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Michèle Riot-Sarcey, La démocratie à l'épreuve des femmes. Trois figures critiques du pouvoir. 1830-1848, 1994

[compte-rendu]

Fait partie d'un numéro thématique : L'exil
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Michèle RIOT-SARCEY LA DÉMOCRATIE A L'ÉPREUVE DES FEMMES.

TROIS FIGURES CRITIQUES DU POUVOIR. 1830-1848

Albin Michel, 1994, 365 p.

Sous ce titre, «La Démocratie à l'épreuve des femmes «, Michèle Riot-Sarcey publie de larges extraits de sa thèse de doctorat d'histoire soutenue en 1990 à l'université Paris VIII (direction Madeleine Rebérioux). Le titre met immé¬ diatement l'accent sur la contradiction majeure de la IIe République envisagée d'un point de vue féminin, si ce n'est féministe. De l'immense fête de la fraterni¬ té de février 1848 sort en effet, et définitivement, l'exercice du suffrage universel pour les hommes, mais leurs compagnes, filles et mères demeureront exclues jusqu'en 1944 de la citoyenneté véritable, celle qui passe par la liberté de choi¬ sir ses mandants ou de refuser d'en faire usage. Trois parcours biographiques étayent l'analyse de la période : ceux de Désirée Véret-Gay, ouvrière de l'ai¬ guille, d'Eugénie Niboyet, femme de lettres, et de Jeanne Deroin, lingère, toutes actrices éminentes des années 1830-1848. Michèle Riot-Sarcey n'a pas souhai¬ té simplement faire revivre ces héroïnes de la cause féminine, ce qui eût été rendre justice à leur combat et en éclairer la genèse. Elle a choisi d'inscrire son propos dans le renouvellement de l'histoire politique française et de montrer que, jusque-là, celle-ci avait été écrite au masculin par des spécialistes qui ignoraient largement l'œuvre de la médaille quarante-huitarde. François Furet et Claude Nicolet sont cités à ce titre mais l'on sent que la critique vise la quasi-totalité de la communauté historienne, ce qui fait l'un des charmes un peu pro¬ vocateur de ce livre.

Dans une première partie, Michèle Riot-Sarcey campe le décor intellec¬ tuel, idéologique et politique dans lequel se sont insérés ses personnages. Caractérisant à juste titre la période 1830-1835 comme «le temps des pos¬ sibles » ou encore celui de la liberté, elle montre l'intense bouillonnement qui fit de Paris la cité-phare en Europe. Le paradoxe réside, à ses yeux, dans le déca¬ lage entre l'aspiration universalisante à la liberté, exprimée par les saints-simo-niens et les républicains, et leur cécité quant au statut des femmes. Lectrices du Globe, Jeanne Deroin, Désirée Gay et Eugénie Niboyet ont accueilli la doctri¬ ne du Père Enfantin. Elles ressentirent une intense frustration lorsque ce dernier marginalisa les femmes en rejetant leur émancipation dans un futur indéterminé. Évoquant la presse de l'époque, Le Populaire de Cabet, Le Bon Sens ou La Tri¬ bune, Michèle Riot-Sarcey parle de «surdité » à l'égard des revendications féminines. Objets fréquents de débats, y compris dans le camp libéral, les femmes sont pensées par les hommes mais jamais invitées à se prendre en charge et à devenir les actrices de leur cause. Or tant du côté des trois témoins de révolution des idées que des cercles féministes les plus divers, l'exigence d'émancipation progresse, radicalisant certaines prises de position. La construction de la démocratie sans les femmes renverra dans un malaise, un «mal-être », celles qui attendront 1848 pour tenter de construire la cité égalitai-re dont elles rêvaient.

Saint-simoniennes puis disciples de Fourier avec qui elles échangent une longue correspondance, ces trois femmes ont trouvé dans la religion le lien qui leur permet d'attendre l'émancipation. C'est pourquoi la seconde partie du volume étudie l'assomption de la morale entre 1835 et 1848. Du Journal des femmes au Conseiller des femmes, fondé à Lyon en 1833 par Eugénie Niboyet, le cheminement des idées est évident. Le recul est cependant sensible par rap¬ port à 1 830 mais le pouvoir veille désormais sur la circulation des écrits et les

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