Alain Resnais

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Alain Resnais
De gauche à droite, Ariane Ascaride, Juliette Binoche, Alain Resnais et Agnès Jaoui à la 23e cérémonie des César (en 1998).
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Nom de naissance
Alain Pierre Marie Jean Georges ResnaisVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activités
Période d'activité
Conjoints
Florence Malraux (de aux années 1980)
Sabine Azéma (de à )Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Mouvement
Distinctions
Liste détaillée
Lion d'or ()
United Nations Awards ()
Sutherland Trophy ()
Prix Louis-Delluc (, et )
César de la meilleure réalisation ( et )
César du meilleur film (, et )
César d'honneur ()
David Luchino Visconti ()
European Film Academy Critics Award (en) ()
Prix Jean-Le-DucVoir et modifier les données sur Wikidata
Films notables

Alain Resnais [alɛ̃ ʁɛnɛ][n 1] est un réalisateur français, également scénariste et monteur, né le à Vannes (Morbihan) et mort le à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine).

Alors qu'il envisage de devenir comédien, il intègre la première promotion de l'IDHEC en montage et commence, à la fin des années 1940, à réaliser des courts métrages et moyens métrages documentaires qui marquent le public et la critique : Van Gogh, Guernica et surtout Nuit et Brouillard, premier film de référence sur les camps de concentration.

Réalisateur d'Hiroshima mon amour (1959) et de L'Année dernière à Marienbad (1961), Alain Resnais est rapidement considéré comme l'un des grands représentants du Nouveau cinéma (Nouvelle Vague) et comme un des pères de la modernité cinématographique européenne à l'instar de Roberto Rossellini, Ingmar Bergman et Michelangelo Antonioni dans sa manière de remettre en cause la grammaire du cinéma classique et de déconstruire la narration linéaire.

Cinéaste appréciant les expérimentations, capable de se remettre en question à chaque nouvelle réalisation, Alain Resnais est reconnu pour sa capacité à créer des formes inédites et à enrichir les codes de la représentation cinématographique par son frottement à d'autres arts : littérature, théâtre, musique, peinture ou bande dessinée. Ses films, tendant vers l'artifice et l'imaginaire, peuvent paraître déroutants pour le grand public même si beaucoup ont rencontré le succès.

Tout au long de son œuvre, se retrouvent un grand nombre de thèmes tels que des sujets historiques, la mémoire, l'engagement politique, l'intimité, la réalité de l'esprit, le rêve, le conditionnement socio-culturel, la mort, la mélancolie et l'art.

Pour les vingt longs métrages qui portent sa signature, Resnais a fait appel à des auteurs-scénaristes aussi renommés et différents que Marguerite Duras, Alain Robbe-Grillet, Jean Cayrol, Jorge Semprún, Jacques Sternberg, David Mercer, Jean Gruault, Jules Feiffer, Jean-Pierre Bacri, Agnès Jaoui et, pour l'adaptation de pièces anglaises d'Alan Ayckbourn, Jean-Michel Ribes, et Jean-Marie Besset. Il co-adapte en 2009, pour la première fois, avec Laurent Herbiet un roman. Suivront avec le même scénariste trois autres adaptations, dont la dernière restera inachevée.

Fidèle dans le travail et amateur de l'esprit de troupe, Resnais a notamment sollicité à plusieurs reprises les comédiens Sabine Azéma, Pierre Arditi, André Dussollier et Lambert Wilson, les techniciens Jacques Saulnier, Renato Berta, Éric Gautier et Hervé de Luze ainsi que le compositeur Mark Snow.

Réalisateur célébré par la profession, il a été plusieurs fois récompensé aux Césars et dans les festivals internationaux.

Biographie[modifier | modifier le code]

Apprentissage[modifier | modifier le code]

Alain-Pierre-Marie-Jean-Georges Resnais naît en 1922 à Vannes. Issu d'une famille cultivée (son père, Pierre, pharmacien de profession, fut également maire de Treffléan de 1934 à 1962), il est sensibilisé très tôt à toutes les formes d'art. À cause d'un asthme bronchique il fait au début ses études scolaires en privé à la maison. Plus tard, il effectuera des études préparatoires au lycée jésuite Saint François-Xavier de Vannes[1]. À 12 ans, il se voit offrir une caméra Kodakmm avec laquelle il tourne des courts métrages amateurs dont une adaptation de Fantômas[2]. Outre le cinéma, il se passionne pour la photographie, la peinture, la bande dessinée et la littérature.

