Voir la source de Histoire de Wallis-et-Futuna

== Premiers contacts avec les Européens ==

=== Premiers explorateurs européens ===
[[Fichier:Schouten et Le Maire repoussent les futuniens en 1616.jpeg|alt=Gravure en noir et blanc représentant une île montagneuse avec une frégate située à l'embouchure d'un fleuve. Un canot est entouré de petites pirogues ; un des hommes sur le canot tire un mousquet sur ses poursuivants|vignette|Cette gravure de 1618 montre l'équipage de [[Willem Schouten]] tentant d'échapper aux pirogues des futuniens. Les hollandais sont les premiers européens à aborder [[Futuna]] en [[1616]].]]
Le premier contact de [[Futuna]] avec des [[Europe|Européens]] a lieu en 1616 : les Hollandais [[Willem Schouten]] et [[Jacob Le Maire]], sur l{{'}}''Eendracht'' (350 [[tonneau (unité)|tonneaux]]) et le ''Hoorn'' ({{nobr|100 tonneaux}}), jettent l'[[Ancre (mouillage)|ancre]] le {{date|21 mai 1616}} et abordent Futuna en [[chaloupe]] le 22 mai [[1616]]. Ils baptisent les deux îles Futuna et Alofi ''[[îles Horn|îles de Hoorn]]'' en référence à leur port d'embarquement. Ils restent environ 8 jours sur l'archipel avant de repartir vers la [[Nouvelle-Guinée]] et les [[Moluques]]. [[Louis-Antoine de Bougainville]] atteint Futuna le 11 mai 1768 et, frappé par son isolement, la nomme « l'enfant perdu du Pacifique »<ref name=":0" />.
[[Fichier:Wallis island picture by Samuel Wallis, ca 1767.jpg|alt=Dessin en noir sur fond beige, montrant un navire européen ({{s-|XVIII}}) dans une baie, entouré de petits canots ; au fond, l'île de Wallis est représentée, avec des collines.|vignette|En 1767, le capitaine britannique [[Samuel Wallis]] aborde l'île d'Uvea, qui reçoit son nom. Dessin réalisé par Samuel Wallis mentionnant « {{Langue|en|Wallis Island}} », vers 1767.]]
L'île de [[Wallis (île)|Wallis]] n'est visitée par les Européens que 150 ans après Futuna. Le 17 août 1767, le Britannique [[Samuel Wallis]], capitaine du ''Dolphin'', de retour de [[Tahiti]], aborde l'île mais n'y débarque pas, du fait de l'hostilité des wallisiens<ref group=AngA>{{Harvsp|Angleviel|1994|p=24}}</ref>. L'équipage donne son nom à l'île<ref name="jso_0300-953">{{Article|prénom1=Raymond|nom1=Mayer|titre=Un millier de légendes aux îles Wallis et Futuna et divers centres d'intérêt de la tradition orale|périodique=Journal de la Société des océanistes|volume=29|année=1973|doi=10.3406/jso.1973.2413|lire en ligne=http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jso_0300-953x_1973_num_29_38_2413|consulté le=2016-04-29|pages=69–100}}</ref>. Les autochtones la nomment Uvéa (en [[wallisien]] ''{{Langue|wls|texte = ʻUvea}}''), nom encore très utilisé. Selon Raymond Mayer, Samuel Wallis n'est pas passé au sud par la [[passe Honikulu]], mais serait arrivé au niveau du district nord de [[Hihifo]], en passant par la passe Fatumanini ou la passe Fugauvea<ref name="jso_0300-953"/>.

