LA CONFÉRENCE DE CARNUNTUM ET LE «DIES IMPERII»

DE LICINIUS* Par W. S e s t ο η (Paris)

En France tout au moins, beaucoup d'historiens se détournent actuellement des discussions sur la succession des faits, de ce qu'on appelle volontiers l'«histoire événementielle», pour s'attacher à l'«histoire des idées» ou à F«histoire de la civilisation». En traitant d'un problème de chronologie, nous ne croyons pas cependant qu'il convienne de s'en excuser, car il n'y a pas (est-il besoin de le dire?) d'histoire sans chronologie. Aussi bien, en essayant de préciser des dates que notre documentation tant littéraire qu'épigraphique ou numismatique a, comme à plaisir, embrouillées, ne nous sommes-nous pas détournés d'un problème de «civilisation». En effet, à Carnuntum en 307 et à Salsovia dix ou quinze ans plus tard, ce qui était en cause, c'était moins les intérêts opposés des hommes d'état du moment que les principes mêmes, politiques et religieux, de l'organisation du monde romain.

De la Conférence de Carnuntum nous avons dans Lactance le récit le plus ancien, puisqu'il fut rédigé moins de dix ans après les événements: Maximien est allé en 307 marier sa fille Fausta à Constantin ; entre temps, Galère a échoué dans son expédition italienne (ch. 27). Revenu à Rome, Maximien s'est brouillé avec son fils Maxence qui l'a chassé de la Ville (ch. 28). «Après être rentré en Gaule, où il séjourna quelque temps, il alla chez Galère, l'ennemi de son fils, sous le prétexte de discuter avec lui du rétablissement de l'ordre public . . . Dioclès était là. Son gendre l'avait fait venir récemment pour que, ce qu'il n'avait pas fait auparavant, en sa présence, il donnât le pouvoir impérial à Licinius- choisi pour remplacer Sévère. La cérémonie fut accomplie en présence des deux Augustes. Ainsi, pour peu de temps, il y eut six empereurs. Voyant ses projets contrariés, le vieux Maximien se préparait à fuir pour la troisième fois. Il revient en Gaule, débordant de projets criminels ... Il dépose le vêtement impérial ».

La cohérence de ce récit n'a pas cessé d'impressionner les historiens modernes, qui tous en ont accepté les péripéties: 0. Seeck, Groag, W. Ensslin, Moreau. Groag, qui est à l'égard de Lactance le plus réticent d'entre eux, n'hésite pas à écrire que nos autres sources, Zosime II 10, Aurelius Victor XL 8 — 9, Zonaras XII 33, »nous donnent un insoutenable groupement des événements»1) et que Lactance seul paraît connaître ceux-ci dans leur exacte succession. J'ai dans Lactance beaucoup moins de confiance et il me paraît possible de retrouver dans Zosime une

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