Bouaké

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Bouaké
Bouaké
Administration
Pays Drapeau de la Côte d'Ivoire Côte d'Ivoire
District Vallée du Bandama
Région Gbêkê
Département Bouaké
Maire
Mandat
Amadou Koné
2023-2028
Démographie
Gentilé Bouakéen(e), Bouakois(e)
Population 832 371 hab.[1] (2021)
Densité 711 hab./km2
Géographie
Coordonnées 7° 41′ 00″ nord, 5° 01′ 59″ ouest
Superficie 117 000 ha = 1 170 km2
Localisation
Géolocalisation sur la carte : Côte d'Ivoire
Voir sur la carte topographique de Côte d'Ivoire
Bouaké
Géolocalisation sur la carte : Côte d'Ivoire
Voir sur la carte administrative de Côte d'Ivoire
Bouaké

Bouaké, appelée Gbékékro jusqu'en 1900, est une ville du centre de la Côte d'Ivoire, située à 350 km environ d'Abidjan. Capitale du district de la Vallée du Bandama et chef-lieu du département homonyme et de la région du Gbêkê, avec une population d'environ 832 371 habitants[2]. Son agglomération englobe environ 1,5 million d'habitants en comptant toutes les localités agglomérées qui y sont rattachées. Bouaké est la deuxième ville la plus peuplée du pays après Abidjan.

Desservie par la ligne des chemins de fer Abidjan-Niger qui relie Abidjan à Ouagadougou au Burkina Faso, Bouaké constitue un carrefour commercial important, et abrite à cet effet un marché de gros de renommée sous-régionale, le seul d'Afrique de l'Ouest[3]. La ville dispose d'un réseau de transports urbains moderne qui comprend des bus et des taxis.

La population bouakéenne (ou bouakoise), est constituée essentiellement de Baoulés originaires du Ghana. Appelée capitale des populations d'ethnie baoulé, Bouaké était restée, de 2002 à l’élection présidentielle de fin 2010, sous le contrôle des Forces armées des forces nouvelles, et était devenue la capitale de la rébellion. La ville s'est également rendue célèbre à travers son carnaval, événement culturel fortement médiatisé jusqu'à une date récente. La ville renaît et connaît un développement.

Géographie[modifier | modifier le code]

Situation[modifier | modifier le code]

Grains de café au stade de la maturation.

La ville de Bouaké se trouve au centre de la Côte d'Ivoire, sur un relief plat et peu élevé, avec une importante constellation de villages autour d'elle : 143 villages sont dénombrés dans un rayon de 20 kilomètres[4]. Bouaké est recouverte d'une savane boisée et traversée par la rivière Kan, affluent du N'Zi. Le Centre de la Côte d'Ivoire étant un peu plus « touffu » que le Nord, cela explique la présence de plantations de cacaoyers et de caféiers dans la région bouakéenne[5].

Bouaké, située à la latitude 7°69 N et à la longitude 5°03 O, s'étend sur une superficie d'environ 72 km2[6]. Desservie par les autoroutes A3 et A8, elle se situe au nord des villes de Tiébissou et Didiévi, au sud de Dabakala et Katiola, à l'est de Béoumi, Botro et Sakassou et à l'ouest de Brobo et M'bahiakro sur l'A8, Satama-Sokoro et Satama-Sokoura sur l'A10.

Climat[modifier | modifier le code]

Bouaké est influencée par un climat tropical humide. Bouaké[7] possède un climat plus « sain » qu'Abidjan[8]. Le climat du Nord est plus contrasté que celui du Sud : l'amplitude thermique est plus élevée (22e à 35e = 13)[8]. L'ensoleillement est plus constant et l'hygrométrie (pluies) plus faible qu'au sud.

On distingue deux saisons pour le climat du nord : la saison des pluies allant de mai à novembre et la saison sèche allant de novembre à mai. L'harmattan, le vent du Sahara, intervient dans la saison sèche vers janvier-février, transportant du sable et desséchant tout sur son passage[8]. La période la plus confortable pour voyager est celle de novembre à mars : le ciel est bleu, l'air sec et les nuits plus fraîches.

On distingue quatre saisons pour la ville de Bouaké[9] :

Climat - Ville de Bouaké.
Mois Température (C) Précipitations (mm)
janvier 27.1 13
février 28.0 46
mars 28.4 92
avril 27.9 140
mai 27.2 154
juin 26.1 135
juillet 24.8 99
août 24.5 108
septembre 25.5 225
octobre 26,0 140
novembre 26.7 35
décembre 26.7 23

Géologie et pédologie[modifier | modifier le code]

Sur le vaste plateau du massif libérien, d'âge précambrien qui forme l'intérieur du pays, il est rare d'apercevoir les roches sous-jacentes, à savoir les schistes cristallins ou orthogneiss. Au nord de Bouaké, il existe aussi une zone de schistes et quartzites fortement redressés, par plissement. Les roches schisteuses fortement dégradées donnent naissance, soit par formation locale de latérites qui amenuisent les bancs de quartz, à des éluvions, soit, par mobilisation et transport par l'eau, à des alluvions : les éluvions demeurant in situ et les alluvions des rivières peuvent être exceptionnellement aurifères. Les pegmatites de Bouaké sont aussi susceptibles de fournir des plaques de micas blancs ou muscovite[10]. Des couches de minerais à base de chalcopyrites peuvent être exploitées dans le pays baoulé.