En 1781, une expédition [[Espagne|espagnole]] conduite par le capitaine [[Francisco Antonio Mourelle de la Rúa]] aborde {{Langue|wls|texte = ʻUvea}}<ref name=":10">{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Edward Edwards (amiral)|Edward Edwards]]|auteur2=George Hamilton|titre=Voyage of H.M.S. Pandora, by Edward Edwards and George Hamilton|sous-titre=DESPATCHED TO ARREST THE MUTINEERS OF THE 'BOUNTY' IN THE SOUTH SEAS, 1790-91|lieu=Londres|éditeur=Francis Edwards|année=1915|passage=64|lire en ligne=http://www.gutenberg.org/files/22834/22834-h/22834-h.htm#Page_64}}</ref> (ou Futuna){{Pas clair}}, qui est baptisée ''{{Langue|es|texte = Consolación}}''<ref>{{Article|langue=es|auteur1=Miguel Ángel Puig-Samper|titre=Las expediciones científicas españolas en el siglo XVIII|périodique=Revista del Instituto Alicantino de Cultura Juan Gil-Albert|numéro=57|année=2011|lire en ligne=https://www.casadevelazquez.org/fileadmin/fichiers/investigacion/Ateliers/Conocer/Las_expediciones_cient%C3%ADficas_espa%C3%B1olas_en_el_siglo_XVIII.pdf|pages=20-41}}</ref>. Le 5 août 1791, le capitaine [[Edward Edwards (amiral)|Edward Edwards]], à la poursuite des [[Mutinerie de la Bounty|révoltés du Bounty]], s'arrête à Wallis. il tente d'offrir des cadeaux aux habitants, mais les wallisiens s'enfuient par peur<ref name=":10" />{{,}}<ref>{{Article|langue=en|prénom1=William H.|nom1=Pearson|titre=The reception of european voyagers on Polynesian islands, 1568-1797.|périodique=Journal de la Société des océanistes|volume=26|année=1970|doi=10.3406/jso.1970.2151|lire en ligne=http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jso_0300-953x_1970_num_26_27_2151|consulté le=2016-04-28|pages=121–154}}</ref>.

Loin des routes empruntées par les navires européens, 'Uvea et Futuna restent longtemps en marge des contacts qui deviennent à cette époque de plus en plus nombreux entre océaniens et occidentaux dans le reste de la Polynésie, ce qui explique notamment qu'elles aient pu maintenir de nombreux traits culturels jusqu'à aujourd'hui et qu'elles n'aient pas subi de véritable colonisation.

Lors du contact avec les Européens, 'Uvea et Futuna étaient relativement peu peuplées : Patrick Kirch estime que 'Uvea comptait {{nombre|4000|habitants}} et Futuna {{formatnum:2000}} environ, soit moins que les îles voisines (à titre de comparaison, Tonga comptait à la même époque environ {{nombre|40000|habitants}})<ref group=K>{{Harvsp|Kirch|1984|p=98}}</ref>.
[[Fichier:Coastal view of Wallis Island by Cook (1773).jpg|alt=Gravure montrant une île assez plate, avec des îlots où se trouvent des palmiers.|Vue de l'île de [[Wallis (île)|Wallis]] en 1773 par le [[James Cook|capitaine Cook]]. L'îlot rocheux de Nukufotu est visible sur la gauche : il s'agit du nord de l'île, dans le district de [[Hihifo]]. Le relief de l'île a été exagéré<ref name="jso_0300-953" />.|center|vignette|upright=3.2]]

