C’est une manche décisive remportée par Apple, et un revers majeur pour la Commission européenne. La justice européenne a annulé, mardi 15 juillet, la décision de la Commission, qui avait sommé Apple, à l’été 2016, de rembourser à l’Irlande 13 milliards d’euros d’avantages fiscaux jugés indus. La Commission n’est pas parvenue à démontrer « l’existence d’un avantage économique sélectif », selon les juges européens.
Cet arrêt, très attendu, intervient la veille d’une autre décision dans un dossier tout aussi sensible, qui concerne cette fois Facebook et les transferts de données personnelles de l’Europe vers le reste du monde. Apple et l’Irlande se sont tous deux « félicités » de la décision des juges européens. « Nous saluons le jugement de la Cour européenne », a souligné le ministère irlandais des finances, affirmant qu’il « n’y a jamais eu de traitement spécial » pour Apple.
La vice-présidente de la Commission européenne, Margrethe Vestager, a déclaré dans un communiqué qu’elle allait « étudier avec attention le jugement et réfléchir aux prochaines étapes », sans toutefois dire si Bruxelles allait faire appel de cet arrêt. « La Commission européenne maintient son objectif de voir toutes les entreprises payer leur juste part d’impôts », a expliqué Mme Vestager.
« La France continuera à se battre » pour une taxation accrue des géants du numérique, a affirmé de son côté, dans la soirée, le ministre des finances français, Bruno Le Maire. « Les géants du numérique sont les grands gagnants de la crise économique. C’est une raison supplémentaire pour avancer sur la taxation du numérique à l’OCDE », a-t-il ajouté.
Un traitement fiscal favorable accordé par Dublin
Généralement, lorsque les affaires font l’objet d’un pourvoi devant la Cour, la décision définitive intervient environ seize mois après. Donc, dans le cas d’Apple, la décision serait rendue au cours de l’année 2021.
L’affaire remonte au 30 août 2016, lorsque Mme Vestager, alors commissaire européenne à la concurrence, décide de frapper un grand coup contre la marque à la pomme. Selon l’enquête de la Commission, Apple a rapatrié en Irlande entre 2003 et 2014 l’ensemble des revenus engrangés en Europe (ainsi qu’en Afrique, au Moyen-Orient et en Inde), car l’entreprise y bénéficiait d’un traitement fiscal favorable, grâce à un accord passé avec les autorités de Dublin.
Le groupe a ainsi échappé à la quasi-totalité des impôts dont il aurait dû s’acquitter sur cette période, soit environ 13 milliards d’euros, selon les calculs de la Commission. Un avantage qui constitue pour Bruxelles une « aide d’Etat » illégale, puisqu’elle se fait aux dépens d’autres entreprises soumises à des conditions moins favorables.
Pour Dublin, néanmoins, il n’y avait rien d’illégal. Connue pour ses positions « pro-business », l’Irlande a attiré sur l’île de nombreuses multinationales, pourvoyeuses d’emplois, grâce à une fiscalité avantageuse. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’Irlande, comme Apple, avait fait appel de la décision de la Commission. « La Commission a outrepassé ses pouvoirs et violé la souveraineté » irlandaise concernant l’impôt sur les sociétés, avait affirmé Dublin. Quant au patron d’Apple, Tim Cook, il avait qualifié l’affaire de « foutaise politique ».
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