Il désire d'abord être acteur et déménage à Paris en 1939. Il devient l'assistant de Georges Pitoëff au théâtre des Mathurins, fréquente le Cours Simon et est notamment figurant dans Les Visiteurs du soir[3]. Il n'a pas le bac et travaille comme stagiaire dans une librairie quand la monteuse Myriam Borsoutsky lui conseille de passer le concours de l'IDHEC[4]. Lors de l'examen oral, il a pour examinateurs l'écrivain Alexandre Arnoux, à qui il voue une grande admiration, et le critique Jean Mitry, avec qui il parle longuement du cinéma muet et du cinéma allemand[4]. Il est admis à l'IDHEC en 1943 dans la section montage[5],[6]. En 1946, en Allemagne, il participe au Théâtre aux Armées sous la direction d'André Voisin. La même année, il est assistant-réalisateur sur le long métrage documentaire Paris 1900 [n 2] .

Sa carrière de réalisateur professionnel commence avec Van Gogh, en 1948, un court métrage documentaire produit par Pierre Braunberger, récompensé à la Biennale de Venise et aux Oscars. Il tourne ensuite plusieurs documentaires durant une dizaine d'années. Les thèmes abordés sont très variés : la guerre d'Espagne vue par Picasso dans le court métrage Guernica en 1950, ou l'usine Pechiney. Le prix Pulitzer de la cinématographie lui est décerné le .

Les courts métrages de Resnais impressionnent la critique. Par exemple, après la projection du Chant du styrène au Festival de Tours 1958, Jean-Luc Godard, alors critique de cinéma dans l'hebdomadaire Arts, est enthousiaste. Il y voit un film « olympien, d'une gravité sans égale »[7]. Contemporain de la Nouvelle Vague, Alain Resnais est rapidement apparenté au groupe de la « Rive gauche », très engagé, dont font partie Chris Marker avec lequel il co-réalise le film anticolonialiste Les statues meurent aussi (prix Jean-Vigo 1954, le film est interdit par la censure pendant onze ans) et Agnès Varda dont il monte La Pointe-Courte, le premier long métrage[8],[9]. En 1956, il obtient à nouveau le Prix Jean-Vigo pour Nuit et Brouillard, produit par Anatole Dauman et devenu depuis, grâce à Henri Michel, qui en avait pris l'initiative et en était le conseiller historique, un film de référence sur les camps d'extermination[10].

Alain Resnais en 1959. Photo d'identité (Sacem).

Longs métrages[modifier | modifier le code]

Resnais réalise son premier long métrage de fiction, Ouvert pour cause d'inventaire, film qui ne sortira pas en salles et serait aujourd'hui perdu, avec Danièle Delorme dans le rôle principal et une équipe bénévole[11]. Il le décrit en 2006 comme un film « fait pour être projeté à douze personnes »[11].

En 1959, il met en scène son deuxième film de fiction, financé par Dauman et écrit par Marguerite Duras : Hiroshima mon amour. Le film est présenté hors compétition au Festival de Cannes 1959 et divise d'emblée les spectateurs. Dès la fin de la projection, le président du jury, Marcel Achard, s'exclame tout haut : « C'est de la merde ! » tandis qu'un autre juré, Max Favalelli, lui rétorque : « Non, c'est l'œuvre d'un authentique génie »[12]. Le film a un retentissement mondial : il est apprécié à la fois par la critique et le public. Selon Louis Malle, « ce film fait faire un bond dans l'histoire du cinéma ». Godard déclare plus tard être jaloux du film : « Je me souviens avoir été très jaloux de Hiroshima mon amour. Je me disais : « Ça c'est bien et ça nous a échappé, on n'a pas de contrôle là dessus. » »[13].

Homme aux cheveux blanc.
Pierre Arditi a tourné dix films avec Alain Resnais depuis Mon oncle d'Amérique (1979) jusqu'à Vous n'avez encore rien vu (2012).
Homme aux cheveux gris avec des lunettes.
Lambert Wilson est devenu un acteur régulier d'Alain Resnais (quatre films) depuis son rôle dans On connaît la chanson (1997).