=== Le temps des baleiniers et des ''{{Langue|en|texte=beachcombers}}'' ===
[[Fichier:Wallis Mu'a district fr.svg|alt=Carte topographique de Wallis avec l'océan pacifique en bleu, les terres en brun et le district du sud de l'île en blanc|thumb|Au {{XIXe siècle}}, le [[Mu'a (Wallis)|district de Muʻa]] fut souvent visité par des navires européens. En 1831, un commerçant tenta même de s'implanter sur l'îlot de [[Nukuatea]], en face de la [[passe Honikulu]].]]
Au cours du {{XIXe siècle}}, des ''{{Langue|en|texte=beachcombers}}'' (« écumeurs des plages »), matelots déserteurs, commencent à arriver à Wallis et à Futuna. D'après Frédéric Angleviel, le premier navire européen connu accoste à Wallis en 1825 ; d'autres [[baleinier]]s suivront en 1828<ref group=AngA>{{Harvsp|Angleviel|1994|p=32}}</ref>. Les chefs du sud de Wallis, là où abordent les bateaux, acquièrent assez rapidement un pouvoir important. Certains wallisiens maîtrisent même l'anglais et peuvent donc contrôler le commerce avec l'extérieur. Cela ne manque pas de déstabiliser le ''[[Lavelua]]'', souverain de l'île. À la même époque, certains marins commencent à s'installer durablement sur Uvea. Cette période dure trente-six ans<ref group=AngA>{{Harvsp|Angleviel|1994|p=50}}</ref>. Entre 1825 et 1858, 110 passages de navires occidentaux ont été enregistrés à Wallis<ref name=":11">{{Article|auteur1=Frédéric Angleviel|titre=Wallis 1825-1858. Contacts, mutations, permanences.|périodique=Revue française d'histoire d'outre-mer|volume=76|numéro=284|année=1989|lire en ligne=http://www.persee.fr/doc/outre_0300-9513_1989_num_76_284_2744|pages=95-110}}</ref>. D'après [[Frédéric Angleviel]], {{Citation|ces ''{{langue|en|beachcombers}}'' ou « batteurs de grève » s'intègrent progressivement à la société wallisienne tout en bénéficiant de leur statut d'Européens.}}<ref name=":11" />. Accueillis par la population locale et servant d'intermédiaire avec les navires de passage, leur nombre reste cependant limité (une dizaine tout au plus). Certains voyagent entre Wallis, Futuna et Fidji et se marient parfois avec des femmes autochtones<ref name=":11" />.

Les rencontres entre marins occidentaux (pour la plupart anglais ou américains) et polynésiens ne sont pas sans heurts, et aboutissent parfois à des massacres.

