont nées à l’époque du charbon et de l’acier, ont grandi dans les années soixante quand l’Europe s’appelait encore la C.E.E., se sont développées avec les divers élargissements de l’Union. À Bruxelles, plus de 10 000 enfants sont ainsi scolarisés de la maternelle à la terminale dans un système éducatif public original, contrôlé à la fois par la Commission européenne et les États. Permettant aux enfants d’expatriés de recevoir une éducation dans leur langue nationale et d’obtenir un baccalauréat européen, ces écoles font désormais partie du paysage urbain et de la société bruxelloise. Elles sont devenues le prisme des paradoxes, des malaises et des doutes que suscite de plus en plus « l’Europe ».

Lieux d’un cosmopolitisme réduit à sa dimension européenne, elles n’entretiennent que peu de relations avec les écoles belges qui les environnent. Rêvées par les pères fondateurs de l’Europe comme la matrice d’une conscience et d’une citoyenneté européenne, elles restent d’abord vécues par les familles comme un service qui leur est dû et une aide à la reproduction sociale. Appelées à s’ouvrir à de nouveaux publics et à être les fers-de-lance d’un futur système éducatif à l’échelle du continent, elles peinent à se faire connaître, croulent sous leurs propres effectifs et tendent à se replier sur elles-mêmes. Modèle d’intégration ou cage dorée : l’opposition un tantinet schématique renvoie par extension aux apories d’un projet européen pétri de ses nombreuses contradictions. Une déclinaison de ce que « faire école » peut bien signifier.

Production : Laurent Le Gall et Laurent Venneuguès

Réalisation : Véronique Vila

Prise de son : Laurent Macchietti