L'œuvre déconstruit les concepts classiques du récit cinématographique et expose, de manière novatrice, la problématique de la mémoire et du temps perdu. Elle évoque également les traumatismes de la Seconde Guerre mondiale[5]. Avec 2,2 millions d'entrées en France, elle est un immense succès[14]. Hiroshima obtient d'ailleurs, en 1959, le prix Méliès ex æquo avec un autre film qui, comme lui, connaît un succès fulgurant et devient immédiatement un classique du cinéma : Les Quatre Cents Coups de François Truffaut.

Deux ans plus tard, Resnais fait de nouveau sensation avec L'Année dernière à Marienbad, cinéroman créé en compagnie d'Alain Robbe-Grillet. Le réalisateur opte pour le noir et blanc et le décor intérieur d'un château hors du temps où déambulent des personnages fantomatiques. Il commence à affirmer un style teinté de surréalisme et de distanciation brechtienne[15]. Son désir d'élaborer une forme expérimentale y est aussi réaffirmé[15]. Si une partie de la critique vante sa puissance créatrice, une autre lui reproche son abstraction, son hermétisme et son manque de profondeur politique dans une période qui ne l'est pas (les années 1960)[16]. Néanmoins, on retrouve souvent, dans les films de Resnais un engagement social et politique et un goût de l'histoire récente (le colonialisme, la guerre d'Algérie, etc.). En , il est par ailleurs l'un des signataires du Manifeste des 121, titré « Déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie », et Hiroshima prenait la bombe atomique et la Collaboration en toile de fond[9]. L'Année dernière à Marienbad, qui révèle l'actrice Delphine Seyrig, est un grand succès[17] : le public est encore au rendez-vous et le film réalise 880 000 entrées en France[18].

Le schéma de réception critique reste, à quelques exceptions près, le même pour chaque film : si l'œuvre du cinéaste fascine, elle en irrite certains[16]. Michel Mourlet, par exemple, dénonce le fait que, « l'objet le plus anecdotique se trouve sur le même plan que le plus important ». Il y voit un « esthétisme académique et vide »[19]. À propos de L'Année dernière à Marienbad et d'Hiroshima mon amour, il écrit : « Aucune connaissance de l'acteur, aucun empire sur le décor, les éléments, aucun sens du récit, rien que de pauvres petits essais d'intellectuels qui jouent gravement à faire du cinéma »[20].

Muriel, ou le Temps d'un retour (1963), scénarisé par Jean Cayrol, traite de la torture pendant la guerre d'Algérie. Le film rassemble moins de spectateurs que les précédents (430 000 entrées)[21].

La guerre est finie (1966), écrit par Jorge Semprún, raconte l'histoire d'un militant communiste interprété par Yves Montand, évoluant dans un réseau républicain, sur fond de guerre d'Espagne et d'anti-franquisme.

En 1967, il participe au film collectif Loin du Vietnam, coordonné par son ami Chris Marker en solidarité avec le peuple vietnamien. Plutôt que de filmer des images documentaires réalisées sur les lieux du conflit ou aux États-Unis, Alain Resnais préfère capter les réflexions d'un intellectuel parisien, interprété par Bernard Fresson, sur cette guerre et son caractère éminemment médiatique[22]. Ce projet, profondément politique, n'attire pas un public nombreux (60 000 entrées en France)[23].

En 1968, avec Je t'aime, je t'aime, écrit par Jacques Sternberg, Alain Resnais réalise un film d'une grande modernité sur le plan de la construction et de la mise en image d'une temporalité éclatée[24].

Stavisky, en 1974, revient sur l'un des plus gros scandales financiers de la Troisième République. Optant pour un cinéma plus commercial et choisissant une vedette populaire (Jean-Paul Belmondo), le réalisateur prolonge néanmoins ses recherches plastiques et sa réflexion sur l'histoire[16]. Le film rassemble un million de spectateurs en salles[25].

