Charles le Téméraire, (suite)
• Ami du dauphin Louis, dont les relations avec Charles VII sont mauvaises, il s'oppose par la suite à son compagnon, devenu Louis XI, en soutenant la ligue du Bien public, menée par le frère du roi, le duc de Bourbon, le duc de Bretagne François II et Jean de Calabre, fils du duc de Lorraine. Après une bataille indécise à Montlhéry, en 1465, le roi et Charles le Téméraire signent à Conflans un traité par lequel Louis XI rend à la Bourgogne les villes de la Somme qu'il avait rachetées à Philippe le Bon.
Devenu duc de Bourgogne en 1467, à la mort de son père, Charles le Téméraire reprend à son compte les ambitions paternelles et tente de reconstituer à son profit le royaume carolingien de Lotharingie. Dans sa lutte, il se heurte aux souverains établis, Louis XI et l'empereur Frédéric III. Les affrontements sont d'abord indirects, sur le théâtre d'autres conflits européens. Ainsi, dans la guerre des Deux-Roses, en Angleterre, Louis XI prend le parti d'Henri VI de Lancastre alors que Charles de Bourgogne soutient Édouard IV d'York, dont il épouse la fille, Marguerite, en 1468. Cette année lui est propice à plus d'un titre, car il remporte une victoire diplomatique lors de l'entrevue de Péronne avec Louis XI, en octobre 1468. En effet, alors que le roi et le duc tentent de s'accorder, la ville de Liège se révolte contre le prince-évêque, à l'instigation, semble-t-il, d'ambassadeurs de Louis XI. Ce dernier est alors contraint d'accompagner Charles le Téméraire qui va réprimer la révolte, et doit accepter de soustraire les états du duc à la juridiction du parlement de Paris. Charles peut alors créer en 1473 le parlement de Malines, sa nouvelle capitale : disposant d'une justice souveraine, il a les moyens de son indépendance.
Une construction territoriale fragile.
• Au-delà des institutions, le duc de Bourgogne doit achever la construction territoriale de ses états, relier le Nord flamand et le Sud bourguignon. C'est le sens de sa diplomatie à l'Est. En 1469, il achète à Sigismond de Habsbourg ses droits sur la haute Alsace. Il obtient de René II de Lorraine le droit de garnison dans son duché. Ce faisant, il s'oppose aux cantons suisses encerclés par les Bourguignons. En 1473, Charles le Téméraire est sur le point d'atteindre son but : indépendance institutionnelle à l'égard du roi de France, encerclement des territoires qu'il désire soumettre à son autorité ; ne lui manque que l'aval de l'empereur Frédéric III de Styrie, qui le reçoit à Trèves mais se garde bien de lui proposer la couronne attendue. Adversaire non déclaré, l'empereur s'oppose au duc de Bourgogne, qui lutte désormais sur trop de fronts simultanément. Défait à Héricourt par les cantons suisses et les villes de basse Alsace, le 13 novembre 1474, Charles le Téméraire ne peut empêcher que ses alliés anglais fassent la paix avec le roi de France au traité de Picquigny en 1475, tandis qu'il s'attarde au siège de Neuss contre l'archevêque de Cologne. Il ne lui reste alors que la force de ses armées : il envahit la Lorraine à la fin de l'année 1475 et s'attaque aux cantons suisses. À Granson le 2 mars 1476, puis à Morat le 22 juin, les cantons abattent la plus puissante armée d'Occident. Le 5 janvier 1477, Charles le Téméraire meurt devant Nancy, qu'il tentait de reprendre à René II de Lorraine. Il laisse pour unique héritière sa fille Marie, qui va devenir l'enjeu de la plus grande succession du XVe siècle. C'en est fini de l'État bourguignon.