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Israël face au terrorisme des voitures béliers

Deux attaques de ce type ont eu lieu mercredi, à Jérusalem et en Cisjordanie, tuant une personne et en blessant plus d'une dizaine.

Par  (Jérusalem, correspondant)

Publié le 05 novembre 2014 à 12h05, modifié le 07 novembre 2014 à 07h52

Temps de Lecture 5 min.

Un homme blessé par l'attaque à la voiture bélier à Jérusalem, le 5 novembre.

Israël est confronté à une nouvelle forme d'attaques, un terrorisme « low cost » impossible à prévenir, dont l'impact psychologique est redoutable : la voiture bélier. Selon un bilan provisoire, un policier a été tué et 14 autres personnes ont été blessées à Jérusalem-Est, mercredi 5 novembre, dans une opération de cette nature contre des piétons.

Une camionnette a heurté un premier groupe à une station du tramway au coin de la rue Shimon-Hatzadik, avant de poursuivre sa route le long des rails et de foncer sur d'autres passants.

Dans la soirée, un autre véhicule a blessé trois soldats dans le groupe de colonies de Goush Etzion, en Cisjordanie, près du camp de réfugiés d'Al-Aroub. Le conducteur a pris la fuite avant d'être arrêté, jeudi. Il dément toute attaque préméditée et parle d'un accident. Il s'agit de la seconde attaque de ce genre de la journée et la troisième en deux semaines, qui confirment les craintes d'une spirale de violences dans la Ville sainte.

ABBAS « CONDUCTEUR DE LA VOITURE DE LA MORT »

Une personne est morte et treize autres blessées après qu'un homme a lancé son véhicule contre des piétons. Le conducteur a été abattu par la police.
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Selon la presse israélienne, le nom du conducteur impliqué dans l'après-midi est Ibrahim Al-Akari. Originaire du camp de réfugiés de Chouafat, au nord-est de Jérusalem, cet homme de 38 ans a été tué par des fonctionnaires de la police aux frontières, dont le siège se trouvait à proximité, après avoir tenté d'attaquer des passants avec une barre de fer. « C'est ainsi que nous voulons que ces incidents se finissent », a réagi le ministre de la sécurité intérieure, Yitzhak Aharonovich, qui a félicité ses hommes.

L'un des frères d'Al-Akari a passé dix-neuf ans en prison pour avoir enlevé et tué un soldat israélien en 1992. Relâché en 2011 dans le cadre de l'accord pour la libération du soldat Shalit, détenu par le Hamas, il a été ensuite expulsé vers la Turquie. Le Hamas et le Jihad islamique, son principal concurrent dans la bande de Gaza pour la lutte armée, ont tous deux salué l'opération de mercredi. De son côté, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, s'est empressé de mettre en cause le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.

L'attaque est « une conséquence directe de l'incitation d'Abbas et de sa collaboration avec le Hamas », a déclaré le chef du gouvernement, lors d'une cérémonie à la mémoire d'Yitzhak Rabin, assassiné il y a dix-neuf ans. Coutumier des déclarations à l'emporte-pièce, le ministre de l'économie Naftali Benett a qualifié Mahmoud Abbas de « conducteur de la voiture de la mort à Jérusalem, tandis que les terroristes sont simplement ses passagers ». M. Bennett a appelé les autorités à dénoncer le gouvernement d'union nationale palestinienne, composé par le Fatah, la formation du président Abbas, et le Hamas.

Le 22 octobre, une attaque similaire avait eu lieu à une station de tramway à Ammunition Hill, dans laquelle deux personnes étaient mortes, dont un bébé de 3 mois. Le chauffeur, originaire du quartier de Silwan, avait tenté de s'enfuir à pied mais avait été abattu par la police. M. Nétanyahou avait déjà mis en cause M. Abbas, en raison de ses appels à défendre « par tous les moyens » la mosquée Al-Aqsa contre la volonté de la droite dure israélienne d'y obtenir le droit de prier pour les juifs. « Le gouvernement maintiendra scrupuleusement le status quo sur le mont du Temple », a déclaré dimanche Mark Regev, le porte-parole de M. Nétanyahou. Des propos qui n'ont guère apaisé la colère palestinienne.