En , Alain Resnais décrit le processus de la création littéraire[26] dans Providence, d'après le scénario du dramaturge britannique David Mercer. Mêlant délire, fantasme et réalité prosaïque, Providence, hommage à l'écrivain H.P. Lovecraft, est interprété, en anglais, par des comédiens anglo-saxons (Dirk Bogarde, Ellen Burstyn et David Warner). Il brosse le portrait d'un écrivain vieillissant tirant le fil de sa vie et de ses personnages comme des marionnettes. Le film se conçoit comme une mise en abyme du récit et un questionnement dense sur la création artistique[16]. Il réalise 650 000 entrées en France[27].

Avec Mon oncle d'Amérique, écrit par Jean Gruault, Resnais met de manière didactique en application, à travers le parcours de trois personnages issus de milieux sociaux différents, les thèses anthropologiques du scientifique Henri Laborit. Celles-ci sont exposées, de manière ponctuelle, face caméra. Le film remporte un grand succès public avec 1,3 million d'entrées en France[28].

À partir des années 1980, le cinéaste s'entoure pour La Vie est un roman, L'Amour à mort et Mélo, d'un nouveau trio d'acteurs qui ne le quitte plus : Sabine Azéma, Pierre Arditi et André Dussollier[9]. Ces trois films sont également interprétés par Fanny Ardant. Si la première de ces trois réalisations explore différentes temporalités par le prisme d'un lieu unique (un château devenu école), les deux autres marquent une rupture par le choix d'une structure linéaire, mais aussi par leur tonalité intimiste et sépulcrale. Elles rencontrent un succès mitigé : La Vie est un roman attire 300 000 spectateurs en France[29], L'Amour à mort 350 000[30] et Mélo 550 000[31].

Produit par Marin Karmitz, I Want to Go Home, qui rend hommage à l'univers de la bande dessinée et dont le scénario est signé de l'auteur américain Jules Feiffer, reste le plus gros échec commercial du réalisateur : le film totalise, en 1989, 40 878 entrées[32].

Femme aux cheveux bruns.
Sabine Azéma est à la fois la compagne et l'actrice principale d'Alain Resnais depuis La vie est un roman.

Dans les années 1990, Alain Resnais s'ouvre à de nouvelles collaborations, avec le duo de scénaristes-acteurs Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui puis touche un plus large public, développant l'aspect ludique de son cinéma.

En 1993, il revisite le théâtre avec une adaptation de huit pièces d'Alan Ayckbourn (Intimate Exchanges) : Smoking / No Smoking, diptyque sur les possibles de l'existence dans lequel Sabine Azéma et Pierre Arditi jouent neuf rôles. Les films réalisent respectivement 400 000 et 350 000 entrées en France[33],[34].

Homme blond tenant un prix.
André Dussollier remporte, en 1998, le César du meilleur acteur pour son rôle dans On connaît la chanson. Au total, il a joué dans six films du réalisateur.

Il s'essaie à la comédie musicale avec On connaît la chanson en 1997, qui fait intervenir, dans des dialogues issus de situations quotidiennes, le répertoire de la chanson populaire. Contrairement aux comédies musicales classiques, les acteurs ne chantent pas et ce sont les interprétations originales des chansons qui sont synchronisées sur leurs lèvres. Ce principe a déjà été expérimenté à la télévision anglaise par Dennis Potter (1935-1994) auquel Alain Resnais rend hommage dans le générique. À la différence de Potter, le cinéaste n'introduit que des extraits de chansons, et jamais l'intégralité des titres. De plus, il ne fait pas danser ses personnages lors des plages musicales[35]. Écrit par le tandem Jaoui / Bacri, le scénario prend pour thèmes la dépression et les faux-semblants. Il s'apparente au théâtre de boulevard et l'humour repose sur une série de quiproquos et de malentendus[36]. Le film est un immense succès public et le plus important de son réalisateur avec 2,6 millions d'entrées en France[37]. Il est également exporté et totalise 3,3 millions d'entrées dans l'ensemble de l'Union européenne[38]. Ce film est par ailleurs l'un des plus grands succès critiques du cinéaste[35].

En 2003, Resnais s'attaque à l'opérette avec Pas sur la bouche. Le ton enjoué et grivois s'y veut proche des films burlesques et du vaudeville. Avec 640 000 entrées, le film est un succès public[39].

En 2006, Cœurs dépeint la solitude de personnes égarées dans un Paris onirique, enneigé et tragi-comique. Le film est un succès avec 540 000 entrées enregistrées en France[40].