En 1830, le commerçant hawaïen George Marina (ou Manini<ref name=":13">{{Chapitre|prénom1=Sophie|nom1=Chave-Dartoen|titre chapitre=Chapitre 2|titre ouvrage=Royauté, chefferie et monde socio-cosmique à Wallis ('Uvea) : Dynamiques sociales et pérennité des institutions|éditeur=pacific-credo Publications|collection=Monographies|date=2018-09-24|isbn=978-2-9563981-7-2|lire en ligne=http://books.openedition.org/pacific/104|consulté le=2021-12-31|passage=105–144}}</ref>), métis espagnol, débarque à Wallis. Il emmène le chef [[Takala (roi d'Uvea)|Takala]] et plusieurs wallisiennes jusqu'à [[Hawaï (île)|Hawaï]], où il recrute un équipage pour la pêche des [[holothurie]]s (bêches de mer). Il revient à Wallis au début de 1831, à l'îlot [[Nukuatea]], qu'il achète au chef Takala en échange de pacotille (couteaux, haches, tissus et autres objets divers). Marina et son équipage hawaïen installent sur l'îlot une grande maison, un atelier de préparation des bêches de mer et des huttes pour loger les travailleurs. {{Citation|Dès lors, les Européens se considèrent propriétaires à la mode occidentale de l'île et essayent de s'en réserver l'usage. Or, ce mode de possession exclusif n'existe pas dans la société traditionnelle wallisienne et les altercations commencent}}<ref group=AngA>{{Harvsp|Angleviel|1994|p=34}}</ref>. Rapidement, la situation dégénère en conflit armé. Marina et ses hommes attaquent la résidence royale, occasionnant plusieurs morts. Le chef Takala est nommé Lavelua et {{Citation|les aristocrates de Hahake [sont] humiliés et réduits à la servitude}}<ref name=":13" />. Cependant, la population wallisienne n'accepte pas son autorité et [[Soane-Patita Vaimua Lavelua|Vaimua Takumasiva]] redevient le roi de Wallis. La victoire de Marina est de courte durée : fin janvier 1832, il est assassiné et une grande partie des hawaïens sont massacrés<ref group=AngA name="ang37">{{Harvsp|Angleviel|1994|p=37}}</ref>.
[[Fichier:Pirogues à balancier wallisiennes entourant un navire (aviso) français, 1900.jpg|alt=Gravure en noir et blanc montrant de nombreuses pirogues avec des hommes à leur bord, accoster un grand navire noir, très haut. Des trous pour les canons sont visibles dans la coque.|vignette|Des [[Pirogue à balancier|pirogues à balancier]] wallisiennes accostent un navire français, 1900.]]
L'année suivante, un nouveau massacre a lieu. Le 26 mars 1832, le baleiner britannique ''Holdham'' mouille à Wallis. En réponse au vol des vêtements de marins par les wallisiens, les hommes d'équipage pillent le village de Fagatoto et s'en prennent violemment aux habitants<ref group="AngA" name="ang37" />. De plus, le capitaine, sous l'emprise de l'alcool, annonce qu'il veut tuer le roi. Ces agressions entraînent la vengeance de Takala et de ses hommes, qui attaquent le navire le 12 avril. Armés de haches et d'armes à feu, ils tuent presque tous les hommes d'équipage du ''Holdham''<ref group="AngA">{{Harvsp|Angleviel|1994|p=38}}</ref>{{,}}<ref name=":3">{{Article|langue=en|auteur1=Anonyme|titre=Massacre of the Crew of the Ship Oldham by the Natives of Wallis Island|périodique=Nautical magazine|volume=2|numéro=17|lieu=Londres|date=1883|lire en ligne={{Google Livres |id=Go0EAAAAQAAJ |page=376 |surligne=Massacre of the Crew of the Ship Oldham by the Natives of Wallis Island}} |pages=376-383}}</ref>. 
Le lendemain, un navire américain découvre la tuerie et prévient un navire de guerre britannique, le H.M.S. ''Zebra''. Ce [[Sloop-of-war|sloop]] arrive à 'Uvea en juin 1832 et bientôt des échanges de tirs ont lieu : plusieurs wallisiens sont tués, dont Takala. Les marins britanniques sont ensuite reçus par le Lavelua, et sous la menace des armes, les wallisiens rendent les objets qu'ils ont pillé dans la cargaison du ''Holdham''<ref group="AngA">{{Référence Harvard sans parenthèses|Angleviel|1994|p=39}}</ref>. Les vexations subies par les wallisiens avec George Marina expliquent en partie pourquoi, après avoir été pillés par les marins anglais, les uvéens se sont vengés aussi violemment<ref name=":3" />.

Pour Frédéric Angleviel, ces contacts et intrusions ont eu des conséquences profondes sur les sociétés wallisienne et futunienne : {{Citation|révolutions techniques (fer, armes à feu, verre, tissu), introduction de nouvelles espèces animales (cheval, bovin, chat), bouleversements religieux, culturels, socio-économiques et politiques, et choc microbien (long isolat, maladies inconnues en Océanie)}}<ref name=":9">{{Chapitre|auteur1=Frédéric Angleviel|titre=Wallis-et-Futuna : l’alliance de la grande chefferie et de la croix dans la République|auteurs ouvrage=Jean-Yves Faberon, Florence Faberon|titre ouvrage=Religion et société en Nouvelle-Calédonie et en Océanie|éditeur=Centre Michel de l'Hospital (P.U. Clermont)|année=2013|date=|pages=140-151|isbn=978-2-912589-38-5|lire en ligne=https://www.academia.edu/7533232/11_ANGLEVIEL|périodique=Religion et société en Nouvelle-Calédonie et en Océanie}}</ref>.

La présence européenne à Wallis-et-Futuna n'est cependant significative qu'au {{s-|XIX}} avec l'arrivée de [[Missionnaire chrétien|missionnaires]] [[catholicisme|catholiques]].