Après des affrontements mercredi matin entre des dizaines d'activistes masqués et la police, sur l'esplanade des Mosquées, le site a été une nouvelle fois fermé au public pendant quelques heures. Selon la police, les Palestiniens s'étaient retranchés dans la nuit à l'intérieur de la mosquée Al-Aqsa, sans doute dans l'attente d'un groupe de visiteurs juifs radicaux, mobilisés depuis la tentative d'assassinat il y a une semaine contre l'un des leurs, Yéhuda Glick. Les émeutiers les attendaient avec des projectiles.

« REJET POPULAIRE DE L'AUTORITÉ ISRAÉLIENNE »

Mercredi matin, de nouveaux affrontements ont eu lieu sur le site de l'esplanade des Mosquées, troisième lieu saint de l'islam à Jérusalem-Est, où les policiers israéliens sont entrés pour disperser des manifestants masqués.

Les forces de l'ordre ont alors avancé pour les repousser à l'intérieur du bâtiment, passant même les portes d'entrée. Une situation suffisamment grave pour pousser la Jordanie à rappeler son ambassadeur en Israël en signe de protestation. Elle compte saisir le conseil de sécurité des Nations unies au sujet des « violations » répétées des lieux saints par Israël.

Lors d'une rencontre avec la presse dimanche, un haut responsable de la police à Jérusalem avait expliqué que les forces de l'ordre n'utilisaient aucune arme létale et ne s'engageaient jamais à l'intérieur même de la salle de prières, ayant conscience de l'impact catastrophique de cette image. Selon ce haut responsable, un noyau dur de 50 personnes serait impliqué dans les violences sur l'esplanade, mais ils sont susceptibles d'en entraîner bien davantage. C'est le scénario que cherchent à éviter les autorités.

La nouvelle attaque à la voiture bélier, survenue mercredi dans la Ville sainte, a eu lieu sur une artère symbolique, entre le quartier ultraorthodoxe de Mea Shearim et Jérusalem-Est. Elle confirme la dégradation constante de la situation à Jérusalem depuis le début du mois de juillet, juste avant le début de l'opération « Bordure protectrice » dans la bande de Gaza. Dans certains quartiers arabes de l'est et du nord de la ville, les émeutes se sont multipliées. Le gouvernement a considérablement renforcé les effectifs dans la ville. Au total, depuis le début de juillet, plus de 900 personnes ont été arrêtées, dont 300 condamnées. Ces dix derniers jours, plus de 110 personnes impliquées dans des troubles ont été interpellées.

PALESTINIENS ISOLÉS, DISCRIMINÉS

La hiérarchie policière promet le rétablissement de l'ordre et rejette toute idée d'embrasement. Des blocs de béton ont commencé à être installés, dans la soirée, le long du parcours du tramway, pour empêcher des véhicules de s'engager sur les rails. Mais ces nouvelles attaques démontrent l'inefficacité de l'approche purement sécuritaire choisie par le gouvernement israélien. Ce dernier entend par ailleurs poursuivre la politique du fait accompli, en ce qui concerne le développement des colonies en Cisjordanie et dans la périphérie de Jérusalem. Isolés, discriminés, les Palestiniens vivant à Jérusalem grondent.

« Il s'agit d'un rejet populaire de l'autorité israélienne, non organisé, jeune et sans leaders, explique Menachem Klien, professeur au département d'études politiques à l'université Bar-Ilan. On peut la qualifier d'intifada locale. » Sur les réseaux sociaux, certains Palestiniens s'interrogeaient déjà, dans les heures qui ont suivi l'attaque : le gouvernement israélien va-t-il aussi leur interdire la voiture ?

Lire le reportage : (éditions abonnés) : Article réservé à nos abonnés A Jérusalem-Est, « les gens sont sans espoir, frustrés »
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