Les Herbes folles (2009), tiré d'un roman de Christian Gailly, est une histoire d'amour démentielle qui se situe ouvertement du côté de la fantaisie dramatico-bouffonne. Bien que déroutant et touffu, le film, qui divise la critique[41], trouve son public et totalise 460 000 entrées[42].

En 2012, Resnais sort Vous n'avez encore rien vu qui narre la convocation post mortem, par un auteur dramatique, de sa troupe d'acteurs fétiches dans une villégiature du Sud de la France où elle sera amenée à juger la captation de sa pièce de théâtre Euridyce que lui a envoyée une troupe de théâtre qui lui demande l'autorisation de la monter. Le titre du film est un hommage à l'acteur Al Jolson qui avait créé, en 1919, une chanson intitulée Vous n'avez encore rien entendu, et qui réutilise l'expression You ain't heard nothin' yet dans Le Chanteur de jazz (1927), premier long métrage partiellement parlant de l'histoire du cinéma. L'idée du scénario vient du producteur Jean-Louis Livi qui a suggéré à Resnais de faire un film à partir d'Eurydice. La réalisation s'inspire également d'une autre pièce de Jean Anouilh intitulée Cher Antoine ou l'Amour raté. À côté des acteurs fétiches de Resnais, on trouve aussi des acteurs habitués des films de Bruno Podalydès (Bruno et Denis Podalydès, Jean-Noël Brouté, Michel Vuillermoz) ou issus de l'univers d'Arnaud Desplechin (Mathieu Amalric, Hippolyte Girardot, Anne Consigny)[43]. Le succès en salles est moins important que pour ses films précédents (155 000 entrées en France)[44]. Le film provoque d'ailleurs des réactions contrastées au sein de la critique[45].

Son ultime réalisation, Aimer, boire et chanter, dans laquelle il dirige deux nouvelles interprètes, Sandrine Kiberlain et Alba Gaïa Bellugi, en plus de sa troupe (Caroline Silhol, elle, avait joué dans La vie est un roman), sort quelques semaines après son décès, le . Le film, conçu comme un vaudeville énergique, mélancolique et novateur[46], réunit 312 186 spectateurs en salles[47].

Alain Resnais « était en train de préparer, avec moi, un autre film dont il avait écrit le premier scénario » a indiqué le producteur Jean-Louis Livi à la suite de l'annonce de sa disparition[48].

groupe de personnes.
L'équipe du film Vous n'avez encore rien vu au festival de Cannes 2012.

Mort et hommages[modifier | modifier le code]

Tombe d'Alain Resnais au cimetière du Montparnasse (division 4).

Hospitalisé depuis plus d'une semaine, il meurt le à Neuilly-sur-Seine à l'âge de 91 ans. Ses obsèques ont lieu le à Paris, à l'église Saint-Vincent-de-Paul, en présence de nombreuses personnalités du spectacle parmi lesquelles plusieurs de ses acteurs fétiches[49]. Il est inhumé le même jour au cimetière du Montparnasse (division 4) dans la même ville.

À l'annonce de sa disparition, nombre d'artistes évoquent leurs souvenirs du cinéaste[50]. De nombreux hommages, dont ceux du président de la République François Hollande et de la ministre de la Culture Aurélie Filippetti, lui sont rendus[51]. À l'UGC Normandie, sur les Champs-Élysées à Paris, l'avant-première officielle de son dernier film Aimer, boire et chanter, le jour même de ses obsèques, se double d'un rassemblement en sa mémoire auquel assistent François Hollande et Aurélie Filippetti[52],[53].

En , peu après l'hommage rendu au cinéaste par Lambert Wilson lors de la Cérémonie d'ouverture du 67e Festival de Cannes, le Carrosse d'or de la Quinzaine des réalisateurs lui est remis à titre posthume pour l'ensemble de son œuvre[54].

Vie privée[modifier | modifier le code]

Il épouse en 1969 son assistante de l'époque, Florence Malraux, fille d'André et Clara Malraux, qui travaillait avec lui depuis La Guerre est finie et qui l'accompagne jusqu'à Mélo, en 1986. Il a une fille, Camille Bordes-Resnais, réalisatrice[55]. Depuis la fin des années 1980, il partage la vie de Sabine Azéma, son actrice fétiche, de 27 ans sa cadette, qu'il épouse en 1998[56],[57].