Les sols autour de Bouaké, et d'une manière générale du Baoulé, dans le triangle formé par la Bandama à l'ouest et le N'Zi à l'est, sont des terrains argileux et poreux, qui supportent une végétation de bois et de savane, cette dernière après une longue dégradation anthropique[11].

Toponymie[modifier | modifier le code]

Avant la fin du XIXe siècle, le nom de la ville était Gbékékro. Kro signifiant un "endroit habité et protégé", soit au choix une ville ou une agglomération, un village ou un campement en baoulé, Gbékékro signifie donc la « ville de Gbéké » en référence au chef Gossan Gbéké, ancien roi de Gbékékro au XIXe siècle.

S'agissant du nom actuel, Bouaké, deux hypothèses peuvent être formulées[12]:

  • le nom du chef Kwa Gbéké a connu des déformations successives pour devenir Bouaké ; Gbouéké est cité comme le roi de race baoulé qui fonde la ville en 1865[13];
  • le nom Bouaké proviendrait selon une tradition populaire de deux mots baoulés : « Boua » qui signifie mouton et « Ké » qui signifie sec. En effet, à l'arrivée des Baoulés sur les lieux, ils auraient été étonnés de voir des Dioulas faire sécher des peaux de moutons.

Histoire[modifier | modifier le code]

La savane boisée des Baoulés du XXe siècle, ce "pays baoulé" charnière entre terres arborées de plantations et cultures villageoises, n'a pas toujours existé[14]. De nombreux indices, sans mentionner les mythes de "petits hommes" premiers habitants, témoignent de la présence d'une grande forêt dense et humide[15].

Histoire précoloniale[modifier | modifier le code]

Ce recul forestier aurait duré des millénaires et explique l'importance cruciale des échanges au nord entre les amonts des fleuves Sénégal et Niger, et la position complètement marginale de la contrée étudiée aux temps des florissantes entités successives (royaume de Ghâna vers l'an mil, l'empire musulman du Mâli vers 1300 et l'empire Songhai vers 1500). Mais il ne faudrait nullement en conclure, du fait de l'ancienne variété des paysages et de l'adaptation des techniques plurimillénaires, à un effacement ou une moindre puissance des groupements ashantis.

En dépit d'un premier désenclavement maritime du Golfe de Guinée par les navigateurs portugais, à la fin du XVe siècle (à l'initiative du prince Henri le Navigateur)[16], l'économie régionale, marquée longtemps par des axes fluviaux médiocres et des routes caravanières secondaires, reste invariablement tournée vers l'arrière-pays, apportant du nord le sel et la poudre. Avant le XIXe siècle, l'agglomération initiale devenue Bouaké est une des multiples stations des routes caravanières, alimentant également au Sud un important marché aux esclaves des Portugais dans le cadre du commerce triangulaire[17].

Dès le début du XVIIIe siècle, les Akans, qu'ils soient Agni ou Baoulé, investissent irrésistiblement le sud-est de l'actuelle Côte d'Ivoire, égrenant royaumes et chefferies vers 1715 au son du grand tam-tam et apportant leurs trois grandes divinités "Firmament, Terre et Ancêtres"[18]. Au cours de ce siècle, dans les environs de Bouaké, les derniers villageois sénoufos et mandés (Gouro) sont refoulés par les Baoulés, qui prennent, par leurs rois, artisans et paysans, le contrôle de la région[19]. Les ethnologues ont remarqué la variation des traits caractéristiques des Baoulés migrant vers l'ouest : ils changent insensiblement par un long métissage autant génétique que culturelle. Les forgerons baoulés ne fabriquent pas seulement la lance du guerrier et la hache du bûcheron, ils sont aussi souvent après spécialisation, maître charpentier ou sculpteur, orfèvre expérimenté confectionnant des bijoux en or (plaquettes, épingles à cheveux, petits masques) ou fondeur de métaux précieux pour les échanges monétaires (sombé).

Les masques sculptés par ces artisans polyvalents, sont généralement en bois dur, ornés de pigments naturels et décorés par des tissus, des coquillages, des plumes, de fleurs et autres éléments colorés. Ils restent souvent associés à un type de cérémonie ou même à une occasion rituelle précise, et gardent une grande importance dans la culture et la religion baoulées. Ces pièces souvent uniques, en terme de design ou de détails, et non en terme d'intercession avec les ancêtres et les esprits, sont souvent considérées aujourd'hui comme des œuvres d'art à part entière.

XIXe siècle[modifier | modifier le code]

Un chef traditionnel et sa délégation exécutant des pratiques « animistes ».

C'est en 1858 qu'est fondé le marché rural de Gbékékro, avec celui de Kotia Kofikro[20]. Son chef est Gossan Kwa Gbeke, roi baoulé et chef charismatique de guerre, sage légendaire connu pour l'autorité exercée sur son peuple, c'est-à-dire ses partisans[21], de la tribu des Assabous (groupe Akan). Il aurait succédé à la reine Pokou et à sa nièce Akwa Boni, connues pour leur grande épopée légendaire à travers la savane baoulé jusqu'à l'installation définitive de la famille royale baoulé dans la régi