Il se définit comme un athée mystique[58].

Cinéaste célébré[modifier | modifier le code]

Trois fois lauréat du Prix Louis-Delluc (en 1966 pour La Guerre est finie, en 1993 pour Smoking / No Smoking et en 1997 pour On connaît la chanson), Alain Resnais est le metteur en scène le plus souvent nommé au César du meilleur réalisateur : huit fois au total. Il a d'ailleurs obtenu la récompense à deux reprises : en 1978 pour Providence et en 1994 pour Smoking / No Smoking. Il est également l'unique cinéaste à avoir vu trois de ses œuvres couronnées par le César du meilleur film : Providence en 1978, Smoking / No Smoking en 1994 et On connaît la chanson en 1998.

Considéré comme un excellent directeur d'acteurs, il a permis à plusieurs de ses comédiens d'être récompensés aux Césars : Sabine Azéma (Meilleure actrice pour Mélo), Pierre Arditi (Meilleur acteur pour Smoking / No Smoking et Meilleur second rôle pour Mélo), André Dussollier (Meilleur acteur pour On connaît la chanson), Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui (Meilleurs seconds rôles féminin et masculin pour On connait la chanson puis Meilleur scénario pour Smoking / No Smoking et On connaît la chanson) ou encore Darry Cowl (Meilleur second rôle pour Pas sur la bouche). Grâce à lui, Delphine Seyrig a également reçu la Coupe Volpi de la meilleure interprète à la Mostra de Venise 1963 pour Muriel, ou le Temps d'un retour et Claude Rich le Prix d'interprétation masculine au Festival de Saint-Sébastien 1968 pour Je t'aime, je t'aime.

À noter que ses techniciens ont souvent été mis à l'honneur : son chef décorateur fétiche Jacques Saulnier lui doit deux de ses trois Césars (Providence et Smoking / No Smoking), puis ses monteurs Albert Jurgenson et Hervé de Luze leur toute première statuette pour le meilleur montage (Providence pour le premier et On connaît la chanson pour le second).

Resnais est un metteur en scène célébré internationalement, cumulant un Oscar à Hollywood (Van Gogh, Meilleur court métrage en deux bobines en 1950), un BAFTA au Royaume-Uni (Hiroshima mon amour), un Lion d'or et un Lion d'argent à Venise (respectivement pour L'Année dernière à Marienbad et Cœurs), trois Ours d'argent à Berlin (Smoking / No Smoking, On connaît la chanson et Aimer, boire et chanter) puis un Grand Prix du Jury à Cannes (Mon oncle d'Amérique). En 2009, il reçoit des mains d'Isabelle Huppert, présidente du jury, le Prix Exceptionnel du 62e Festival de Cannes pour Les Herbes folles et l'ensemble de son œuvre[5].

Analyse de son œuvre[modifier | modifier le code]

Motifs formels[modifier | modifier le code]

L'œuvre de Resnais dénote une profonde unité car elle reste fidèle à une thématique ciblée : celle des possibilités existentielles, des flux de conscience, du libre arbitre, du déterminisme et du conditionnement socio-culturel[59]. Elle est traversée par des motifs formels répétés : travellings vertigineux, surimpressions, expérimentations sonores et montage segmentant le temps et le récit[60],[61]. Le passé de monteur du cinéaste influence beaucoup ses réalisations qui malmènent la chronologie et unissent ou séparent des scènes et des images disparates dans l'esprit du surréalisme et du collage en peinture[46]. Resnais développe une approche esthétique singulière dans sa manière de fixer des lieux, des figures et des objets insolites[62]. Le mouvement de la caméra ou l'alternance entre ornements décoratifs et observation psychologique accompagnent un goût prononcé de l'exercice de style[62]. Ses recherches narratives et formelles entremêlent imagination et réalité[62]. À travers une démarche expérimentale, on note une réflexion approfondie sur la psyché[62]. Le metteur en scène n'applique toutefois jamais la même recette à deux films ce qui contribue à la grande richesse de son style[61]. Selon Pierre Arditi, « rien ne ressemble moins à un film d'Alain Resnais qu'un autre film d'Alain Resnais »[63].

« Je souhaite approcher par le fi